Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2004, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) X, dont le siège est ..., par
Me Le Cam ; la SARL X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 02-3247 en date du 18 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1997 au
31 décembre 1998, par avis de mise en recouvrement du 10 mai 2001 ;
2°) de la décharger du paiement desdits droits et pénalités ;
Elle soutient :
- qu'elle maintient l'argumentation qu'elle a présentée devant le Tribunal ; que les chefs de redressement invoqués par l'administration ne reposent que sur des dépositions aux services de police dans le cadre d'une procédure pénale ouverte à l'encontre de M. Jean-Claude Y mais pour laquelle aucun jugement n'est intervenu ; que M. Y est toujours présumé innocent et que les documents issus de cette instruction ne permettent pas d'établir la matérialité des faits reprochés ;
- qu'elle est fondée à se prévaloir de la situation de la société MJM, appartenant au même groupe, qui a obtenu le dégrèvement des redressements qui lui avaient été notifiés pour les mêmes motifs que ceux qui font l'objet du présent litige alors que cette société avait développé à l'appui de ses réclamations les mêmes arguments que l'exposante ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2004, présenté pour l'Etat, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, représenté par le directeur départemental des impôts ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête ;
Le ministre soutient :
- en premier lieu, que la requête est en partie irrecevable pour ne pas contenir de moyens d'appel, la requérante ne pouvant se borner à se référer ou à reprendre les moyens de sa demande de première instance, dont elle n'a, au surplus, pas produit copie ;
- en deuxième lieu, que les impositions sont bien fondées ; que, d'une part en effet, il a été fait un usage régulier du droit de communication, prévu par l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, pour établir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que cet article concerne indifféremment les affaires ayant donné lieu à un jugement ou celles en cours d'instruction ; que l'administration peut fonder une imposition sur des renseignements obtenus auprès de tiers et est seulement tenue d'informer le contribuable des informations communiquées, avant la mise en recouvrement ; que, d'autre part, le redressement relatif aux prestations administratives et d'entretien est bien fondé ; qu'il résulte, en effet, de l'instruction judiciaire que les personnes employées pour effectuer ces prestations travaillaient en réalité à 75 % de leur temps à la restauration de la maison d'habitation de M. Y, associé majoritaire de la holding et de la requérante ; que la requérante ne présente aucun moyen sérieux pour contester ces rappels ; qu'enfin, elle ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la société MJM, qui fait partie du même groupe, a bénéficié d'une décision de dégrèvement dès lors que cette décision concerne un autre contribuable ; que la réclamation de la société MJM n'a fait l'objet que d'une admission partielle, certains chefs de redressement ayant été confirmés ; que la décision de dégrèvement n'est pas motivée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2006 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration fiscale :
Considérant que la SARL X, qui exploite un fonds de commerce de débits de boissons et de café brasserie sous l'enseigne « Z» à Dunkerque, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1998, à l'issue de laquelle l'administration fiscale, après avoir écarté partiellement des charges de personnel, facturées par la SA Holding Y, comme non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, lui a notifié des redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de pénalités de mauvaise foi, et d'imposition forfaitaire annuelle ; que la SARL X, qui a obtenu devant les premiers juges la décharge des cotisations supplémentaires à l'imposition forfaitaire annuelle, fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes ;
Sur les droits :
Considérant, en premier lieu, que l'administration fiscale était en droit d'utiliser les éléments communiqués par l'autorité judiciaire en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'aucun jugement pénal n'était intervenu ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour notifier à la requérante, sur le fondement de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fiscale s'est fondée sur les éléments communiqués par l'autorité judiciaire, qui consistent notamment en un procès-verbal d'audition d'un salarié de la société Holding Y indiquant que plusieurs membres du personnel de la holding, censés accomplir des travaux administratifs et d'entretien au profit de la requérante, travaillaient en réalité, à concurrence de 75 % de leur temps, à la restauration de la maison d'habitation de M. Y, principal associé de cette société ; que, dans ces conditions et alors que le fait sus relaté n'est pas sérieusement contesté par la requérante, qui se borne à faire valoir que les éléments issus de l'instruction pénale sont dépourvus de valeur probante suffisante, l'administration doit être regardée comme établissant le bien-fondé des impositions contestées ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer que la société requérante ait entendu se prévaloir du dégrèvement accordé par l'administration fiscale par décision du 6 août 2002 à la société MJM, qui fait partie du même groupe, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, cette décision, non motivée, ne constitue pas, en tout état de cause, une interprétation de la loi fiscale dont l'intéressée puisse se prévaloir sur le fondement dudit article ;
Considérant, enfin, que si la société requérante indique dans sa requête maintenir les moyens qu'elle a présentés devant le tribunal administratif, il y a lieu pour la Cour de rejeter lesdits moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
Sur les pénalités :
Considérant que si la SARL X demande la décharge de la majoration de 40 % dont ont été assortis les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, elle ne présente aucun moyen à l'appui de ces conclusions, qui ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°04DA00224