Vu la requête, enregistrée le 9 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Patrick X, demeurant ..., par Me Durand ; M. X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement nos 02-3602, 02-3603, 02-3922, 03-2921, 03-2922 et 03-4204 en date du 9 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 à 1998, d'autre part, des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles il a été assujetti au titre des années 1998 à 2001 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Il soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé à tort tant l'administration que les premiers juges, son activité ne revêt pas un caractère intellectuel prépondérant et ne saurait, par suite, être qualifiée de libérale, mais est de nature commerciale, de sorte qu'il était en droit de bénéficier au titre des années contestées du régime d'exonération prévu en faveur des entreprises nouvelles ; qu'il est d'ailleurs inscrit au répertoire des métiers et a participé au concours de meilleur ouvrier de France ; que, dans le cadre de l'exercice de son activité d'infographiste, il ne participe pas à la conception des dessins, qu'il se borne à reproduire et à agrandir ou réduire à l'aide d'un logiciel spécifique, afin qu'ils puissent ensuite être réalisés sur des tapisseries ou tissus ; qu'une telle activité ne nécessite la maîtrise d'aucun art ou science ; qu'il ne perçoit pas, en raison de ses travaux, de redevances liées à un quelconque droit de propriété intellectuelle ; qu'enfin, il est assujetti, depuis son installation, à la taxe professionnelle et à la taxe pour frais de chambres de métiers, de telles taxations étant incompatibles avec une activité générant des revenus relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'activité de
M. X consiste à adapter les modèles qui lui sont fournis aux contraintes liées à la production de tissus ou de tapis au moyen d'une machine textile ; qu'il s'agit, en réalité, d'opérations de conception et de confection, sans l'assistance d'un collaborateur, des « cartons » permettant le tissage des tissus et tapis ; qu'une telle activité suppose la mise en oeuvre d'un travail intellectuel et nécessite la maîtrise d'une science ou d'un art, ce qui lui confère le caractère d'une activité non commerciale ; que l'utilisation d'un programme informatique ne saurait faire obstacle à une telle qualification, dès lors que l'outil informatique est désormais d'un usage courant pour l'ensemble des professions intellectuelles ; que le requérant ne saurait tirer argument de ce qu'il ne bénéficie pas de la protection intellectuelle de son oeuvre, dès lors qu'un tel bénéfice ne constitue pas un critère de détermination de la nature de l'activité exercée au regard de la loi fiscale ; qu'enfin, il résulte de l'article 1497 du code général des impôts que M. X, qui, compte tenu de ce qui précède, est titulaire de bénéfices non commerciaux, est passible de la taxe professionnelle ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 3 octobre 2005, présenté pour M. X ; il conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2005 à laquelle siégeaient
Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. le Goff, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X, qui exerce à titre indépendant l'activité d'infographiste et s'était placé, au titre des années 1995 à 1998, sous le bénéfice du régime d'exonération prévu en faveur des entreprises nouvelles par l'article 44 sexies du code général des impôts, conteste les redressements en matière d'impôt sur le revenu et de taxe professionnelle qui lui ont été notifiés par l'administration au motif que les revenus qu'il retirait de son activité étaient imposables non dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux mais dans celle des bénéfices non commerciaux ;
Sur le bénéfice du régime d'exonération en faveur des entreprises nouvelles :
Considérant qu'aux termes de l'article 34 du code général des impôts : « Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale… » ; qu'aux termes de l'article 44 sexies du même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : « Les entreprises créées entre le
1er janvier 1995 et le 31 décembre 1999 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités de l'article 53 A… » ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que l'exonération qu'elles instituent n'est applicable qu'aux entreprises dont l'activité est de nature industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 précité et que sont exclues du bénéfice de celle-ci les entreprises exerçant des activités d'une autre nature ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité exercée par M. X consiste à élaborer des référentiels ou « cartons » destinés à être utilisés pour la fabrication de tissus et de tapis, à partir des dessins fournis par ses clients en les adaptant aux contraintes des machines textiles dans le respect de l'intention du créateur ; qu'une telle activité, alors même qu'elle est exercée à l'aide d'un logiciel informatique et que le requérant n'élabore pas lui-même les dessins originaux, comporte une part substantielle de conception et revêt, par suite, un caractère intellectuel qui lui confère la nature d'une activité non commerciale ; que, dès lors, et alors que la circonstance que
M. X soit assujetti à la taxe professionnelle et à la taxe pour frais de chambres de métiers est, contrairement à ce qu'il prétend, sans influence sur la qualification de la nature, commerciale ou non commerciale, de son activité, c'est à bon droit que l'administration a imposé dans la catégorie des bénéfices non commerciaux les revenus qu'il a tirés de cette activité et a, en conséquence, remis en cause le bénéfice du régime de faveur prévu par l'article 44 sexies sous lequel il s'était placé ;
Sur la taxe professionnelle :
Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : « La taxe professionnelle a pour base : … 2° Dans le cas des titulaires de bénéfices non commerciaux, des agents d'affaires et intermédiaires de commerce, employant moins de cinq salariés, le dixième des recettes et la valeur locative des seules immobilisations passibles des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties et dont le contribuable a disposé pendant la période de référence… » ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X perçoit des revenus relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'ainsi et par application des dispositions du 2° précité de l'article 1467 du code général des impôts, il a été à bon droit assujetti au titre des années contestées à la taxe professionnelle selon les modalités, prévues par ces mêmes dispositions, applicables aux titulaires de bénéfices non commerciaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Patrick X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrick X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
N°05DA00157 2