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20/12/2001 | FRANCE | N°00DA00611

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1e chambre, 20 décembre 2001, 00DA00611


Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair, dont le siège social est sis ..., représentée par son président en exercice ; l'association demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 99-316 et 99-1686 en date du 30 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation du permis de construire délivré le 24 décembre 1998 par le maire d'Etretat à la SNC Etretat Petit Val développe

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Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair, dont le siège social est sis ..., représentée par son président en exercice ; l'association demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 99-316 et 99-1686 en date du 30 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation du permis de construire délivré le 24 décembre 1998 par le maire d'Etretat à la SNC Etretat Petit Val développement en vue de l'édification de 76 logements sur un terrain sis chemin de Saint-Clair et, d'autre part, à l'annulation de la décision du 19 mars 1999 dudit maire délivrant à la société précitée un permis de construire modifiant le précédent ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions et d'ordonner qu'il sera sursis à leur exécution ;
3 ) de condamner la commune d'Etretat et la SNC Petit Val développement à lui verser la somme de 20 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;
Vu la loi du 31 décembre 1913 ;
Vu la loi du 2 mai 1930 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2001
le rapport de M. Laugier, président-assesseur,
les observations de Me Y..., avocat, pour l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair,
les observations de Me X..., avocat, pour la commune d'Etretat,
les observations de Me Z..., avocat, pour la SNC Etretat Petit Val développement,
et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société Petit Val développement :
Considérant que l'article 7 des statuts de l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair donne au président de ladite association le pouvoir d'ester en justice ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir du président de l'association appelante, signataire de la requête, ne peut qu'être rejetée ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UG 10 du plan d'occupation des sols :
Considérant qu'aux termes de l'article UG 10 du plan d'occupation des sols de la commune d'Etretat : "La hauteur de toute construction ne devra pas excéder un comble habitable sur rez-de-chaussée, ni quatre mètres à l'égout de toiture ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des plans de façades et de coupes joints à la demande de permis de construire que les constructions autorisées, qui présentent une hauteur de quatre mètres à l'égout du toit et de 8,70 mètres au faîtage, comportent, au-dessus du rez-de-chaussée, un étage droit, puis, au-dessus de celui-ci, un comble ; que, dès lors, et à supposer même que ce dernier ne soit pas habitable, les dispositions réglementaires précitées, qui n'admettent qu'un seul comble sur rez-de-chaussée, ont été méconnues ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré par l'arrêté municipal du 24 décembre 1998 et l'arrêté complémentaire du 19 mars 1999 ;
Sur les autres moyens relevés en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, issu de la loi susvisée du 13 décembre 2000 et applicable à l'espèce : "Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier" ;
En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de consultation de la commission départementale de sécurité :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-53 du code de l'urbanisme : "Conformément à l'article R. 123-22 du code de la construction et de l'habitation, le respect de la réglementation relative à la protection contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public est assuré par le permis de construire ... Dans ce cas, le permis de construire est délivré après consultation de la commission de sécurité compétente" ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 123-1 et R. 123-22 du code de la construction et de l'habitation, l'avis de la commission départementale de sécurité est requis préalablement à la délivrance de l'autorisation pour les établissements recevant du public dans les conditions et selon les catégories définies aux articles R. 123-1 et suivants dudit code et par les textes réglementaires pris pour leur application ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, saisie du projet en litige prévoyant la construction d'une résidence de tourisme comprenant notamment un bâtiment d'accueil et cinq bâtiments à usage de logements collectifs, la commission de sécurité a proposé, suivant procès-verbal du 5 novembre 1998, de classer l'opération en cinquième catégorie, exemptée de la consultation requise par la réglementation des établissements recevant du public ; et qu'en conséquence elle n'a pas rendu d'avis sur le projet ; que, si la commune et la bénéficiaire de l'autorisation critiquée soutiennent à ce titre que seul le bâtiment d'accueil ressortit à ladite réglementation, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des constructions autorisées constitue une résidence de tourisme, comptant 379 lits, caractérisée par des modalités d'utilisation et d'habitation variables, des formes juridiques d'occupation diverses et affectée d'équipements et de services communs ; que, ladite résidence relevant ainsi en son entier de la législation régissant les établissements recevant du public, il appartenait à l'autorité administrative de recueillir un avis, sur le fond, de la part de la commission de sécurité compétente, préalablement à la délivrance du permis en litige ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 123-1 et suivant du code de la construction et de l'habitation est susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation du permis de construire attaqué ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-21 du code de l'urbanisme et UG 11 du plan d'occupation des sols :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales" et qu'aux termes de l'article UG 11 du plan d'occupation des sols : "ILes constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, du site ou des paysages" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté en défense, qu'une partie des constructions en litige sera visible des falaises d'amont et d'aval et, en certains points, de la promenade édifiée sur le front de mer ainsi que du rivage ; que, si le permis impose la création de plantations, le rideau d'arbres dont l'implantation est prescrite au pétitionnaire ne concerne que la partie du terrain sise entre les bâtiments projetés et le chemin de Saint-Clair ; que, dans ces conditions, et eu égard, d'une part, au caractère exceptionnel des lieux avoisinants que présente le site d'Etretat et, d'autre part, aux dimensions de l'ensemble immobilier projeté, ainsi qu'à la configuration des bâtiments, implantés en ligne, il apparaît qu'en autorisant ledit projet dont une partie sera visible depuis la côte et en s'abstenant de prescrire l'implantation de végétation séparant l'ensemble des constructions de la façade du plateau orientée vers la mer, l'autorité administrative a, nonobstant les précautions déjà prises et la qualité architecturale recherchée, entaché d'erreur manifeste son appréciation des données de l'espèce au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et procédé à une inexacte application des dispositions précitées de l'article UG 11 du plan d'occupation des sols ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions réglementaires paraît susceptible également, en l'état du dossier, de fonder l'annulation du permis de construire en litige ;
En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance des conditions d'accès aux constructions autorisées :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'unique accès à l'ensemble immobilier autorisé est prévu par le chemin de Saint-Clair, voie étroite qui n'est pas en mesure, en l'état actuel, d'assurer la desserte d'un projet de cette ampleur, comprenant notamment soixante-seize logements et une aire de stationnement de 161 places ; que si un projet d'aménagement de cette voirie a été adopté par la commune et si les prescriptions en vue de sa réalisation ont été définies par les services de la direction départementale de l'équipement aux termes, toutefois, d'une note technique qui s'est trouvée retranchée, par l'arrêté municipal du 19 mars 1999, de l'autorisation initiale délivrée le 24 décembre 1998 il ressort des pièces du dossier qu'après aménagement du chemin de Saint-Clair, le croisement des véhicules entrant et sortant de la résidence ne pourra s'effectuer, d'une part, qu'en certaines zones ponctuellement élargies à cet effet et, d'autre part, qu'au prix d'une interdiction effective du stationnement sur ledit chemin ; qu'ainsi, en l'état du dossier, le permis de construire attaqué n'est pas assorti des prescriptions relatives aux accès qui seraient de nature à assurer la sécurité des usagers de la voie publique ou celle des personnes utilisant ces accès ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme est susceptible également, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation de l'autorisation critiquée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair, qu n'est pas la partie perdante en l'instance, soit condamnée à payer à la commune d'Etretat et à la société Petit Val développement les sommes que celles-ci demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune d'Etretat et la SNC Petit Val développement à payer à l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair la somme de 10 000 francs chacune au titre de ces mêmes dispositions ;
Article 1er : Le jugement n 99.316 et 99.1686 du tribunal administratif de Rouen en date du 30 mars 2000 et les arrêtés en date des 24 décembre 1998 et 19 mars 1999 par lesquels le maire d'Etretat a délivré un permis de construire à la société en nom collectif Petit Val développement sont annulés.
Article 2 : La commune d'Etretat et la SNC Petit Val développement verseront chacune une somme de 10 000 francs (dix mille francs) à l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune d'Etretat et par la SNC Petit Val développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association de défense du site d'Etretat et du chemin de Saint-Clair, à la commune d'Etretat, à la SNC Petit Val développement et au ministre de l'équipement, des transports et du logement. Copie sera transmise, en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance du Havre et, pour information, au préfet de la Seine-Maritime.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 00DA00611
Date de la décision : 20/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - PROCEDURE D'ATTRIBUTION.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de l'urbanisme L600-4-1, R421-53, L123-1, R111-21, R111-4
Code de la construction et de l'habitation R123-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 2000-1208 du 13 décembre 2000


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laugier
Rapporteur public ?: M. Yeznikian

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2001-12-20;00da00611 ?
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