Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2000280 du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 et 29 juillet 2020, Mme A... F..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2020 du préfet de l'Indre ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Indre de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros, à payer à son conseil sous réserve de la renonciation de cet avocat à percevoir la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation au regard de sa situation personnelle et s'aligne totalement sur l'argumentaire de la décision préfectorale en se bornant à reproduire les motivations insuffisantes de l'acte attaqué, de plus, il donne une mauvaise interprétation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du CESEDA et des dispositions du code civil en matière d'intérêt des enfants ;
- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation qui mérite d'être appréciée favorablement, tant sur le plan humanitaire qu'à titre exceptionnel au sens du L. 313-14 du CESEDA ;
- il est porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la circulaire Valls du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des étrangers en situation irrégulière contient une disposition qui concerne le traitement des demandes de regroupement familial sur place permettant à l'autorité administrative d'autoriser un regroupement familial sur place dans certaines situations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail, fait à Paris, le 17 mars 1988 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... G... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., ressortissante tunisienne née le 2 août 1989, est entrée régulièrement en France le 3 septembre 2018 sous couvert d'un visa de court séjour, avec sa fille pour rendre visite à son époux en situation régulière sur le territoire français. Le 6 novembre 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 28 janvier 2020, le préfet de l'Indre a refusé de faire droit à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 mai 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Mme F... soutient que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation et qu'il se fonde totalement sur l'argumentaire du préfet en se bornant à reproduire les motivations insuffisantes de l'acte attaqué. Un tel moyen ne peut qu'être écarté faute pour l'appelante de préciser le ou les moyens auxquels les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'auraient pas répondu.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Mme F... soutient qu'elle vit en France depuis 2018 et fait valoir la présence de son époux, ressortissant tunisien en situation régulière en France, et de ses filles B..., née le 18 janvier 2017 au Maroc, et Dorra, née le 24 octobre 2018 en France. Toutefois et ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, il ne ressort des pièces du dossier ni que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer hors de France, notamment en Tunisie, pays dont l'appelante et son mari ont tous deux la nationalité, ni que si Mme F... devait quitter la France avec ses enfants, son époux ne pourrait leur rendre visite. En outre, dans l'hypothèse où Mme F... serait amenée à quitter la France sans son époux, voire sans ses enfants, cette séparation ne serait que temporaire, l'appelante pouvant demander à revenir sur le territoire national au titre du regroupement familial ou en sollicitant la délivrance d'un visa. Il n'est pas établi par ailleurs que Mme F..., entrée récemment en France, serait dépourvue d'attaches en Tunisie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans et où résident notamment ses parents et son frère ni que sa fille aînée ne pourrait y poursuivre une scolarité normale. L'appelante n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'elle remplit les conditions pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne pouvait pour ce motif faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. En outre, et pour les mêmes motifs, le préfet de l'Indre en l'obligeant à quitter le territoire français, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée doit être écarté.
5. Par ailleurs, Mme F... ne peut utilement invoquer les orientations générales que le ministre de l'intérieur, dans sa circulaire du 28 novembre 2012, a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation et qui est dépourvue de portée impérative.
6. En second lieu, au soutien de ses moyens, relatifs à la méconnaissance par l'arrêté attaqué de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, Mme F... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État au titre des frais non compris dans les dépens dès lors qu'il n'est pas dans la présente instance la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Indre.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme H..., présidente-assesseure,
Mme E... G..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.
Le président de chambre,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
5
N°20BX02184