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11/02/2021 | FRANCE | N°19BX00528,19BX04926

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 11 février 2021, 19BX00528,19BX04926


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Fromagerie Papillon a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles de la commune de Villefranche-de-Panat (Aveyron).

Par deux jugements n° 1604768-1703116 du 29 novembre 2018 et n° 1801812 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a

rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Fromagerie Papillon a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles de la commune de Villefranche-de-Panat (Aveyron).

Par deux jugements n° 1604768-1703116 du 29 novembre 2018 et n° 1801812 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 7 février 2019 sous le n° 19BX00528, la société Fromagerie Papillon, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 29 novembre 2018 ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015 à hauteur de 8 400 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la valeur locative de la laiterie, qui constitue un local industriel, doit être évaluée sur la base du prix de revient des immobilisations inscrites à son bilan conformément à l'article 1499 du code général des impôts ; certaines des immobilisations inscrites à son bilan, accompagnées pour certaines d'entre elles de factures, doivent être exclues du calcul de la valeur locative de la laiterie industrielle dans la mesure où elles concernent des outillages et autres moyens matériels d'exploitation exonérés sur le fondement du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ; cette exonération concerne tous les biens, qu'ils soient assimilables ou non à des constructions ; la portée de cet article n'est pas limitée aux seuls outillages dissociables de l'immeuble ;

- cette solution est conforme à la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IF-TFB-10-50-30 qui admet au bénéfice de l'exonération des biens d'équipement spécialisés indissociables de la construction ; plusieurs des immobilisations, comptabilisées comme des agencements de construction, correspondent du fait de leur intégration directe dans le processus de fabrication à de tels biens et ne sont donc pas imposables à la cotisation foncière des entreprises ;

- s'agissant des immobilisations devant s'analyser comme des biens d'équipement spécifiques (BES), les factures y afférentes ont été fournies ; parmi les immobilisations pour lesquelles les factures ne sont pas produites figurent des matériels dont le caractère " non foncier" est évident (compresseur, pompes, stores), des honoraires qui ne sont pas non plus des immobilisations de nature foncière et des installations frigorifiques dont le caractère spécifique à l'activité industrielle exercée dans 1' immeuble est incontestable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Fromagerie Papillon ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019 sous le n° 19BX04926, la société Fromagerie Papillon, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 octobre 2019 ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016 à hauteur d'un montant de 8 482 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les biens présentés comme des biens d'équipement spécifiques, quoique non dissociables du bâtiment, doivent être exclus pour la détermination de la valeur locative ;

- cette solution est conforme à la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IF-TFB-10-50-30, qui admet au bénéfice de l'exonération des biens d'équipement spécialisés indissociables de la construction ;

- les immobilisations correspondant à des achats de matériel et à des honoraires doivent également être exclues pour le calcul de la base imposable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Fromagerie Papillon ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... D...,

- et les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Fromagerie Papillon, qui exerce une activité de fabrication de fromages, a été assujettie à la cotisation foncière des entreprises et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles de la commune de Villefranche-de-Panat (Aveyron) à raison de son établissement situé dans cette commune. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 19BX00528 et n° 19BX04926, la société Fromagerie Papillon relève appel des jugements des 29 novembre 2018 et 22 octobre 2019 par lesquels le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe annexe y afférente auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016, assises sur la valeur locative de l'établissement, évaluée selon la méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts.

2. Ces requêtes, présentées par le même contribuable, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur l'application de la loi fiscale :

3. Aux termes du I de l'article 1447 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales (...) qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée (...) ". L'article 1467 du même code dispose que : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ".

4. Aux termes de l'article 1380 du code général des impôts : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ". Aux termes de l'article 1382 du même code : " Sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés au 1° et 2° de l'article 1381 ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1495 de ce code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".

5. Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

6. La société Fromagerie Papillon fait valoir, à partir d'un tableau des immobilisations acquises de 1983 à 2013, que la base taxable de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016, à raison de son établissement industriel situé à Villefranche-de-Panat, doit être diminuée de la valeur de certaines de ces immobilisations constituant selon elle des matériels dont le caractère " non foncier " est évident (compresseur, pompes, stores), des honoraires, des installations frigorifiques dont le caractère spécifique à l'activité industrielle exercée dans 1'immeuble est incontestable, comme d'autres biens d'équipements spécifiques en vertu des dispositions du 11° de l'article 1382 du code général des impôts.

7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.

8. En l'espèce, les immobilisations énumérées par l'appelante, qui au demeurant n'a pas produit la totalité des factures, relatives aux travaux de chauffage, climatisation, électricité, plomberie, ventilation, de revêtement des sols, installation téléphonique, travaux de remplacement d'un compresseur et d'installation frigorifique, d'achat de buses ultrasoniques ainsi que d'aménagement de réseaux (fuel, EDF, télécom) ne peuvent être regardées comme spécifiquement adaptées au processus industriel mis en oeuvre par l'entreprise dès lors qu'elles peuvent être utilisées en cas d'affectation des locaux à d'autres activités. Les seuls libellés et factures produits par la société appelante sont à cet égard insuffisants pour justifier de la participation directe à l'activité industrielle de l'établissement.

9. En ce qui concerne les immobilisations qui correspondraient à des honoraires ou études en vue des travaux d'agrandissement de la centrale, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des seuls libellés portés sur le tableau d'immobilisations, qu'il s'agit de biens d'équipements spécialisés au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a refusé de regarder ces immobilisations comme des biens d'équipements spécialisés au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts.

Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :

10. La société n'est pas fondée à se prévaloir du paragraphe 180 de l'instruction référencée BOI-IF-TFB-10-50-30 qui admet au bénéfice de l'exonération non seulement des outillages industriels qui sont par essence détachables de la construction, mais également " les biens d'équipement spécialisés, c'est-à-dire les immobilisations qui sont intégrées directement et matériellement dans le processus de fabrication, de transformation ou de manutention et servant spécifiquement à l'exercice de l'activité professionnelle ", qui ne donne pas de la loi une interprétation différente de celle dont il a été fait application par le présent arrêt.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Fromagerie Papillon n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la société Fromagerie Papillon sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Fromagerie Papillon et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme E..., présidente-assesseure,

Mme C... D..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 19BX00528 -19BX04926


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX00528,19BX04926
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-02 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : SELARL MDL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-11;19bx00528.19bx04926 ?
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