Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part d'annuler la décision implicite et la décision expresse du 1er août 2016 par lesquelles le maire du Tampon a refusé de le nommer au grade de brigadier-chef principal de police municipale et, d'autre part, d'enjoindre au maire du Tampon de le nommer à ce grade avec effet rétroactif.
Par un jugement n° 1600937, 1600972 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 13 septembre 2018 et 28 janvier 2020 à 03h48, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 7 juin 2018 ;
2°) d'annuler la décision implicite et la décision du 1er août 2016 par lesquelles le maire du Tampon a refusé de le nommer au grade de brigadier-chef principal de police municipale ;
3°) d'enjoindre au maire du Tampon, à titre principal, de le nommer au grade de brigadier-chef principal de police municipale avec effet rétroactif, ou subsidiairement, de réexaminer sa demande, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Tampon la somme de 2 193 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le conseil municipal du Tampon a, par une délibération du 28 novembre 2015, créé cinq postes de brigadier-chef principal. Il satisfait aux conditions légales et règlementaires permettant d'accéder à ce grade et fait partie des cinq agents pour lesquels ces postes ont été créés. Dès lors, en refusant de le nommer à ce grade, le maire du Tampon n'a pas exécuté la délibération du 28 novembre 2015 en méconnaissance de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales ;
- le tribunal n'a pas répondu à ce moyen et a ainsi entaché son jugement d'un défaut de motivation ;
- comme les deux collègues promus, il remplit les conditions d'avancement prévues par les textes. Dans ces conditions, et alors que suffisamment de postes ont été créés, le refus de le promouvoir méconnaît le principe d'égalité de traitement ;
- ce refus révèle par ailleurs une discrimination contraire à l'article 6 du statut général de la fonction publique et un détournement de pouvoir ;
- ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse à ce moyen en n'indiquant pas pourquoi ce moyen est écarté alors que cinq postes correspondant à ce grade ont été créés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2019, la commune du Tampon, représentée par Me H..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. A... se borne, s'agissant des moyens tirés de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement et du détournement de pouvoir, à reprendre ses écritures de première instance de sorte que ces moyens sont irrecevables en l'absence de critique du jugement attaqué ;
- les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 19 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 janvier 2020 à midi.
Un mémoire présenté pour M. A... a été enregistré le 15 juin 2020, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2006-1391 du 17 novembre 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... G...,
- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., brigadier de la police municipale de la commune du Tampon, a, par un courrier en date du 17 mai 2016, sollicité sa promotion au grade de brigadier-chef principal de police municipale. Par une décision implicite, puis par une décision du 1er août 2016, le maire du Tampon a rejeté sa demande. M. A... relève appel du jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux décisions et à ce qu'il soit enjoint au maire du Tampon de le promouvoir à ce grade.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Dans ses requêtes n° 1600937 et 1600972, enregistrées respectivement au greffe du tribunal administratif de La Réunion les 15 et 29 août 2016, M. A... a invoqué le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, à l'appui duquel il a allégué qu'en refusant de le promouvoir, le maire du Tampon n'aurait pas exécuté la délibération du 28 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal du Tampon a créé notamment cinq postes de brigadier-chef principal de police municipale. La commune du Tampon soutient que le tribunal administratif aurait répondu à ce moyen au point 5 de son jugement, où il est indiqué que " la commune du Tampon n'était pas tenue (...) de pourvoir aux cinq postes créés par la délibération du conseil municipal du 28 novembre 2015 ". Toutefois, ce faisant, le tribunal administratif a répondu au moyen " tiré de ce que M. A... aurait bénéficié d'un droit à être nommé dès lors qu'il était inscrit en 5ème position au tableau d'avancement pour l'année 2015 " et non à celui tiré de la méconnaissance de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, article qui n'est ni cité ni visé dans les motifs du jugement. Dès lors, le tribunal administratif de La Réunion doit être regardé comme ayant omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, qui n'était pas inopérant. Son jugement est dès lors entaché d'une omission à statuer sur un moyen. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité invoqué, ledit jugement doit être annulé.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. A... devant le tribunal administratif de La Réunion.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. En premier lieu, M. A... fait valoir que la commission administrative paritaire " semble ne pas avoir été en mesure de comparer ses mérites " avec ceux des autres agents figurant sur le tableau d'avancement. Ce faisant, et alors qu'il n'a invoqué, devant les premiers juges, aucun moyen ayant trait à la légalité externe des décisions en litige, il doit être regardé comme soulevant un vice de procédure dont seraient entachées ces décisions. Toutefois, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, un tel moyen, qui n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé, doit, en tout état de cause, être écarté au fond.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal (...) ".
6. L'autorité compétente pour accorder un avancement au choix n'est pas tenue de prononcer toutes les promotions que l'existence de vacances peut lui permettre d'accorder. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal du Tampon a, par une délibération du 28 novembre 2015, créé notamment cinq postes de brigadier-chef de police municipale. Toutefois, contrairement à ce soutient M. A..., l'exécution de cette délibération n'implique pas de pourvoir l'ensemble des postes ainsi créés. Dès lors, la circonstance que le maire du Tampon a décidé, comme il en avait la faculté, de ne pas pourvoir l'ensemble des cinq postes de brigadier-chef de police municipale créés, ne saurait révéler une inexécution de la délibération du 28 novembre 2015. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales ne peut être accueilli.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation ou identité sexuelle, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race (...) ".
8. Il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
9. M. A... soutient que les refus d'avancement opposés par le maire du Tampon sont fondés sur une discrimination liée à son engagement syndical. Néanmoins, il n'a soumis au juge aucun élément de nature à faire présumer l'existence d'une telle discrimination. Par suite, le moyen doit être écarté.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 10 du décret du 17 novembre 2006 relatif au cadre d'emploi des agents de police municipale : " Peuvent être nommés au grade de brigadier-chef principal au choix, par voie d'inscription sur un tableau annuel d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire, en application du 1° de l'article 79 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, les brigadiers de police municipale comptant au moins deux ans de services effectifs dans leur grade. ". En outre, il résulte de l'article 79 de la loi du 26 janvier 1984 que : " L'avancement de grade a lieu (...)1° Soit au choix par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents (...) ".
11. Il ressort de la motivation de la décision du 1er août 2016 que le refus d'avancement opposé à M. A... se fonde sur la circonstance que le maire du Tampon a décidé de promouvoir deux agents et qu'il a par conséquent retenu les deux premiers inscrits sur le tableau d'avancement, M. A... étant classé en cinquième position. Il ressort des pièces du dossier que les deux agents promus ont, pour le premier, une note supérieure à celle de M. A... et, pour le second, la même note que celui-ci, ces notes étant dans chaque cas assorties d'une appréciation littérale positive. Eu égard à la similitude de leur valeur professionnelle, la seule circonstance que ce second agent ait bénéficié d'une ancienneté dans le grade inférieure de près de neuf mois à celle de M. A... ne suffit pas à révéler l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation et ce d'autant que le classement se fonde sur l'appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle et que le second agent inscrit sur le tableau d'avancement, recruté par la commune du Tampon en 1996, bénéficiait d'une expérience acquise au sein de celle-ci significativement plus importante que celle de M. A..., recruté en 2013. Dès lors, le refus d'avancement n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
12. En cinquième lieu, M. A... soutient que les refus en litiges sont en réalité motivés par l'attitude de la commune à son égard dès lors qu'il a dû former de multiples recours pour faire rectifier notamment son dossier, son échelon, le taux de son indemnité spéciale et sa notation. Toutefois, eu égard au motif des refus, exposé au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que les refus d'avancement se fondent sur un autre élément que le classement du tableau d'avancement et procèderaient d'une méconnaissance de la règle de l'égalité de traitement entre membres d'un même corps ou d'un détournement de pouvoir.
13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation, que M. A... n'est pas fondé à solliciter l'annulation de la décision implicite et de la décision du 1er août 2016 par lesquelles le maire du Tampon a refusé de le promouvoir au grade de brigadier-chef principal de police municipale. Par voie de conséquences, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune du Tampon présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°1600937, 1600972 du 7 juin 2018 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... et à la commune du Tampon.
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme C... B..., présidente-assesseure,
Mme D... G..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 novembre 2020
Le rapporteur,
Sylvie G...
Le président,
Dominique Naves
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au préfet de La Réunion, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 18BX03439