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19/11/2020 | FRANCE | N°18BX04323

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 19 novembre 2020, 18BX04323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1600634, 1601092 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a réduit du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts la base d'imposition de M. et Mme A... aux cont

ributions sociales au titre des années 2009 et 2010, leur a accordé la décharge de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1600634, 1601092 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a réduit du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts la base d'imposition de M. et Mme A... aux contributions sociales au titre des années 2009 et 2010, leur a accordé la décharge des impositions correspondant à cette réduction et a rejeté le surplus de leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 décembre 2018 et le 15 juillet 2019, M. et Mme A..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 16 octobre 2018 en ce qu'il ne leur a pas accordé une réduction, en sus de celle obtenue, de 29 587 euros ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- 1'administration aurait dû leur adresser un avis de mise en recouvrement conformément à l'article 55 de la loi de finances rectificative pour 2010 (n° 2010-1658 du

29 décembre 2010), et non des rôles supplémentaires ;

- l'émission et l'envoi des avis d'impositions supplémentaires ne peut tenir lieu de notification régulière des articles du rôle individuel correspondant ; il incombe à l'administration d'établir que les décisions portant homologation et fixant les dates de mise en recouvrement des impositions ont été prises conformément aux dispositions des articles 1658 et 1659 du code général des impôts ;

- à supposer que la majoration de 1,25% prévue au 2° de l'article 158-7 du code général des impôts ait été applicable aux revenus en cause, aucune motivation suffisamment explicite n'est faite dans la proposition de rectification n° 2120 du 20 décembre 2012 ; l'absence ou l'insuffisance de motivation spécifique de l'application de la majoration de 1,25% constitue une irrégularité sanctionnée par la nullité de l'intégralité des rectifications proposées ;

- les sommes imposées comme revenus de capitaux mobiliers portant sur les dépenses d'aménagement et agencement de l'appartement de Capbreton, ne constituent pas des revenus distribués imposables aux motifs que :

- les sommes ont été inscrites au crédit du compte courant de M. A... dans la SCI car il a dû faire 1'avance du montant des travaux ;

-le bien immobilier a fait l'objet d'une utilisation professionnelle à hauteur de 92 % ainsi qu'en atteste la liste nominative des clients appelés à être reçus au cabinet secondaire de Capbreton ; les travaux immobiliers engagés par la société PMG dans le cadre du bail professionnel conclu avec la société Racine Investissement n'ont pas bénéficié à M. A... ; les dépenses d'aménagement s'y rapportant se rattachent à l'exercice des activités de la société et de son dirigeant ;

- les écritures comptables concernant ces travaux ont été spontanément régularisées entre les sociétés PMG et Racine Investissement ;

- s'agissant de dépenses qui n'ont pas été comptabilisées en charge, mais en immobilisations, elles n'ont pas affecté le résultat de la société et ne tombent pas sous le coup du 1° du I de l'article 109 du code général des impôts et ne sauraient être considérées comme des revenus distribués ; l'administration a appliqué une base légale erronée car il n'y aurait eu aucun désinvestissement ;

- en tant qu'accessoire de l'imposition principale, les intérêts de retard seront déchargés en conséquence de la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 13 juin et le 9 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... F...,

- les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière PMG, dont M. A... est associé majoritaire et gérant, exerce une activité de gestion de biens immobiliers, de conseil et d'assistance. La vérification de comptabilité ayant notamment révélé que la société avait engagé des frais d'aménagement pour un appartement à Capbreton (Landes), dont l'utilisation professionnelle n'avait pas été établie, le service a considéré que M. et Mme A... avaient bénéficié de revenus réputés distribués et, par proposition de rectification du 20 décembre 2012, a porté à leur connaissance son intention de rectifier leurs revenus imposables, au titre des années 2009 et 2010, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 16 octobre 2018 en ce que le tribunal administratif de Toulouse ne leur a pas accordé une réduction, en sus de celle obtenue, de 29 587 euros.

Sur la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 20 décembre 2012, adressée à M. et Mme A..., après avoir détaillé le montant des revenus réputés distribués et les raisons conduisant à imposer ces sommes dans cette catégorie, présentait en page 7 un tableau récapitulatif des rehaussements, mentionnant en page 8 que le montant total des rehaussements de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers est majoré de 1,25 % et mentionnant précisément l'article qui prévoit cette majoration de 25 %. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration a procédé à une motivation insuffisante de la majoration de 1,25% prévue par l'article 158-7 du code général des impôts au regard des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales : " Un avis d'imposition est adressé sous pli fermé à tout contribuable inscrit au rôle des impôts directs (...) dans les conditions prévues aux articles 1658 à 1659 A (du code général des impôts) (...) L'avis d'imposition mentionne le total par nature d'impôt des sommes à acquitter, les conditions d'exigibilité, la date de mise en recouvrement et la date limite de paiement. ". Aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 55 de la loi

n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 applicable à partir du 1er janvier 2011 : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet ou d'avis de mise en recouvrement. (...) ". Aux termes de l'article 1659 du même code : " La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658 en accord avec le directeur départemental des finances publiques. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables. (...) ".

5. D'une part, il résulte de l'instruction que les rôles relatifs aux impositions litigieuses ont été homologués le 10 septembre 2015, antérieurement à la mise en recouvrement des impositions litigieuses. Il suit de là que le moyen tiré du défaut d'homologation du rôle doit être écarté.

6. D'autre part, si les appelants soutiennent que les avis d'imposition ne peuvent tenir lieu de notification régulière de l'article du rôle individuel, et qu'en l'absence d'une telle notification, les impositions contestées ne seraient pas exigibles en tout état de cause, ce moyen, qui a trait à l'exigibilité de l'impôt et donc à son recouvrement, ne peut être utilement soulevé devant le juge de l'assiette de l'impôt.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) /2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ". Ces dispositions font obligation à l'administration fiscale, lorsqu'elle estime devoir imposer un associé qui, comme en l'espèce, n'a pas accepté le redressement de son imposition à l'impôt sur le revenu, d'apporter la preuve de l'appréhension par l'intéressé des sommes qu'elle a regardées comme distribuées par la société, ainsi que de l'existence et du montant des distributions. Toutefois, cette preuve peut être regardée comme apportée par l'administration, lorsque, celle-ci ayant précisé les motifs permettant de présumer que les dépenses regardées comme des distributions ne présentaient pas un caractère professionnel, le contribuable n'est pas en mesure d'apporter des éléments contraires de nature à justifier que ces frais ont été exposés dans l'intérêt de la société.

8. Pour justifier les impositions en litige qui découlent de l'inscription des montants des dépenses d'aménagement de l'appartement à Capbreton au crédit du compte courant d'associé de M. A..., l'administration a relevé que les dépenses d'aménagement en cause, notamment l'achat d'une cuisine équipée, de meubles, tapis, luminaires, miroirs, accessoires de salle de bain, téléviseur LCD ou cave à vins, de par leur nature même, se rapportaient à un usage privé du bien. Elle a estimé que cet appartement, dont M. A... déclare qu'il l'utilisait à des fins personnelles un mois par an, ne concourait pas à l'exploitation de la SCI PMG. En se bornant à produire comme en première instance les attestations très générales et postérieures au contrôle, de deux clients de la société BGH Expertise Comptable, liée à la SCI PMG par une convention d'assistance, qui attestent avoir rencontré M. A... à Capbreton pour leur activité professionnelle, et une liste de clients en relation avec la société BGH, M. et Mme A... n'établissent pas que ces dépenses ont concouru à la réalisation de l'objet social de la SCI PMG. Il s'ensuit que, quand bien même la SCI PMG aurait entendu rembourser les dépenses qu'elle a initialement immobilisées à son actif, les sommes inscrites au compte courant d'associé de M. A..., qui n'établit pas qu'il n'a pu avoir la disposition des sommes en litige ou qu'elles ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu, constituent un avantage pour celui-ci.

9. En second lieu, ainsi que l'ont indiqué les premiers juges, si les appelants invoquent l'absence de désinvestissement, l'existence d'un désinvestissement est une condition de l'imposition de distributions lorsque l'administration fait application du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts, et non, comme en l'espèce, lorsqu'elle fait application du 2° de l'article 109-1 de ce code.

Sur les pénalités :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la demande tendant à la décharge des intérêts de retard en tant qu'accessoire de ces impositions doit être rejetée.

11. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Pour établir la mauvaise foi du contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

12. En l'occurrence, eu égard à ce qui a été dit précédemment et au caractère particulièrement répété des dépenses à caractère personnel que M. A... a fait prendre en charge à la société dont il était le gérant, c'est à bon droit que l'administration a considéré que celui-ci, en outre expert-comptable, avait délibérément dissimulé la distribution, à son profit, des sommes correspondantes et lui a appliqué, pour ce motif, les pénalités mentionnées à l'article 1729 précité du code général des impôts.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes limitées en appel aux impositions qui découlent de l'inscription des montants des dépenses d'aménagement de l'appartement à Capbreton au crédit du compte courant d'associé de M. A.... Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme G... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme C... E..., présidente de la cour,

Mme H..., présidente-assesseure,

Mme D... F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

Le rapporteur,

Florence F...

La présidente de la cour,

Brigitte E...

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 18BX04323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX04323
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : LACOMBE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-19;18bx04323 ?
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