La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/2020 | FRANCE | N°18BX02864

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 02 novembre 2020, 18BX02864


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 13 juillet 2017 par laquelle le président du conseil départemental de la Haute-Garonne a refusé de reconnaître un caractère professionnel à sa pathologie.

Par un jugement n° 1704270 du 1er juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 19 juillet 2018 et 8 juillet 2019, M. E

..., représenté par la SCP Cabinet Darribère, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 13 juillet 2017 par laquelle le président du conseil départemental de la Haute-Garonne a refusé de reconnaître un caractère professionnel à sa pathologie.

Par un jugement n° 1704270 du 1er juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 19 juillet 2018 et 8 juillet 2019, M. E..., représenté par la SCP Cabinet Darribère, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision du 13 juillet 2017 par laquelle le président du Conseil départemental de la Haute-Garonne a refusé de reconnaître sa maladie comme imputable au service ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Haute-Garonne de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie dont il souffre dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du Conseil départemental de la Haute-Garonne la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation car sa pathologie trouve son origine dans les conditions de travail au sein de son service, dans un événement subi en service le 16 novembre 2012 et dans le refus de sa hiérarchie de le réintégrer sur un poste adapté à sa situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 octobre 2018, le conseil départemental de la Haute-Garonne, représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par M. E... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juillet 2019 à 12:00.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... G...,

- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... a été recruté le 1er février 2007 par le conseil départemental de la Haute-Garonne afin d'exercer les fonctions d'agent d'exploitation au sein du service de la voirie et des infrastructures. Par un courrier du 17 avril 2016, il a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service du syndrome dépressif dont il souffre. Le président du conseil départemental de la Haute-Garonne a rejeté cette demande par une décision du 13 juillet 2017. M. E... relève appel du jugement du 1er juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la légalité de la décision du 13 juillet 2017 :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. M. E... soutient que les conditions de travail au sein de son service ont commencé de le fragiliser au plan psychologique dans le courant de l'année 2009, que l'altercation avec un de ses collègues qui s'est produite le 16 novembre 2012, pour laquelle la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois a été prononcée à son encontre, a contribué à aggraver ses troubles psychologiques, lesquels ont encore été accentués par le refus du conseil départemental de le réintégrer dans un poste adapté à ses difficultés.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. E..., recruté le 1er février 2007 en qualité d'agent d'exploitation au sein du service de la voirie et des infrastructures, a, au début de l'année 2009, été affecté à la remise à niveau des arrêts de bus, abords et signalisation, dans le cadre d'une activité qu'il exerçait seul, compte tenu des difficultés relationnelles qu'il rencontrait au sein de son équipe. Il a fait l'objet, le 9 septembre 2009, d'un arrêt de travail de sept jours justifié par une " souffrance au travail - état nerveux ", prolongé jusqu'au 23 octobre 2009. S'agissant de sa notation pour l'année 2009, son supérieur hiérarchique direct a simplement indiqué " agent moyen " dans son évaluation en date du 8 septembre 2009, le chef de service ayant quant lui précisé : " agent qui est incité à améliorer son comportement au sein de l'équipe de Castanet, aussi bien dans le travail que dans ses relations quotidiennes avec le groupe ". En raison des difficultés relationnelles persistantes rencontrées dans son travail, il a été affecté, au début de l'année 2011, au pôle aménagement, sur une mission de patrouille et d'exploitation de la piste du canal du midi. Un problème de santé ayant fait obstacle à ce qu'il continue de patrouiller le long des berges à bicyclette, il a par la suite été affecté au centre d'exploitation de Villefranche. Les difficultés d'intégration rencontrées par l'intéressé ont perduré et celui-ci a eu, le 16 novembre 2012, une altercation violente avec l'un de ses collègues, à la suite de laquelle les agents du service, ainsi que les différents chefs de centres du secteur, ont informé le chef de service de leur volonté de ne plus travailler avec lui. A la suite de cet évènement, M. E... a été sanctionné d'une exclusion temporaire de trois mois, confirmée par un jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 mars 2017, devenu définitif. Dès le 16 novembre 2012, M. E... a été placé en congé de maladie ordinaire par son médecin traitant, puis en congé de longue maladie et enfin, en congé de longue durée. A la date de la décision en litige, il n'avait pas repris le travail.

6. Si les évènements relatés au point précédents témoignent indéniablement des difficultés rencontrées par M. E... dans son environnement professionnel, ils ne permettent en revanche pas d'établir que ces difficultés, et le syndrome dépressif que présente l'intéressé, présenteraient un lien direct avec les fonctions qu'il a exercées au cours des années 2009 à 2012 ou avec des conditions de travail qui auraient été par elles-mêmes de nature à susciter le développement d'un tel syndrome. A cet égard, il ne ressort pas des pièces du dossier que la sanction infligée à l'intéressée à la suite de l'altercation qu'il a eue avec l'un de ses collègues le 16 décembre 2012 aurait été injustifiée. Par ailleurs, le docteur Trapé, médecin psychiatre qui a examiné M. E... le 19 décembre 2012, observe que celui-ci présente des difficultés relationnelles, en lien avec un " caractère qui lui est propre ", décrit comme psychorigide, irritable, avec une probable difficulté à contrôler ses pulsions. Les docteurs Sarramon Bacquié et Beyney, psychiatres également, qui ont examiné l'intéressé respectivement les 5 juillet 2016 et 7 décembre 2016, à la demande du comité médical de Haute-Garonne pour la première, et de la commission de réforme pour le second, évoquent des " productions mentales interprétatives ", confirmées par le psychiatre qui suit M. E... depuis l'année 2013, et " une personnalité vulnérable de type probablement sensitif qui a décompensé en novembre 2012 sur un mode dépressif à caractère psychotique ". Ces deux psychiatres concluent à l'absence d'imputabilité au service de la pathologie dont souffre le requérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le président du conseil départemental de la Haute-Garonne, en rejetant la demande de M. E... tendant à ce que le syndrome dépressif dont il souffre soit reconnu comme imputable au service, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation la décision du 13 juillet 2017 par laquelle le président du conseil départemental de la Haute-Garonne a refusé de reconnaître un caractère professionnel à sa pathologie. Il en résulte que ses conclusions à fin d'injonction, et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent être accueillies.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il convient également de rejeter les conclusions présentées par le conseil départemental de la Haute-Garonne sur le fondement de ces dernières dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil départemental de la Haute-Garonne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au conseil départemental de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme C... B..., présidente-assesseure,

Mme D... G..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 novembre 2020.

Le rapporteur,

Sylvie G...

Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX02864


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02864
Date de la décision : 02/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SCP JEAN-PIERRE HENRY, EDOUARD CHICHET, CELINE HENRY ET EMMANUELLE PAILLES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-02;18bx02864 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award