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01/10/2020 | FRANCE | N°20BX02264

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (juge unique), 01 octobre 2020, 20BX02264


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1900881 du 10 mars 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'

arrêté préfectoral du 8 juillet 2019 et a enjoint au préfet de délivrer à M. D... un ti...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1900881 du 10 mars 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'arrêté préfectoral du 8 juillet 2019 et a enjoint au préfet de délivrer à M. D... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2020, le préfet de la Guadeloupe demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 8 juillet 2020 et d'annuler ce jugement.

Il soutient que :

- eu égard aux prolongations de délais prévues par l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, sa requête est recevable ;

- il sollicite le sursis à exécution du jugement en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ; en effet, le jugement expose l'administration à la perte d'une somme qu'elle ne doit pas et l'oblige à délivrer un titre de séjour à M. D... qui ne remplit pas les conditions pour en bénéficier ;

- les moyens développés à l'appui de sa requête d'appel présentent un caractère sérieux et sont de nature à justifier, outre l'annulation du jugement, le rejet des conclusions accueillies et les conditions posées par l'article R. 811-15 sont donc remplies ;

- en effet, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale de l'intéressé se reconstitue en Haïti d'où il est originaire ainsi que son épouse, également en situation irrégulière ; il n'a pas été porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'arrêté ne méconnait ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article L. 511-4 du même code ; l'intéressé est entré clandestinement en France en 2000 en enfreignant les règles prévues par l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'établit pas la continuité et la stabilité de sa présence en France depuis 2000 ; il a vécu dans son pays d'origine une trentaine d'années ; si ses enfants sont scolarisés en France, les conditions de la " circulaire Valls " ne sont pas remplies et en tout état de cause, elles sont inopposables à l'administration ;

- l'arrêté ne porte pas atteinte à l'intérêt des enfants de l'intéressé ; celui-ci n'établit pas contribuer à leur entretien et à leur éducation et, en tout état de cause, l'arrêté n'a pas pour effet de le séparer de ses enfants ;

- M. D... ne remplit pas les conditions posées par l'article R. 5221-20 du code du travail pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité de salarié ni les conditions pour obtenir un titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il travaille sans autorisation de travail, en toute illégalité ; la DIECCTE a émis un avis défavorable sur son dossier au motif qu'il ne justifie que d'une expérience professionnelle de trois mois, que son emploi n'est pas suffisamment précisé, de sorte qu'il n'est pas possible de vérifier l'adéquation du poste à ses diplômes ou à son expérience, qu'il ne justifie pas de la durée de son séjour en France et que son employeur ne lui fournit que quatre heures de travail par mois, ce qui ne suffit pas pour lui permettre de bénéficier d'une rémunération suffisante ; sur ce plan également, il ne justifie pas remplir les conditions de la " circulaire Valls " qui est, de toute façon, inopposable à l'administration ;

- il n'a pas été porté une appréciation manifestement erronée sur la situation de M. D....

Par un mémoire enregistré le 16 septembre 2020, M. D..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête du préfet aux fins de sursis à exécution.

Il soutient que le préfet ne fait état d'aucune circonstance permettant de considérer que l'exécution du jugement risquerait d'entraîner des conséquences difficilement réparables ; il n'apparaît pas que l'Etat serait exposé à la perte définitive de la somme de 1 000 euros qui a été mise à sa charge au titre des frais de l'instance.

Vu :

- la requête au fond enregistrée sous le n° 20BX02265 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... B... a été entendu au cours de l'audience publique à laquelle les parties n'étaient ni présentes ni représentées.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ".

2. M. D..., ressortissant haïtien né en 1975, est entré irrégulièrement en France, en Guadeloupe, en 2000. Il y a épousé en 2012 une compatriote avec laquelle il a eu deux enfants, nés aux Abymes en 2013 et 2015. Le 13 mai 2013, il a demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qui lui a été refusée par arrêté du 14 juin 2013 du préfet de la Guadeloupe, lequel arrêté lui faisait également obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. Par jugement du 15 juillet 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté le recours de M. D... contre cet arrêté. L'arrêté du 14 juin 2013 n'a pas été exécuté et M. D... a présenté une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " le 29 août 2018. Par arrêté du 8 juillet 2019, le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par jugement du 10 mars 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'arrêté préfectoral du 8 juillet 2019 et a enjoint au préfet de délivrer à M. D... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le préfet de la Guadeloupe fait appel de ce jugement dont il demande l'annulation et présente des conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution.

3. Les conclusions d'appel au fond du préfet de la Guadeloupe ont été enregistrées sous une requête distincte. Dès lors, dans la présente instance, il n'y a lieu de statuer que sur les conclusions du préfet tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement.

4. Les moyens invoqués par le préfet de la Guadeloupe, tirés de ce qu'il n'a pas été porté une atteinte excessive au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de ce que l'arrêté ne méconnait ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article L. 511-4 du même code, de ce que les conditions de la " circulaire Valls " ne sont pas remplies et en tout état de cause, sont inopposables à l'administration, de ce que l'arrêté ne porte pas atteinte à l'intérêt des enfants de l'intéressé, de ce que M. D... ne remplit pas les conditions posées par l'article R. 5221-20 du code du travail pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité de salarié ni les conditions pour obtenir un titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce qu'il n'a pas été porté une appréciation manifestement erronée sur la situation de M. D..., paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. Par suite, le préfet est fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 10 mars 2020.

DECIDE :

Article 1er : Il est sursis à l'exécution du jugement n° 1900881 du 10 mars 2020 du tribunal administratif de la Guadeloupe jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur la requête n° 20BX02265.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... D.... Une copie en sera adressée pour information au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2020 à laquelle siégeait Mme E... B..., président de chambre.

Lu en audience publique le 1er octobre 2020

Le président de la 5ème chambre

Elisabeth B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (juge unique)
Numéro d'arrêt : 20BX02264
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-06 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Avocat(s) : CABINET DJIMI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-01;20bx02264 ?
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