Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée Haussmann promotion a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler, d'une part, la décision du 4 novembre 2015 par laquelle le maire de Saint-Pierre-du-Mont a rejeté sa demande d'abrogation de l'arrêté conjoint du préfet des Landes, du président du conseil général des Landes et du maire de Saint-Pierre-du-Mont en date du 30 avril 2014, ordonnant la fermeture des accès directs à l'avenue Dominique Lasserre depuis la route départementale 932 E et au chemin de Sailhès depuis un giratoire et créant un itinéraire de substitution par l'impasse du Bosquet, d'autre part, les décisions implicites par lesquelles le président du conseil général des Landes et le préfet des Landes ont rejeté ses demandes d'abrogation de cet arrêté conjoint, et d'enjoindre à ces autorités d'abroger cet arrêté.
Par un jugement n° 1600009, n° 1602155 et n° 1602156 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 et 14 mars 2018, 26 juin 2019, 17 et 25 juillet 2019 et 3 octobre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Haussmann promotion, représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 28 décembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 4 novembre 2015 du maire de Saint-Pierre-du-Mont et les décisions implicites de rejet de ses demandes d'abrogation de l'arrêté du 30 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre au maire de Saint-Pierre-du-Mont, au préfet des Landes et au président du conseil général des Landes d'abroger l'arrêté litigieux du 30 avril 2014 ;
4°) d'ordonner avant-dire droit, une expertise sur les conditions d'accès existantes et les solutions alternatives ;
5°) de mettre à la charge du maire de Saint-Pierre-du-Mont, du préfet des Landes et du président du conseil général des Landes une somme de 6 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête d'appel déposée le 9 mars 2018 est recevable ;
- les décisions de rejet de sa demande d'abrogation de l'arrêté du 30 avril 2014 sont irrégulières dès lors qu'aucune décision conjointe de rejet n'a été prise alors que l'arrêté dont l'abrogation était demandée avait été pris conjointement par le président du conseil général, le préfet des Landes et le maire de Saint-Pierre-du-Mont ; et, seul ce dernier a explicitement rejeté sa demande d'abrogation de l'arrêté du 30 avril 2014 ;
- l'arrêté du 30 avril 2014 est aujourd'hui injustifié dès lors que la rocade de Mont-de-Marsan prévue à quatre voies a été abandonnée ;
- l'arrêté litigieux ne vise pas un but d'intérêt général mais poursuit un intérêt privé propre à un centre commercial ; il a pour but déterminant de permettre le développement de la zone commerciale du Grand Moun et non d'assurer la sécurité des personnes ;
- en poursuivant un intérêt privé de développement d'une zone commerciale, l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir ;
- l'itinéraire de substitution retenu compromet la sécurité des habitants du lotissement voisin de l'axe routier dès lors que l'impasse du Bosquet est inadaptée à la circulation des poids-lourds et aux accès pompiers et que de nombreux véhicules emprunteront ce lotissement les week-ends ainsi que le démontre l'étude qu'elle a fait réaliser ;
- les mesures disproportionnées de fermeture de l'accès prononcées ne peuvent, compte tenu du caractère insuffisant des mesures compensatoires mises en place, être regardées comme appropriées aux buts recherchés ;
- la fermeture de l'accès direct à la zone commerciale du Lubet a un impact sur son activité économique lui causant un préjudice financier qui justifiera une action judiciaire en réparation.
Par des mémoires, enregistrés les 11 juin 2018, 12 juillet 2019 et 30 août 2019, la commune de Saint-Pierre-du-Mont, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de la société Haussmann promotion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable faute de comporter des moyens d'appel et qu'elle est également tardive ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la société Haussmann promotion ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 29 juin 2018, le ministre de l'intérieur informe la cour qu'il n'est pas compétent pour représenter l'État dans cette affaire.
Par un mémoire enregistré le 13 juin 2019, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Haussmann promotion ne sont pas fondés.
Par des mémoires, enregistrés les 30 juillet et 30 août 2019, le département des Landes, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société Haussmann promotion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Haussmann promotion ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 7 octobre 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... F...,
- les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public,
- et les observations de Me G..., représentant la SAS Haussmann Promotion, et de Me B..., représentant le département des Landes.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté conjoint du 30 avril 2014, le préfet des Landes, le président du conseil général du même département et le maire de la commune de Saint-Pierre-du-Mont ont ordonné la fermeture de l'accès au chemin de Sailhès depuis le giratoire RD 932E/RD824/RD 624, dit carrefour de Grenade, et créé un itinéraire de substitution par l'impasse du Bosquet sur la route de Grenade-sur-Adour (RD 824). La SAS Haussmann promotion, propriétaire de locaux commerciaux sur la zone du Lubet qui étaient desservis, depuis ce giratoire, par le chemin de Sailhès, a demandé, le 2 octobre 2015, au préfet des Landes, au président du conseil général du même département et au maire de la commune de Saint-Pierre-du-Mont d'abroger cet arrêté du 30 avril 2014. Elle relève appel du jugement du 28 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 4 novembre 2015 du maire de Saint-Pierre-du-Mont et des refus implicites qui lui ont été opposés par le département et le préfet des Landes.
Sur le bien-fondé du jugement:
2. En premier lieu, la société appelante reprend en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux ni de critiques utiles du jugement, le moyen tiré de ce que la décision de rejet expresse en date du 4 novembre 2015 de sa demande d'abrogation de l'arrêté conjoint du 30 avril 2014 signé par le seul maire de la commune de Saint-Pierre-du-Mont aurait été prise par une autorité incompétente car elle aurait dû être également signée par le préfet des Landes et le président du conseil général du même département. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'État dans le département sur les routes à grande circulation (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) ". Selon l'article L. 2213-2 de ce code : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules ; 2° Réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains ". Aux termes de l'article L. 151-4 du code de la voirie routière : " L'aménagement de points d'accès nouveaux sur une route express en service et la suppression de points d'accès existants sont décidés ou autorisés par l'État, après enquête publique et, s'il y a lieu, après déclaration d'utilité publique, dans les conditions fixées par voie réglementaire ". Et aux termes de l'article L. 411-1 du code de la route : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'État dans le département sur les routes à grande circulation ". Enfin, aux termes de l'article L. 3221-4 du code général des collectivités territoriales : " Le président du conseil départemental gère le domaine du département. À ce titre, il exerce les pouvoirs de police afférents à cette gestion, notamment en ce qui concerne la circulation sur ce domaine, sous réserve des attributions dévolues aux maires par le présent code et au représentant de l'État dans le département ainsi que du pouvoir de substitution du représentant de l'État dans le département prévu à l'article L. 3221-5 ".
4. En appliquant ces dispositions, les autorités de police doivent veiller à ce que les restrictions apportées à la liberté de circulation ne présentent pas un caractère excessif par rapport aux buts en vue desquelles elles ont été prises.
5. Le préfet et le président du conseil général des Landes ainsi que le maire de la commune, ont, dans le cadre de la création d'un nouveau centre commercial " Grand Moun " et compte-tenu des aménagements nécessaires à l'extension de cette zone commerciale, décidé de fermer des accès considérés comme dangereux. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de deux études de trafic réalisées en 2008 et en 2010, que le giratoire de Grenade, situé, sur le territoire de la commune de Saint-Pierre-du-Mont, à l'intersection de la rocade de Mont-de-Marsan et de l'avenue JF Kennedy, est, du fait de son emplacement, amené à supporter un important trafic de transit et de desserte, de sorte que la circulation y est saturée aux heures de pointe. Il ressort aussi de ces études que l'agrandissement, alors en projet, de la zone commerciale située aux abords de ce giratoire et face à la zone d'activités accueillant les locaux commerciaux de la société appelante, projet qui s'est matérialisé par l'ouverture du centre commercial " Grand Moun " au printemps 2014, était susceptible d'accroître encore les difficultés de circulation routière constatées à ce carrefour et que la saturation de la circulation à certaines heures de la journée mettait en péril la sécurité des usagers de la voie. Dans ces conditions et contrairement à ce qui est soutenu par la société appelante, la mesure, contenue dans l'arrêté du 30 avril 2014, consistant à supprimer l'une des branches de ce giratoire en fermant son accès direct au chemin de Sailhès, répondait, eu égard à la dangerosité en sortie de cette branche du giratoire, à un impératif de sécurité. Cette mesure s'inscrivait en outre dans un projet global d'aménagement de la zone, visant notamment à désengorger le carrefour en cause en diffusant sur différents points d'accès les mouvements générés par la création du centre commercial " Grand Moun " sur lequel débouche le chemin de Sailhès. Par ailleurs, si la société, propriétaire de locaux commerciaux fait valoir que ces locaux sont desservis quotidiennement par un accès direct au giratoire pour leur approvisionnement, notamment par des semi-remorques, et que la prescription d'un élargissement dudit carrefour était suffisante, toutefois, il ressort également des pièces du dossier que la fermeture de l'accès, depuis le giratoire de Grenade, au chemin de Sailhès, a été compensée par l'ouverture à la circulation de l'impasse du Bosquet, accessible depuis l'avenue JF Kennedy. Cette voie de substitution d'environ 300 mètres qui permet de relier les locaux commerciaux dont la société appelante est propriétaire, est dotée d'une chaussée en bon état et présente une largeur similaire à celle du chemin de Sailhès. De plus, il ressort des pièces du dossier que l'impasse du Bosquet est une voie en bon état, d'une emprise suffisante, permettant aux pompiers de circuler et aux véhicules de se croiser en toute sécurité et qui offre une bonne visibilité à son croisement (comprenant un stop) avec la RD 824. En outre, la société Haussmann promotion n'établit pas que l'intensité du trafic poids-lourds desservant les locaux professionnels concernés serait incompatible avec l'utilisation par les véhicules particuliers de cette voie en impasse et l'étude que la société appelante a fait réaliser ne permet pas davantage d'établir que les poids-lourds ne pourraient utiliser cette voie pour desservir les commerces. Dans ces conditions, les mesures contenues dans l'arrêté du 30 avril 2014 étaient justifiées par un impératif de sécurité et proportionnées au but ainsi recherché. Par suite, la décision attaquée n'a pas porté à la liberté de circulation une atteinte excessive.
6. Compte tenu de ce qui a été dit, il ne ressort nullement des pièces du dossier que l'arrêté litigieux, qui s'inscrit dans une révision du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Pierre-du-Mont qui a fait l'objet d'une enquête publique quant au projet d'accompagnement du développement de la zone commerciale du " Grand Moun ", aurait eu pour but de nuire à l'activité commerciale de la société appelante. Le détournement de pouvoir allégué n'est dès lors pas établi.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, ni d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense par la commune de Saint-Pierre-du-Mont, que les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du 4 novembre 2015 du maire de Saint-Pierre-du-Mont et les décisions implicites du président du conseil départemental des Landes et du préfet des Landes de refus d'abroger l'arrêté conjoint du 30 avril 2014 doivent être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction de la requête doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de la société appelante la somme de 750 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Pierre-du-Mont et non compris dans les dépens ainsi que la même somme de 750 euros au titre des mêmes frais exposés par le département des Landes. En revanche, ces mêmes dispositions font obstacle aux conclusions de l'appelante dirigées contre l'État, le département des Landes et la commune de Saint-Pierre-du-Mont qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Haussmann promotion est rejetée.
Article 2 : La société Haussmann promotion versera à la commune de Saint-Pierre-du-Mont et au département des Landes la somme de 750 euros chacun au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Haussmann promotion, au ministre de la transition écologique, au département des Landes et à la commune de Saint-Pierre-du-Mont. Copie en sera adressée au préfet des Landes.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme H..., présidente-assesseure,
Mme D... F..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.
Le rapporteur,
Florence F...
Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°18BX01011