Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté du 22 juillet 2019 par lesquelles le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 1901047 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé ces décisions, a enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 juillet 2020, le préfet de la Guadeloupe demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- l'exécution de ce jugement risquerait d'exposer l'Etat à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où les conclusions d'appel seraient accueillies et d'entraîner des conséquences difficilement réparables au sens des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;
- en l'état de l'instruction il existe des moyens sérieux, au sens de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... ; en effet, il n'a pas été porté une atteinte grave à la vie privée et familiale de M. A... et sa situation ne lui ouvre pas droit au bénéfice de la protection de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2020, M. A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer le titre sollicité et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le préfet ne fait état d'aucune circonstance qui permettrait de considérer que l'exécution du jugement risquerait d'entraîner des conséquences difficilement réparables et que les moyens qu'il soulève ne paraissent pas sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation qu'il a présentées.
Vu :
- la requête enregistrée sous le n° 20BX02334 par laquelle le préfet de la Guadeloupe demande à la cour d'annuler le jugement du 9 juin 2020 du tribunal administratif de la Guadeloupe ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... B... a été entendu au cours de l'audience publique du 8 septembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... A..., ressortissant dominicain né en 1982, qui déclare être entré en France le 17 octobre 2012, a sollicité, le 20 septembre 2018, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 juillet 2019, le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans cet arrêté. Par un jugement du 9 juin 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé ces décisions, a enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le préfet de la région Guadeloupe demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :
2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ". En application de ces dispositions, lorsque le juge d'appel est saisi d'une demande de sursis à exécution d'un jugement prononçant l'annulation d'une décision administrative, il lui incombe de statuer au vu de l'argumentation développée devant lui par l'appelant et le défendeur et en tenant compte, le cas échéant, des moyens qu'il est tenu de soulever d'office. Après avoir analysé dans les visas ou les motifs de sa décision les moyens des parties, il peut se borner à relever qu'aucun de ces moyens n'est de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué et rejeter, pour ce motif, la demande de sursis. Si un moyen lui paraît, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, il lui appartient de vérifier si un des moyens soulevés devant lui ou un moyen relevé d'office est de nature, en l'état de l'instruction, à infirmer ou confirmer l'annulation de la décision administrative en litige, avant, selon le cas, de faire droit à la demande de sursis ou de la rejeter.
3. Aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, invoqué par le préfet : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ".
4. Pour annuler les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 22 juillet 2019, le tribunal a considéré que la décision portant refus de séjour portait au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle avait été prise.
5. Pour demander qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement le préfet de la Guadeloupe soutient de ce jugement risquerait d'exposer l'administration à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où les conclusions d'appel seraient accueillies ainsi qu'à la délivrance d'une carte de séjour temporaire. Il soutient également que, compte tenu de la situation de M. A..., il n'a pas été porté une atteinte grave à sa vie privée et familiale au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que sa situation ne lui ouvre pas droit au bénéfice de la protection de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, au regard des motifs retenus par le tribunal, aucun des moyens tels qu'ils sont ainsi invoqués par le préfet de la Guadeloupe n'apparaît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, ainsi que l'exigent les dispositions précitées de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, l'annulation ou la réformation du jugement attaqué.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner si l'autre condition posée par l'article R. 811-17 du code de justice administrative est remplie, que le préfet de la Guadeloupe n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé son arrêté du 22 juillet 2019. Par suite, sa requête doit être rejetée.
S'agissant des conclusions présentées par M. A... :
7. Il n'appartient pas au juge saisi d'une demande tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution d'un jugement de connaître des conclusions tendant à l'annulation d'une décision administrative. Par suite, les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe doivent être rejetées.
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", n'implique pas le prononcé d'une nouvelle injonction tendant aux mêmes fins.
Sur les frais liés au litige :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 800 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M. A....
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Guadeloupe est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. E... A....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Guadeloupe.
Lu en audience publique le 10 septembre 2020.
Le président de chambre,
Marianne B...Le greffier,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20BX02335