Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) Pyramide a demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1600740 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 mai 2018 et les 15 janvier et 18 juin 2019, la SCI Pyramide, représentée par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 6 mars 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012.
Elle soutient que :
- s'agissant des avances de trésorerie consenties à l'Eurl Espace promotion, elle a agi dans son intérêt propre en consentant de telles avances non rémunérées, dès lors que l'Eurl est associée de la SCI Pyramide, qu'elles ont le même gérant et que l'Eurl assure à la SCI, dans le cadre d'un contrat, des prestations de conseil et d'assistance administrative, ainsi que des prestations de sécurité des biens ;
- cette opération est, en outre, neutre fiscalement, les deux sociétés étant assujetties à l'impôt sur les sociétés ;
- s'agissant des dotations aux amortissements, elle les a comptabilisées dans les délais de dépôt des déclarations, ce que démontrent les pièces comptables produites.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 14 décembre 2018 et 11 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 30 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G...,
- les conclusions de M. B... C...,
- et les observations de Me A... D..., représentant la SCI Pyramide.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile immobilière (SCI) Pyramide, qui exerce une activité de location immobilière pour laquelle elle a opté pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et à l'impôt sur les sociétés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, à l'issue de laquelle le service a notamment réintégré aux bénéfices imposables de la société, selon la procédure de taxation d'office prévue au 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, les intérêts sur des avances de trésorerie au titre des exercices 2010 et 2011 et des dotations aux amortissements au titre des exercices 2010, 2011 et 2012. La SCI Pyramide relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 en conséquence des réintégrations précitées.
Sur les avances de trésoreries consenties à l'Eurl Espace promotion :
2. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.
3. Les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties.
4. Il résulte de l'instruction que lors de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SCI Pyramide, le service a constaté qu'elle avait comptabilisé des sommes mises à la disposition d'un de ses associés, l'Eurl Espace Promotion, au compte courant 45 5001 " CC Espace Promotion ", qui présentait un solde débiteur de 232 674,30 euros à la clôture de l'exercice 2010 et de 251 355,42 euros à la clôture de l'exercice 2011, et que ces sommes n'avaient pas été génératrices d'intérêts. Considérant que les avances ainsi consenties procédaient, en l'absence de contrepartie, d'un acte anormal de gestion, l'administration a réintégré dans les bénéfices imposables de la SCI Pyramide le montant des intérêts auxquels elle avait renoncé, soit 7 787 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et 7 726 euros au titre de l'exercice clos en 2011.
5. En se bornant à faire valoir que l'Eurl Espace Promotion est l'un de ses associés, qu'elles avaient, au titre de la période d'imposition litigieuse, le même gérant, M. E..., associé unique de l'Eurl, et que l'Eurl assure à la SCI des prestations de conseil et d'assistance administrative, ainsi que de sécurité des biens, la SCI Pyramide n'apporte pas la preuve de l'existence d'une contrepartie aux avances sans intérêts consenties à l'Eurl Espace promotion. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que, en accordant de telles avances, la SCI Pyramide a commis un acte anormal de gestion, sans que cette dernière puisse utilement se prévaloir de la circonstance que, l'Eurl étant également soumise à l'impôt sur les sociétés, l'opération serait neutre pour les recettes fiscales.
Sur les dotations aux amortissements :
6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment: (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise (...) ". Il résulte de ces dispositions que ne peuvent être déduits du bénéfice imposable que les amortissements qui ont été effectivement inscrits dans les écritures comptables à la clôture des exercices concernés. Il appartient au contribuable de justifier que cette inscription a été effectuée avant l'expiration du délai imparti pour souscrire la déclaration des résultats annuels de l'entreprise.
7. Il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 12 décembre 2013, que la SCI Pyramide n'a pas déposé dans les délais prescrits les déclarations de résultats des exercices clos les 31 décembre 2010, 31 décembre 2011 et 31 décembre 2012 et qu'elle a été mise en demeure de les déposer par lettre du 28 juin 2013, dont la société a accusé réception le 3 juillet suivant. Lors de la première intervention de la vérificatrice, le 21 octobre 2013, la SCI Pyramide n'a pas été en mesure de lui présenter de comptabilité pour 2011 et 2012, et un procès-verbal pour défaut de présentation de comptabilité au titre de ces exercices a été dressé le 6 novembre 2013, constatant le défaut de toute pièces comptables des exercices 2011 et 2012. La SCI a remis en cours de contrôle, le 30 octobre 2013, une comptabilité définitive, ainsi que la liasse fiscale à l'impôt sur les sociétés n° 2065 pour l'exercice clos en 2010, le 27 novembre 2013, une comptabilité provisoire sous forme de brouillard, accompagnée de la liasse fiscale à l'impôt sur les sociétés n° 2065 pour l'exercice clos en 2011, et, le 4 décembre 2013, une comptabilité provisoire sous forme de brouillard, accompagnée de la liasse fiscale à l'impôt sur les sociétés n° 2065 pour l'exercice clos en 2012. À l'issue de la vérification, le service a remis en cause la déduction des amortissements comptabilisés pour 343 686 euros au titre des trois exercices vérifiés, faute pour la société de justifier qu'ils ont été portés dans les écritures comptables avant l'expiration du délai de déclaration des résultats de ces exercices.
8. En se bornant à produite des extraits de ses écritures comptables dépourvus de date certaine, la SCI Pyramide ne justifie pas que ces inscriptions ont été effectuées avant l'expiration du délai imparti pour souscrire la déclaration annuelle de résultats de l'entreprise au titre des exercice 2010, 2011 et 2012.
9. La SCI Pyramide ne peut utilement se prévaloir, dans le cadre du présent litige, de la circonstance, à la supposer même établie, que la trésorerie de la Martinique, locataire d'un des immeubles lui appartenant, se serait comportée de façon laxiste et n'aurait pas respecté ses obligations de locataire.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Pyramide n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Pyramide est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Pyramide et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme F..., présidente-assesseure,
Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.
La rapporteure,
G... Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Camille Péan
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX01921 2