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09/06/2020 | FRANCE | N°19BX04245

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 09 juin 2020, 19BX04245


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne lui a fait obligation de quitter

le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904017 du 26 septembre 2019, le magistrat désigné

par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 octobre 2

019, Mme E..., représentée

par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne lui a fait obligation de quitter

le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904017 du 26 septembre 2019, le magistrat désigné

par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 octobre 2019, Mme E..., représentée

par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 18 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence d'indications sur ses attaches familiales en France et au Gabon, l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en fait ;

- le préfet, qui ne pouvait ignorer qu'elle vivait en concubinage avec un ressortissant français, n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;

- elle justifie de l'ancienneté de sa vie commune de deux années avec un ressortissant français, de sorte que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet s'est placé en situation de compétence liée en se bornant à évoquer la position des instances chargées de l'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2020, le préfet de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., de nationalité gabonaise, a déclaré être entrée en France le

30 janvier 2017. Après le rejet par la Cour nationale du droit d'asile, le 3 octobre 2018, de son recours à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande d'asile, le préfet de Tarn-et-Garonne, par un arrêté du 18 juin 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme E... relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. Mme E... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer utilement les réponses apportées par le tribunal administratif, les moyens tirés de l'incompétence du signataire, de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français et du défaut d'examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Si Mme E... se prévaut de son concubinage depuis le

8 juillet 2017 avec un ressortissant français, de la procédure de divorce de ce dernier, en cours à la date de l'arrêté contesté, et de leur projet de mariage, cette relation est relativement récente à cette date. Eu égard aux effets de l'obligation de quitter le territoire français et aux liens que Mme E... a nécessairement conservés au Gabon, où elle a vécu jusqu'à son entrée en France à l'âge de 47 ans, cette décision ne peut être regardée comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations précitées, ni comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation.

4. Aux termes de l'article de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains et dégradants. " Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

5. Il ressort de la rédaction de la décision fixant le pays de renvoi, qui précise que

Mme E... n'établit pas être exposée à des risques de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, que le préfet ne s'est pas estimé lié par le rejet de sa demande d'asile, mais a porté sa propre appréciation sur l'existence de tels risques.

6. Mme E... fait valoir qu'elle a manifesté en faveur de l'opposant Jean B... lors de l'élection présidentielle du 27 août 2016, qu'elle a été arrêtée le 1er septembre suivant avec d'autres militants au quartier général de M. B... et conduite au commissariat central de Libreville, que son identité a été relevée et qu'elle a subi des violences physiques. Toutefois, elle a précisé lors de l'audience publique de la Cour nationale du droit d'asile qu'elle n'était que sympathisante de M. B..., qu'elle n'avait jamais eu d'engagement politique auparavant, que son arrestation avait été de courte durée, et qu'elle n'avait pas été inquiétée jusqu'à son départ de son pays le 30 janvier 2017. Dans ces circonstances, la production d'une attestation attribuée à sa tante, relatant son arrestation, n'est pas de nature à démontrer qu'elle encourrait au Gabon, près de trois ans après l'arrestation ponctuelle dont elle a fait l'objet avec de nombreuses autres personnes, des risques de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Tarn-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme G... H..., présidente,

Mme A... D..., présidente-assesseure,

Mme Marie-Pierre Beuve-Dupuy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2020.

La présidente,

Brigitte H...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 19BX04245


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04245
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : BREAN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-09;19bx04245 ?
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