Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) La Sterne Blanche a demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012.
Par un jugement n° 1500760 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 mars 2018, la SARL La Sterne Blanche, représentée par la SCP Nataf et Planchat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2018 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure de contrôle est irrégulière, dès lors que l'initiative de la demande d'emport d'un document comptable appartient exclusivement au contribuable qui est propriétaire des documents et qui doit en avoir pris spontanément l'initiative ; or, l'administration, qui a obtenu le 24 janvier 2013 la transmission des fichiers des écritures comptables de la SARL La Sterne Blanche, ne démontre pas que cet emport a été fait à la demande expresse du contribuable ;
- s'agissant de l'intérêt de retard, il y a lieu, en application de l'article 8 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, de lui appliquer rétroactivement la loi pénale plus douce que constitue l'article 55 de la loi de finances rectificative pour 2017, qui a décidé de réduire de moitié le taux des intérêts de retard dus par le contribuable afin de mieux le mettre en adéquation avec les taux d'intérêt du marché.
Par un mémoire, enregistré le 4 juillet 2018, la SARL La Sterne Blanche demande à la cour de transmettre au Conseil d'État une question prioritaire de constitutionnalité.
Par ordonnance du 9 juillet 2018, le président de la 3ème chambre de la cour a refusé de transmettre cette question.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête, et fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 30 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificatives pour 2017 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de M. A... B....
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) La Sterne Blanche, qui exerce à titre principal, une activité de vente de linge de maison et d'articles de décoration et, à titre accessoire, une activité de location de chambres d'hôtes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012, à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 13 mai 2013, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur l'ensemble de la période contrôlée. Elle relève appel du jugement du 16 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui trouve son origine dans ce contrôle.
Sur la procédure de contrôle :
2. Aux termes de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " I. Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable peut satisfaire à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. L'administration peut effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s'assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. L'administration restitue au contribuable, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis et n'en conserve aucun double. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la SARL La Sterne Blanche a fait l'objet, son représentant, en application des dispositions rappelées au point 2, a remis au vérificateur une copie de fichiers des écritures comptables sur un cédérom fourni par l'administration, dont le vérificateur a accusé réception dans un document dressé le 24 janvier 2013, comprenant la liste des copies mises à dispositions, et signé du vérificateur et du représentant de la société. Les fichiers en cause n'étant que des copies des écritures comptables de la société dont cette dernière conservait la disposition, elle ne saurait soutenir que l'emport de ce cédérom constituerait un emport irrégulier de documents comptable.
Sur l'intérêt de retard :
4. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard (...) III. Le taux de l'intérêt de retard est de 0,40 % par mois. (...) ". Aux termes du même article, dans sa rédaction issue de l'article 55 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificatives pour 2017 " (...) III. Le taux de l'intérêt de retard est de 0,20 % par mois (...) ".
5. La société appelante soutient qu'il y a lieu de faire une application rétroactive de l'article 55 de la loi du 28 décembre 2017, qui ramène le taux de l'intérêt de retard de 0,40 à 0,20 % par mois, en vertu de la règle de la rétroactivité in mitius posée par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen. Toutefois, le III de l'article 55 de cette loi prévoit que ses dispositions " s'appliquent aux intérêts courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020 " et le président de la 3ème chambre de cette cour, par une ordonnance du 9 juillet 2018, devenue définitive, a décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité présentée à l'encontre de ces dispositions par l'appelante. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL La Sterne Blanche n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL La Sterne Blanche est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL La Sterne Blanche et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme C..., présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 20 mai 2020.
Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX00996 2