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04/11/2019 | FRANCE | N°17BX02407

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 04 novembre 2019, 17BX02407


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de condamner la commune de Vouillé à lui verser une indemnité de 35 000 euros en réparation du préjudice causé par la délibération du conseil municipal du 18 février 2009 décidant l'engagement de travaux de voirie et réseaux mis à la charge des propriétaires fonciers concernés.

Par un jugement n° 1502626 du 6 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enreg

istrée le 21 juillet 2017, M. B... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de condamner la commune de Vouillé à lui verser une indemnité de 35 000 euros en réparation du préjudice causé par la délibération du conseil municipal du 18 février 2009 décidant l'engagement de travaux de voirie et réseaux mis à la charge des propriétaires fonciers concernés.

Par un jugement n° 1502626 du 6 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2017, M. B... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 6 juin 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 27 novembre 2015 par laquelle le maire de Vouillé a rejeté sa réclamation préalable ;

3°) de condamner la commune de Vouillé à lui verser une indemnité de 38 773,38 euros, ou, à tout le moins, de 35 000 euros, assortie des intérêts à compter de la date de réception de sa demande d'indemnisation et de leur capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Vouillé la somme de 2 000 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la commune a commis une erreur dans la détermination des terrains concernés par la participation voirie et réseaux en ne prenant pas en compte l'ensemble des terrains bâtis ou à bâtir effectivement desservis par la voie en cause et compris dans la bande des 80 mètres définie par la délibération du 18 février 2009. En effet, les parcelles n°s 105, 107, 108 et 109, qui sont desservies par la voie en cause et bénéficiaient des aménagements sans pour autant relever des exceptions mentionnées à l'article L. 332-11-2 du code de l'urbanisme, auraient dû être prises en compte. Cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- le préjudice est certain dès lors que la participation pour voirie et réseau est devenue exigible lors de la délivrance de permis de construire sur les terrains concernés en 2012. La participation a d'ailleurs été versée à la commune ;

- s'agissant du lien de causalité, si le tribunal a estimé que le lien n'était pas direct dès lors que la participation est acquittée par le titulaire d'un permis à construire alors qu'il n'est que le vendeur du terrain à bâtir, il n'en demeure pas moins que la cause déterminante de son préjudice est bien l'illégalité de la délibération du 18 février 2009. C'est d'ailleurs lui, et non les titulaires des permis de construire, qui a supporté la charge de la participation voirie et réseaux ;

- eu égard à l'assiette qui aurait dû être retenue pour le calcul de la participation, cette dernière aurait dû s'élever à la somme de 31 855,68 euros au lieu de 70 629,56 euros. Il est donc fondé à solliciter le versement d'une indemnité de 38 773,88 euros ou, à tout le moins de 35 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2017, la commune de Vouillé, représentée par la SCP G...-Kolenc, conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés et que la créance dont se prévaut M. E... est prescrite.

Par ordonnance du 21 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 février 2019 à midi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... A...,

- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant la commune de Vouillé.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... était propriétaire des parcelles numéros 101, 202 et 102 en partie situées sur le territoire de la commune de Vouillé et desservies par la voie dénommée " Montée de Bellevue ". Par une délibération du 22 février 2005, la commune de Vouillé a institué sur son territoire une participation pour voirie et réseaux. Puis, par une délibération du 18 février 2009, le conseil municipal de Vouillé a décidé d'engager la réalisation de travaux de voirie et de réseaux sur la voie " Montée de Bellevue " pour un montant total de 129 513,16 euros et a fixé le montant de la participation due par mètre carré à 25,46 euros. Contestant le calcul pour déterminer le montant de la participation au mètre carré, M. E... a adressé au maire de Vouillé le 8 octobre 2009 une réclamation préalable tendant au versement d'une indemnité de 39 672 euros destinée à compenser la surévaluation du montant de la participation. A la suite du rejet implicite de cette réclamation, le tribunal administratif de Poitiers, par un jugement du 17 novembre 2011, a rejeté sa demande indemnitaire en l'absence de préjudice actuel et certain. En 2012, M. E... a vendu ses parcelles et les deux acquéreurs ont sollicité la délivrance de permis de construire. La commune de Vouillé a délivré ces permis de construire tout en mettant à la charge des pétitionnaires la participation pour voirie et réseaux prévue par la délibération du 18 février 2009. Conformément à ce qui était prévu lors de la vente de ces parcelles, le montant de ces participations a été prélevé sur le montant des ventes des parcelles. Par conséquent, à la suite du règlement de ces participations, M. E... a de nouveau sollicité le versement d'une indemnité de 52 973 euros. Après le rejet implicite de sa réclamation préalable, le tribunal administratif de Poitier a, par un jugement du 16 juillet 2015, de nouveau rejeté sa demande au motif que la responsabilité sans faute de la commune de Vouillé ne pouvait être engagée. Après avoir adressé une nouvelle réclamation préalable, M. E... a saisi le tribunal administratif de Poitiers afin d'engager la responsabilité pour faute de la commune de Vouillé pour obtenir sa condamnation à lui verser une indemnité de 35 000 euros en réparation de son préjudice financier. M. E... relève appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 6 juin 2017 rejetant sa demande.

2. D'une part, pour apprécier si la responsabilité de la puissance publique peut être engagée, il appartient au juge de déterminer si le préjudice invoqué est en lien direct et certain avec une faute de l'administration.

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 332-11-1 du code de l'urbanisme applicable à la délibération du 18 février 2009 : " Le conseil municipal peut instituer une participation pour voirie et réseaux en vue de financer en tout ou en partie la construction des voies nouvelles ou l'aménagement des voies existantes ainsi que l'établissement ou l'adaptation des réseaux qui leur sont associés, lorsque ces travaux sont réalisés pour permettre l'implantation de nouvelles constructions. Pour chaque voie, le conseil municipal précise les études, les acquisitions foncières et les travaux à prendre en compte pour le calcul de la participation, compte tenu de l'équipement de la voie prévu à terme. Peuvent être financés les études, les acquisitions foncières et les travaux relatifs à la voirie ainsi que les réseaux d'eau potable, d'électricité et d'assainissement. Les études, les acquisitions foncières et les travaux relatifs à la voirie comprennent l'éclairage public, le dispositif d'écoulement des eaux pluviales et les éléments nécessaires au passage des réseaux souterrains de communication. Seuls les études, les acquisitions foncières et les travaux à réaliser, définis par le conseil municipal, sont mis à la charge des propriétaires. Lorsqu'une voie préexiste, si aucun aménagement supplémentaire de la voie n'est prévu par le conseil municipal, ces travaux peuvent ne concerner que les réseaux. Dans ce cas, le conseil municipal peut prévoir, avec l'accord du ou des établissements publics de coopération intercommunale ou syndicats mixtes compétents pour ces réseaux, que la participation leur sera versée directement. Le conseil municipal arrête la part du coût mise à la charge des propriétaires riverains. Cette part est répartie entre les propriétaires au prorata de la superficie des terrains bénéficiant de cette desserte et situés à moins de quatre-vingts mètres de la voie. Le conseil municipal peut, en fonction des circonstances locales, modifier la distance de quatre-vingts mètres sans que celle qu'il fixe puisse être supérieure à cent mètres ni inférieure à soixante mètres. Le conseil municipal peut également exclure les terrains qui ne peuvent supporter de constructions du fait de contraintes physiques et les terrains non constructibles du fait de prescriptions ou de servitudes administratives dont l'édiction ne relève pas de la compétence de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale (...) ". Aux termes de l'article L. 332-6 dudit code : " Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : (...) 2° Le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnées à l'article L. 332-6-1 (...) " Aux termes de l'article L. 332-28 de ce code : " Les contributions mentionnées ou prévues au 2° de l'article L. 332-6-1 et à l'article L. 332-9 sont prescrites, selon le cas, par le permis de construire, le permis d'aménager, les prescriptions faites par l'autorité compétente à l'occasion d'une déclaration préalable ou l'acte approuvant un plan de remembrement. Ces actes en constituent le fait générateur. Ils en fixent le montant, la superficie s'il s'agit d'un apport de terrains ou les caractéristiques générales s'il s'agit des travaux mentionnés au premier alinéa de l'article L. 332-10. " Il résulte de ces dispositions que la participation qu'un conseil municipal peut instituer pour le financement de voies nouvelles ou des réseaux réalisés pour permettre l'implantation d'une nouvelle construction ne peut légalement être mise à la charge du pétitionnaire que par l'acte autorisant l'opération de construction et que le propriétaire riverain est le redevable de la participation à la date de délivrance de l'autorisation de construire, même lorsqu'il n'est pas le bénéficiaire de cette autorisation.

4. Comme indiqué au point 1, M. E... a cédé en 2012 ses terrains desservis par la voie " Montée de Bellevue " à M. D... et à M. F... et ces derniers ont sollicité la délivrance de permis de construire qui leur ont respectivement été accordés par arrêtés du 26 septembre 2012 et du 10 août 2012. Il résulte de l'instruction, et notamment de ces permis de construire, que les redevables de la participation pour voirie et réseaux concernant les terrains desservis par la voie " Montée de Bellevue " ayant appartenus à M. E... sont les propriétaires de ces terrains aux dates de délivrance des permis de construire, soit MM. D... et F.... La circonstance que M. E... ait convenu lors des ventes des parcelles qu'il prendrait en charge les participations pour voirie et réseaux et qu'il s'en soit acquitté, pour le compte de MM. D... et F..., est sans incidence sur la détermination de l'identité des redevables légaux de ces participations. Dès lors que M. E... n'était pas le redevable de ces participations, il ne peut solliciter auprès de la commune de Vouillé la restitution des montants versés. Les versements opérés trouvant leur origine non pas dans les actes de la commune, lesquels ont mis les participations en cause à la charge de MM. D... et F..., mais dans les actes de vente conclus avec M. E..., le préjudice de ce dernier trouve son origine non pas dans les actes de la commune mais dans ces actes de vente. Dès lors, la faute alléguée, résultant de l'illégalité, à la supposer établie, de la délibération du conseil municipal de Vouillé du 18 février 2009, n'est pas en lien direct avec le préjudice invoqué par M. E....

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune de Vouillé, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande indemnitaire.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Vouillé, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... la somme demandée par la commune de Vouillé sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Vouillé présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et à la commune de Vouillé.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme Karine Butéri, président-assesseur,

M. H... A..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 novembre 2019.

Le rapporteur,

Paul-André A...

Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt

5

N° 17BX02407


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX02407
Date de la décision : 04/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère direct du préjudice - Absence.

Urbanisme et aménagement du territoire - Contributions des constructeurs aux dépenses d'équipement public.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SCP D AVOCATS SAIDJI et MOREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-04;17bx02407 ?
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