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17/10/2019 | FRANCE | N°19BX00302

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 17 octobre 2019, 19BX00302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a décidé son transfert aux autorités allemandes.

Par un jugement n° 1805374 du 26 décembre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, M. A... représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2

) d'annuler l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a décidé son transfert aux autorités allemandes.

Par un jugement n° 1805374 du 26 décembre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, M. A... représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile ou de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 72 heures à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée et ne fait pas apparaitre le critère de responsabilité retenu par l'autorité de l'État membre qui prononce ce transfert, parmi ceux énoncés au chapitre III du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- l'article 4 du règlement 604/2013/UE a été méconnu, dès lors que ne lui ont pas été remis le livret intitulé " Les empreintes et Eurodac " avant la prise d'empreintes, la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande' " et la brochure B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce que cela signifie " dans une langue qu'il comprend ;

- l'article 5 de ce même règlement a été méconnu, dès lors que l'entretien individuel n'a pas été mené par une personne qualifiée dans des conditions garantissant la confidentialité ;

- le préfet ne justifie pas avoir requis les autorités allemandes aux fins de reprise en charge le 10 octobre 2018, ni que ces autorités ont fait connaître leur accord explicite le 16 octobre 2018, en méconnaissance des articles 21 et 22 du règlement (UE) n° 604/2013 ;

- la décision méconnaît l'article 17 du règlement 604/2013 dès lors que sa demande d'asile ayant été définitivement rejetée en Allemagne ; sa remise aux autorités allemandes aura pour conséquence son renvoi vers l'Afghanistan ;

- la décision méconnaît les articles 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union, dès lors qu'il encourt des risques en cas de retour en Afghanistan.

Par décision du bureau d'aide juridictionnelle du, 28 mars 2019, M. A... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par ordonnance du 27 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 24 avril 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses observations produites en première instance.

Par mesure d'instruction du 25 juin 2019, la cour a demandé au préfet de la Gironde de bien vouloir verser au dossier toutes pièces et informations afférentes à l'exécution de l'arrêté de transfert ou de la prolongation du délai d'exécution de ce transfert après la lecture du jugement du tribunal administratif.

Le 27 juin 2019, le préfet de la Gironde a produit les pièces établissant l'exécution de l'arrêté litigieux.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin2013 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- Le rapport de Mme C...,

- L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L.732-1 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., ressortissant afghan, a déposé une demande d'asile le 28 août 2018. La consultation des données Eurodac ayant révélé qu'il avait introduit une demande d'asile en Allemagne, le préfet de la Gironde, par arrêté du 4 décembre 2018, a décidé de le remettre aux autorités allemandes. M. A... relève appel du jugement du 26 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, M. A... reprend en appel, sans les assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté qu'il conteste, de son insuffisante motivation et de la méconnaissance des articles 4 du règlement 604/2013 relatif à l'information du demandeur d'asile et 5 du même règlement relatif à l'entretien individuel. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur (...) ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ".

4. Contrairement à ce que soutient M. A..., le préfet justifie, en produisant au dossier de première instance la copie du courriel daté du 10 octobre 2018 constituant la " réponse automatique accusant réception " de la demande de transfert de l'intéressé formulée au moyen de l'application " DubliNet ", que les autorités allemandes ont été saisies d'une demande de prise en charge de l'intéressé. Le préfet a également produit devant le premier juge la lettre du 16 octobre 2018 par laquelle ces autorités ont expressément accepté cette prise en charge.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ".

6. Si M. A... fait valoir que son retour en Afghanistan l'exposerait à des risques de mauvais traitements, l'arrêté attaqué n'emporte pas par lui-même le retour de l'intéressé dans son pays d'origine. De même, M. A... ne justifie pas que les autorités allemandes, qui ont certes opposé un refus à sa demande d'asile, feraient structurellement ou systématiquement obstacle à l'enregistrement et au traitement d'une nouvelle demande d'asile, ni qu'une telle demande ne serait pas examinée par ces mêmes autorités dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, ni même encore que le rejet définitif de sa demande d'asile serait suivi d'une mesure d'éloignement du territoire allemand. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être écarté ainsi que, pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10°Juillet°1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme C..., président-assesseur,

Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.

Le rapporteur,

Frédérique C...Le président

Éric Rey-Bèthbéder

Le greffier,

Caroline Brunier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX00302 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX00302
Date de la décision : 17/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03-03


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-17;19bx00302 ?
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