La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/07/2019 | FRANCE | N°19BX00275

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2019, 19BX00275


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 5 juin 2018 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Par un jugement n° 1803167 du 19 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 21 janvier 2019, le 23

avril 2019 et le 11 juin 2019, complétés par des pièces produites le 7 juin 2019, M.B..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 5 juin 2018 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Par un jugement n° 1803167 du 19 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 21 janvier 2019, le 23 avril 2019 et le 11 juin 2019, complétés par des pièces produites le 7 juin 2019, M.B..., représenté par Me Boezec, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 19 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2018 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est entaché d'irrégularité ;

- l'arrêté contesté a méconnu les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2019, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevé par M. B...n'est fondé.

Par une décision en date du 11 avril 2019, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a refusé d'admettre M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique,

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Béatrice Molina-Andréo pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. David Katz,

- et les observations de Me Boezec, avocat, représentant M.B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A...B..., ressortissant algérien, est entré en France le 28 août 2017 munis d'un passeport revêtu d'un visa touristique valable trente jours, accompagné de son épouse et de leur fille mineure, prénommée Rayene. Le 7 novembre 2017, ils ont sollicité leur admission au séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade. Par des arrêtés du 5 juin 2018, le préfet du Tarn a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont ils ont la nationalité ou de tout pays où ils sont légalement admissibles. Par sa requête, M. B...relève appel du jugement du 19 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté le concernant.

2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur, sont celles de l'état de santé nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. Les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, qui prévoient la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au bénéfice des parents d'enfants dont l'état de santé répond aux conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 du même code, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Toutefois, cette circonstance n'interdit pas au préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, de délivrer à ces ressortissants un titre de séjour pour l'accompagnement d'un enfant malade.

3. Selon l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui a été sollicité par le préfet du Tarn pour apprécier la situation médicale de son enfant, a indiqué que l'état de santé de Rayene, née le 2 septembre 2000, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que cette enfant peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que Rayene présente un syndrome polymalformatif en rapport avec un syndrome de Noonan, dont le pronostic notamment cardiaque n'est pas prévisible, et qui nécessite une prise en charge spécialisée pluridisciplinaire avec un suivi cardiologique, ophtalmologique, endocrininologique, orthopédique et neurologique en centre de référence. La disponibilité en Algérie des soins nécessités par l'état de santé de cette enfant est très sérieusement contredite par les nombreux certificats médicaux circonstanciés, datés des 3 avril 2018, 18 avril 2018, 24 avril 2018, 25 juin 2018, 9 juillet 2018, 3 juillet 2018, 17 août 2018 et 5 septembre 2018, établis tant par des médecins français ou algériens que par des praticiens hospitaliers spécialisés. Ainsi, en refusant de délivrer un titre de séjour à M.B..., le préfet du Tarn a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale du requérant.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Tarn du 5 juin 2018.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Tarn de délivrer à M. B...une carte de résident dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 700 euros à verser à M.B..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1803167 du tribunal administratif de Toulouse du 19 décembre 2018 et l'arrêté du 5 juin 2018 du préfet du Tarn sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Tarn de délivrer une carte de résident à M. B...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. B...une somme de 700 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. David Katz, premier conseiller,

M. Paul-André Braud, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.

Le rapporteur,

David Katz

Le président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00275
Date de la décision : 29/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. David KATZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET BOEZEC CARON BOUCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-07-29;19bx00275 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award