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12/06/2019 | FRANCE | N°18BX03663,18BX03669

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 12 juin 2019, 18BX03663,18BX03669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...de la Cruz a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800902 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du 11 janvier 2018 et a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à Mme B.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...de la Cruz a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800902 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du 11 janvier 2018 et a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à Mme B...de la Cruz un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 17 octobre 2018 sous le n°18BX03663, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 septembre 2018 et de rejeter la demande présentée par Mme B...de la Cruz devant le tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que :

-le tribunal administratif a estimé à tort qu'un séjour sur l'île de Saint-Martin pouvait être regardé comme un séjour en France pour l'application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

-le tribunal administratif a estimé à tort que son arrêté méconnaissait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Mme B...de la Cruz n'a produit l'essentiel des pièces justificatives de sa présence sur l'île de Saint-Martin que devant le juge de première instance, soit postérieurement à l'arrêté en litige ; en tout état de cause, sa présence sur l'île de Saint-Martin ne peut être assimilée à une présence en France métropolitaine et elle ne justifie pas d'une présence continue sur le territoire français de l'île de Saint-Martin ;

-le tribunal administratif s'est fondé sur des pièces que l'intéressée n'avait pas portées à sa propre connaissance et qui sont postérieures à l'arrêté attaqué.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 avril 2019, Mme B...de la Cruz, représentée par MeA..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué, à titre subsidiaire, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, à l'annulation de l'arrêté du 11 mai 2018 en litige, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut, de réexaminer sa situation, à ce qu'elle soit admis à l'aide juridictionnelle à titre provisoire, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable à défaut d'avoir été signée par une autorité ayant reçue délégation du préfet ;

- l'île de Saint-Martin est comprise dans le territoire français, de sorte qu'il doit être tenu compte de la durée de son séjour sur cette île ;

- la circonstance qu'elle aurait produit les pièces justifiant sa présence sur l'île de Saint-Martin postérieurement à l'arrêté en litige est sans incidence ;

-sa fille Ericka a acquis la nationalité française.

Par une ordonnance du 4 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 3 mai 2019.

Un mémoire en production de pièces enregistré le 13 mai 2019, présenté pour Mme B...de la Cruz postérieurement à la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.

Par une décision du 23 mai 2019, Mme B...de la Cruz a été admise à l'aide juridictionnelle totale.

II. Par une requête enregistrée le 17 octobre 2018 sous le n°18BX03669, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1800902 du 13 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté en date du 11 janvier 2018 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi à l'encontre de Mme B...de la Cruz.

Il soutient que sa requête au fond contient des moyens sérieux de nature à entraîner l'annulation du jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2019, Mme B...de la Cruz, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'elle soit admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle reprend ses moyens développés dans la requête n° 1803663.

Par une ordonnance du 4 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 3 mai 2019.

Par une décision du 23 mai 2019, Mme B...de la Cruz a été admise à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Déborah de Paz pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...B...de la Cruz, ressortissante dominicaine, est entrée en France métropolitaine le 30 octobre 2017 munie d'un passeport revêtu d'un visa Schengen de court séjour valable du 4 octobre 2017 au 18 novembre 2017. Le 6 novembre 2017, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 11 janvier 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

2. Par une première requête enregistrée sous le n°18BX03663, le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du 13 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 11 janvier 2018. Par une seconde requête enregistrée sous le n°18BX03669, le préfet de la Haute-Garonne demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un seul arrêt.

Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

3. Par deux décisions du 23 mai 2019, Mme B...de la Cruz a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à son admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. L'article L. 111-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Au sens des dispositions du présent code, l'expression " en France " s'entend de la France métropolitaine, de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de Mayotte, de La Réunion, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. ".

5. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le préfet, il résulte des dispositions précitées que c'est à bon droit que le tribunal administratif a pris en compte, pour établir l'ancienneté du séjour en France de Mme B...de la Cruz, les années antérieures à son entrée sur le territoire métropolitain au cours desquelles elle a vécu à Saint-Martin.

6. En deuxième lieu, si la légalité d'une décision s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise, il appartient au juge de tenir compte des justifications apportées devant lui, dès lors qu'elles attestent de faits antérieurs à la décision attaquée, même si ces éléments n'ont pas été portés à la connaissance de l'administration avant qu'elle se prononce. Dès lors, le préfet de la Haute-Garonne, qui ne conteste pas sérieusement que les pièces produites par Mme B...de la Cruz devant les premiers juges permettent d'établir, comme ces derniers l'ont estimé à bon droit, qu'elle a résidé à Saint-Martin depuis a minima 2010, n'est pas fondé à soutenir que lesdites pièces, ayant été établies postérieurement à l'arrêté attaqué et produites pour la première fois devant le tribunal administratif, ne pouvaient être prises en compte, dès lors qu'elles se rapportent à des faits antérieurs.

7. En troisième lieu, la seule circonstance que Mme B...de la Cruz se soit rendue à plusieurs reprises en République Dominicaine alors qu'elle résidait avec ses enfants à Saint-Martin n'est pas de nature à faire regarder l'intéressée comme n'ayant pas fixé en France depuis au moins 2010 le centre de ses intérêts privés et familiaux où ses enfants sont nés et y sont scolarisés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 11 janvier 2018 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi pris à l'encontre de Mme B...de la Cruz.

Sur la requête aux fins de sursis à exécution :

9. Le présent arrêt, qui statue sur la requête du préfet de la Haute-Garonne à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 septembre 2018, rend sans objet ses conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme totale de 1 200 euros à verser à MeA..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par Mme B...de la Cruz tendant à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18BX03669 présentée par le préfet de la Haute-Garonne.

Article 3 : La requête n° 18BX03663 du préfet de la Haute-Garonne est rejetée.

Article 4 : L'Etat versera à MeA..., conseil de Mme B...de la Cruz, une somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme D...B...de la Cruz. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

Mme Caroline Gaillard, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2019.

Le rapporteur,

Caroline C...Le président

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03663, 18BX03669


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03663,18BX03669
Date de la décision : 12/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-06-12;18bx03663.18bx03669 ?
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