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21/05/2019 | FRANCE | N°18BX03575

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 21 mai 2019, 18BX03575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 février 2018 par lequel le préfet de l'Ariège lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800904 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du préfet de l'Ariège du 6 février 2018 et a enjoint à l'autorité préfectorale de procéder au réexa

men de la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 février 2018 par lequel le préfet de l'Ariège lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800904 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du préfet de l'Ariège du 6 février 2018 et a enjoint à l'autorité préfectorale de procéder au réexamen de la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ainsi que de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire au séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 octobre 2018 et un mémoire enregistré le 12 avril 2019, le préfet de l'Ariège demande à la cour d'annuler ce jugement du 13 septembre 2018 du tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que :

- l'arrêté annulé ne méconnaît ni les dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni celles de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R.313-23 et R.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le rapport requis dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour pour soins a été établi par un médecin qui n'était pas membre du collège de médecins ayant donné son avis sur le dossier de M.A..., de sorte que celui-ci n'a été privé d'aucune garantie ;

- il ne s'est pas cru lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 5 janvier 2018 ;

- ses décisions obligeant M. A...à quitter le territoire français et portant fixation du pays de renvoi sont suffisamment motivées en droit et en fait ; en outre, leur motivation révèle qu'il a été procédé à un examen particulier de sa situation ;

- ces décisions n'ont pas méconnu les dispositions des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa décision fixant le pays de renvoi n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2019, M.A..., représenté par Kosseva-Venzal, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et demande à la cour, à titre subsidiaire :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ariège de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jours de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou, dans l'hypothèse où sa demande d'aide juridictionnelle serait rejetée, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont intervenues en méconnaissance des articles R. 511-1, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis ;

- l'avis du collège de médecins n'a pas été transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'OFII, est incomplet et ne comporte pas toutes les mentions exigées selon l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- il n'est pas établi que les services préfectoraux se sont assurés que le médecin instructeur a établi son rapport à une date précise et antérieure à l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- le préfet s'est estimé, à tort, lié par l'avis du collège de médecins ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'erreurs de fait dès lors que, d'une part, il a été soumis au versement d'un visa de régularisation alors même qu'il avait sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° et était dès lors dispensé du règlement de ce visa, et, d'autre part, qu'il a bénéficié d'un récépissé puis d'un titre de séjour ;

- la décision lui refusant le séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, a méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Sabrina Ladoire pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Bourgeois a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A..., ressortissant russe né le 11 juin 1963, déclare être entré en France le 19 juin 2014. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile par des décisions des 30 octobre 2015 et 8 juillet 2016. Puis, il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 11 octobre 2016 au 10 octobre 2017. Par arrêté du 6 février 2018, le préfet de l'Ariège a refusé de procéder au renouvellement de ce titre de séjour, a obligé M. A...à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de l'Ariège relève appel du jugement du 13 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 6 février 2018.

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire formée par M. A...:

2. Par une décision du 14 février 2019, M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à son admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale (...). ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement ".

4. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".

5. L'article R. 313-23 du même code dispose que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. A défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. En cas de défaut de présentation de l'étranger lorsqu'il a été convoqué par le médecin de l'office ou de production des examens complémentaires demandés dans les conditions prévues au premier alinéa, il en informe également le préfet ; dans ce cas le récépissé de demande de première délivrance de carte de séjour prévu à l'article R. 311-4 n'est pas délivré. Lorsque l'étranger dépose une demande de renouvellement de titre de séjour, le récépissé est délivré dès la réception, par le service médical de l'office, du certificat médical mentionné au premier alinéa. / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) / Le collège peut demander au médecin qui suit habituellement le demandeur, au médecin praticien hospitalier ou au médecin qui a rédigé le rapport de lui communiquer, dans un délai de quinze jours, tout complément d'information. Le demandeur en est simultanément informé. Le collège de médecins peut entendre et, le cas échéant, examiner le demandeur et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. Il peut être assisté d'un interprète et d'un médecin. Lorsque l'étranger est mineur, il est accompagné de son représentant légal. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

6. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

7. D'une part, il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.

8. D'autre part, le préfet de l'Ariège, auquel ne pouvait être communiqué le rapport médical destiné au collège de médecins de l'OFII en raison du secret médical qui s'y attache et qui, par suite, n'est pas non plus en mesure de le produire à l'instance ainsi que le demande M. A..., a toutefois produit en appel une attestation cosignée par le médecin coordonnateur de la zone sud-ouest de l'OFII et par le directeur territorial adjoint de l'OFII de Toulouse en date du 21 septembre 2018 précisant que le rapport médical relatif à l'état de santé de M. A...a été établi le 13 octobre 2017 par un médecin qui ne faisait pas partie du collège de médecins puis transmis à ce collège. Ce document ainsi que les mentions portées sur l'avis au vu duquel s'est prononcé le préfet, précisant les noms des médecins concernés et leur désignation pour siéger au sein du collège, par décision du directeur général de l'Office en date du 2 janvier 2018 publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur, permettent d'établir de manière suffisamment certaine que le médecin auteur du rapport médical n'a pas siégé au sein de ce collège, conformément aux prescriptions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que l'avis dont s'agit a été émis dans le respect des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Par suite, le préfet de l'Ariège est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté du 6 février 2018 au motif que cet arrêté était intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de mention dans l'avis du collège de médecin du 5 janvier 2018 du nom du médecin ayant établi le rapport médical au vu duquel cet avis avait été émis.

10. Il y a lieu pour la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...contre les décisions contenues dans l'arrêté attaqué du 6 février 2018.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

11. En visant les textes applicables, notamment les articles L. 313-11, 11° et L. 511-1 I (3°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en mentionnant les éléments de fait fondant le rejet de la demande de M.A..., le préfet, qui s'est également référé à l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, a suffisamment motivé son arrêté au regard des prescriptions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. En outre, cette motivation révèle qu'il a été procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M.A....

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

12. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ". Aux termes de l'article 8 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susmentionné : " L'avis du collège est transmis, sans délai, au préfet, sous couvert du directeur général de l'office ".

13. Le requérant soutient que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'office. Toutefois, alors que le directeur général de l'office ne dispose d'aucune attribution particulière dans l'élaboration de l'avis, la procédure étant couverte par le secret médical, les dispositions précitées ont seulement pour objet et pour effet d'établir une voie de transmission administrative de l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au préfet, sans création d'une garantie particulière pour l'étranger. Le moyen tiré de ce que l'avis du collège de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'office doit, dès lors, être écarté comme inopérant.

14. En deuxième lieu, M. A...fait valoir qu'aucune des cases prévues sur le modèle d'avis du collège des médecins de l'OFII figurant à l'annexe C de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016 pour rendre compte des éléments de procédure n'a été cochée et que l'avis du collège de médecins ne précise pas non plus si l'intéressé peut effectivement accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine et quelle est la durée prévisible de ce traitement. Toutefois, dès lors qu'il n'établit ni même ne soutient que des actes de procédure auraient effectivement été accomplis, M. A...n'est pas fondé à soutenir que cette omission l'a privé, en l'espèce, d'une garantie ou a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise. En outre, le collège de médecins n'était pas tenu de préciser, dans son avis du 10 octobre 2017 produit à l'instance, si l'intéressé pouvait effectivement accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine et quelle était la durée prévisible de ce traitement dès lors qu'il a estimé que la condition tenant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité du défaut d'une prise en charge médicale n'était pas, en l'espèce, remplie. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que cet avis a méconnu, pour ces motifs, les dispositions de l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016.

15. En troisième lieu, si M. A...soutient que la préfet a commis une erreur de fait en retenant qu'il était entré irrégulièrement en France dès lors qu'il s'est acquitté du paiement des timbres fiscaux liés au dépôt d'une demande de délivrance d'un visa de régularisation et était, au demeurant, dispensé de cette formalité dès lors qu'il sollicitait le renouvellement d'un titre de séjour, cette circonstance, à la supposer établie, demeure, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, lequel n'est pas fondé sur l'irrégularité de l'entrée de l'intéressé sur le territoire national.

16. En quatrième lieu, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

17. D'une part, la décision du préfet de l'Ariège a été prise au vu d'un avis du collège de médecins de l'OFII rendu le 5 janvier 2018 dont il ressort que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale, un défaut de prise en charge de cet état de santé ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que M. A... peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Dès lors qu'il a choisi de ne pas lever le secret médical avant de saisir le tribunal administratif alors que ce secret médical interdit au collège de médecins de l'OFII de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine, M. A...ne peut sérieusement soutenir que le préfet de l'Ariège, qui a saisi le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de sa demande, et a estimé que, dans la limite du secret médical, aucune pièce versée au dossier ne contredisait sérieusement cet avis, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et aurait méconnu l'étendue de sa compétence.

18. D'autre part, M. A...soutient qu'il est atteint du virus de l'hépatite C (VHC), que son foie est atteint d'une fibrose F1/F2 pouvant évoluer vers une cirrhose ou vers un cancer hépatique et qu'il traité par interféron et ribavirine. Au soutien de ses allégations, M. A... produit deux certificats médicaux établis par un professeur spécialiste en hépato gastroentérologie de l'hôpital de Lyon Edouard Herriot dont il ressort qu'à la date du second de ces certificats, le 1er février 2017, le traitement par interféron et ribavirine dont il bénéficiait était en voie d'achèvement et qu'il n'était plus astreint qu'à un contrôle virologique trimestriel. Il produit également deux autres certificats médicaux établis à sa demande les 14 février 2018 et 29 mars 2018 par un médecin généraliste, postérieurement à l'arrêté attaqué, dont il ressort également que son état de santé ne justifie plus qu'un simple suivi médical dont les modalités ne sont au demeurant pas précisées et qu'il demeure atteint d'une fibrose séquellaire hépatique. Ces seuls éléments n'étant pas de nature à infirmer l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son état de santé.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

19. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

20. Si, en vertu du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger " résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ", ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'état de santé de M. A...ne faisait pas obstacle à son éloignement du territoire national.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

21. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d' un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu' il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Eu égard à ce qui est dit au point 17 du présent arrêt, le requérant ne saurait utilement soutenir que son éloignement vers l'Arménie constituerait, en raison de son état de santé, un traitement inhumain ou dégradant prohibé par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, il n'apporte aucun élément suffisamment probant pour établir qu'il encourrait des risques de traitements inhumains ou dégradants le visant personnellement en cas de retour dans son pays d'origine alors, au demeurant, que ni l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, ni la Cour nationale du droit d'asile n'ont reconnu l'existence de tels risques. Dès lors, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

22. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, M. A...n'est pas davantage fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité des décisions par lesquelles le préfet lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

23. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Ariège est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 6 février 2018.

Sur les conclusions accessoires présentées par M.A... :

24. L'exécution du présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées à fin d'annulation par M. A...devant le tribunal administratif de Toulouse, n'implique l'édiction d'aucune mesure d'exécution. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A...à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

25. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par M. A...tendant à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : Le jugement n°1800904 du 13 septembre 2018 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que le surplus des conclusions qu'il a présentées devant la cour sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressé au préfet de l'Ariège.

Délibéré après l'audience du 17 avril 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier conseiller,

M. Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 mai 2019.

Le rapporteur,

Manuel BourgeoisLe président

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX03575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03575
Date de la décision : 21/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : KOSSEVA-VENZAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-05-21;18bx03575 ?
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