Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Etablissements B...a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2008 au 30 novembre 2011 et de lui accorder le bénéfice du sursis de paiement.
Par un jugement n° 1301710 du 2 juin 2016, le tribunal administratif de Poitiers a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la société Etablissements B...tendant à la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales mis à sa charge au titre des années 2010 et 2011 pour un montant total de 28 560 euros et a rejeté le surplus des conclusions de cette société.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 29 juillet 2016, le 8 juin 2018 et le 5 juillet 2018, la société EtablissementsB..., représenté par SELARL Thomas et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2016 ;
2°) de la décharger des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011 ;
3°) de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour un montant de 76 440 euros ;
4°) de la décharger des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie pour un montant de 390 000 euros ;
5°) de la décharger des pénalités et intérêts correspondants ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, aucun dégrèvement n'est intervenu concernant la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), les sommes correspondantes ayant fait l'objet d'un commandement de payer, puis d'un avis à tiers détenteur ;
- la décision de dégrèvement n'était pas motivée ;
- l'avis de mise en recouvrement du 17 mars 2014 devra être annulé en raison du défaut de motivation ;
- l'avis de mise en recouvrement du 14 décembre 2012 a été délivré par le comptable public de Niort, alors que l'avis de mise en recouvrement du 17 mars 2014, le commandement de payer et l'avis à tiers détenteur ont été délivrés par le comptable public de La Rochelle ;
- elle n'est pas assujettie à la taxe sur les surfaces commerciales dès lors que son activité de revente de matériels agricoles, qui s'adresse exclusivement à une clientèle de professionnels, ne relève pas du commerce de détail ; qu'en ce sens, elle peut se prévaloir des dispositions de la loi de finances rectificative pour 2012, du 29 décembre 2012, ainsi que, sur le fondement de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, des commentaires de la direction générale des finances publiques impôt publiées le 2 octobre 2013 ;
- subsidiairement, elle ne dispose pas de 400 m² de surface de vente dès lors que le local destiné à la formation technique préalable des acquéreurs de machines agricoles et l'espace de vente au comptoir ne peuvent être inclus dans cette surface ;
- la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations de service réalisées par la société Cob, qui est présidente de la société EtablissementsB..., est déductible de son bénéfice imposable ;
- le coût des prestations de service réalisées par la société Cob est déductible de son bénéfice imposable.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 février 2017, le 2 juillet 2018 et le 11 septembre 2018, le directeur du contrôle fiscal sud-ouest, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales pour 2010 et 2011 sont irrecevables ; qu'à titre subsidiaire, aucun des moyens invoqués à l'appui de ces conclusions n'est fondé ;
- pour le surplus des conclusions, aucun des moyens invoqués à l'appui de ces conclusions n'est fondé.
Par ordonnance du 30 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 24 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.A...,
- et les conclusions de Mme Ladoire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Etablissements B...exploite une activité de vente et de réparation de machines et matériels agricoles dans plusieurs établissements, dont celui situé à Aigrefeuille d'Aunis. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 8 juin 2012, des rappels de taxe sur les surfaces commerciales lui ont été réclamés au titre des années 2010 et 2011, elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2008 au 30 novembre 2011. Après mise en recouvrement de ces impositions, la société Etablissements B...a formé une réclamation qui a été partiellement rejetée le 11 juin 2013 par l'administration fiscale. La société Etablissements B...a demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes, ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2008 au 30 novembre 2011. Par un jugement du 2 juin 2016, le tribunal administratif de Poitiers a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la société Etablissements B...tendant à la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales mis à sa charge au titre des années 2010 et 2011 pour un montant total de 28 560 euros et a rejeté le surplus des conclusions de cette société. Par sa requête, la société Etablissements B...relève appel de ce jugement.
Sur la taxe sur les surfaces commerciales au titre de l'année 2010 :
2. Par un avis de mise en recouvrement du 21 décembre 2012, des rappels de taxe sur les surfaces commerciales ont été mis à la charge de la société Etablissements B...au titre de l'année 2010, pour un montant de 17 817 euros. Il résulte de l'instruction que, par décision du 11 juin 2013, des dégrèvements partiels ont été prononcés sur cette taxe, laissant à la charge de la société appelante la somme de 14 280 euros pour l'année 2010. Par décision du 25 mars 2014, un dégrèvement " technique " d'un montant total de 14 280 euros a été prononcé en faveur de la société Etablissements B...correspondant aux rappels de taxe sur les surfaces commerciales qui étaient restés à sa charge au titre de l'année 2010. Ainsi qu'elle l'avait annoncé en opérant ce second dégrèvement, l'administration n'a pas renoncé aux impositions en cause et a émis, le même jour, un second avis de mise en recouvrement pour les mêmes rappels. Si la société Etablissements B...n'a pas produit, devant le tribunal administratif, la copie de ce second avis, elle devait néanmoins être regardée comme confirmant sa demande en décharge qui, au demeurant, n'avait pas à faire l'objet d'une nouvelle réclamation. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la demande concernant les rappels de taxe sur les surfaces commerciales au titre de l'année 2010 était devenue sans objet et ont constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette demande.
3. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit, dans cette mesure, être annulé et il y a lieu, pour la cour, de statuer sur la demande de la société Etablissements B...tendant à la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales lui ont été réclamés au titre de l'année 2010 par la voie de l'évocation.
En ce qui concerne la loi fiscale :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu'elle dépasse quatre cents mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui les exploite. (...) ". D'une part, si la société requérante soutient que son activité consiste à vendre du matériel agricole à des agriculteurs, cette seule circonstance ne saurait la faire regardée comme exerçant une activité de grossiste, dès lors que ses clients ne procèdent pas eux-mêmes à la revente au détail du matériel concerné. D'autre part, il résulte de l'instruction que la surface commerciale exploitée par la société requérante était de 598,73 m², déduction faite des surfaces non exclusivement affectées à la vente. Par conséquent, le moyen tiré de ce que la société requérante n'était pas assujettie à la taxe sur les surfaces commerciales au titre de l'année 2010 doit être écarté.
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :
5. La société Etablissements B...ne peut utilement se prévaloir de la doctrine administrative publiée au BOFIP le 2 octobre 2013 (BOI-TPF-TSC-20131002, n° 330), dès lors que celle-ci est postérieure à l'expiration du délai de déclaration de la taxe sur les surfaces commerciales due au titre de l'année 2010.
6. Il résulte de ce qui précède que les demandes de première instance à fin de décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales réclamés à la société Etablissements B...au titre de l'année 2010 doivent être rejetées.
Sur la taxe sur les surfaces commerciales au titre de l'année 2011 :
7. En vertu du 4° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort " sur les litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ". Pour l'application de ces dispositions, doit être regardé comme un impôt local tout impôt dont le produit, pour l'année d'imposition en cause, est majoritairement affecté aux collectivités territoriales, à leurs groupements ou aux établissements publics qui en dépendent.
8. La taxe sur les surfaces commerciales due au titre des années d'imposition 2011 et suivantes constitue, du fait de son affectation aux communes et établissements publics de coopération intercommunale, un impôt local au sens du 4° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Le tribunal administratif statue ainsi en premier et dernier ressort sur les litiges relatifs à la taxe sur les surfaces commerciales. Par conséquent, les conclusions de la société Etablissements B...dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Poitiers, en tant qu'il concerne la taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2011, ressortissent à la compétence du Conseil d'Etat, auquel il y a lieu de les transmettre en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative.
Sur le surplus des conclusions en décharge :
En ce qui concerne la déductibilité des prestations de services réalisées pour la société EtablissementsB... :
9. En premier lieu, l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, prévoit que : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de
main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais. (...) ".
10. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire de son bénéfice net ou des frais qu'il entend déduire de son revenu imposable ainsi que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
11. La société Etablissements B...a déduit de ses résultats imposables des factures émises par la société Cob en paiement de prestations commerciales effectuées pour son compte, notamment la gestion des contrats conclus avec la société Claas, fournisseur des machines agricoles. L'administration fiscale a remis en cause ces déductions au motif que la réalité des prestations fournies par cette société, détenant 51,39 % du capital social de la société EtablissementsB..., la présidant et recourant aux moyens matériels et humains fournis par la société Bco Management, qui emploie notamment M. et MmeB..., n'était pas justifiée.
12. En appel, la société Etablissements B...ne fait valoir aucun autre élément que ceux débattus en première instance. Notamment, elle ne produit aucun élément permettant d'établir qu'au cours des années en litige, la société Cob a réalisé pour son compte des prestations auprès de tiers. Dans ces conditions, il y a lieu d'adopter les motifs pertinemment retenus par les premiers juges, selon lesquels l'administration fiscale établit que les factures correspondant aux prestations de services réalisées par la société Cob pour la société requérante ne correspondent pas à des prestations effectives.
En ce qui concerne la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations de services réalisées pour la société EtablissementsB... :
13. L'article 271 du code général des impôts prévoit, dans sa rédaction alors applicable, que : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ".
14. L'administration, estimant que la société requérante n'établissait pas la réalité des prestations facturées, a remis en cause le caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations réalisées par la société Cob pour la société Etablissements B...pour la période allant du 1er octobre 2008 au 30 novembre 2011.
15. En appel, la société Etablissements B...ne fait valoir aucun autre élément que ceux débattus en première instance. Dans ces conditions, il y a lieu d'adopter les motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
16. Il résulte de ce qui précède que la société Etablissements B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes à fins de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er octobre 2008 au 30 novembre 2011, en droits et intérêts de retard.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Etablissements B...demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Les conclusions de la requête de la société Etablissements B...dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 2 juin 2016, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011, sont transmises au Conseil d'Etat.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 2 juin 2016 est annulé, en tant qu'il a rejeté la demande de la société Etablissements B...tendant à la décharge des cotisations de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010.
Article 3 : La demande présentée au tribunal administratif de Poitiers tendant à la décharge des cotisations de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles la société Etablissements B...a été assujettie au titre de l'année 2010 et le surplus de la requête d'appel de cette société sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société EtablissementsB..., au ministre de l'action et des comptes publics et au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
M. David Katz, premier conseiller,
M. Romain Roussel, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 12 avril 2019.
Le rapporteur,
David A...
Le président,
Philippe Pouzoulet
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02638