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02/04/2019 | FRANCE | N°17BX01101

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 02 avril 2019, 17BX01101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...L..., agissant en son nom personnel ainsi qu'en qualité d'ayant droit de Q...A...et de représentante légale de son fils ThéoA..., a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers à lui verser la somme globale de 62 987 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter

du 23 septembre 2014 et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1500331 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa d

emande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2017, MmeL....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...L..., agissant en son nom personnel ainsi qu'en qualité d'ayant droit de Q...A...et de représentante légale de son fils ThéoA..., a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers à lui verser la somme globale de 62 987 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter

du 23 septembre 2014 et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1500331 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2017, MmeL..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de Q...A...et de représentante légale de son fils ThéoA..., représentée par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 février 2017 ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers à lui verser la somme globale de 62 987 euros, majorée des intérêts au taux légal et capitalisés à compter

du 23 septembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Poitiers la somme de 7 730 euros au titre des frais de consignation exposés pour les expertises ;

4°) de mettre à la charge du CHU de Poitiers le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- la responsabilité du CHU de Poitiers est engagée en raison d'une erreur de diagnostic fautive à l'origine du décès de Q...A...en l'absence de mise en place d'un traitement

anti-reflux sous surveillance hospitalière prolongée et d'exploration de l'hypothèse médicale de syndrome de Münchhausen par procuration ainsi qu'en raison d'une erreur dans le choix thérapeutique d'avoir laissé Q...A...rentrer à domicile sans démarche thérapeutique ;

- les fautes commises ont entraîné pour Q...A...une perte de chance de survie ;

- les souffrances endurées par Q...A...doivent être évaluées à la somme

de 6 000 euros ;

- son préjudice d'affection doit être évalué à la somme de 30 000 euros, les frais d'obsèques et funéraires à hauteur de la somme de 12 987 euros ;

- ThéoA..., le frère de Q...A..., a subi un préjudice d'affection qui doit être indemnisé à hauteur de 14 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2018, le CHU de Poitiers, représenté par MeM..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme L...ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 25 avril 2018, l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par MeD..., conclut au rejet de toute demande qui serait formulée à son encontre.

Il soutient que les conditions pour obtenir une réparation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies.

Par ordonnance du 29 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 21 octobre 2018.

Un mémoire présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne par la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente Maritime a été enregistré le 15 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.E...,

- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,

- et les observations de MeK..., représentant le CHU de Poitiers, et

de MeJ..., représentant l'ONIAM.

Considérant ce qui suit :

1. Le jeune Q...A..., né le 13 février 2006, hospitalisé à plusieurs reprises au centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers les 14 et 15 mai 2007, puis, du 16 au 25 mai 2007 et, enfin, du 5 au 7 juin 2007 dans le cadre d'une hospitalisation programmée pour la poursuite d'investigations, est décédé le 8 juin 2007 au domicile familial à la suite d'un malaise survenu au décours de la prise du biberon du matin suivi d'un arrêt cardio-respiratoire.

2. Le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, saisi par MmeL..., mère de l'enfant, a ordonné, le 14 août 2007, une expertise confiée au docteurH..., qui a remis son rapport le 7 janvier 2008. Constatant notamment des éléments nouveaux et des divergences entre ce rapport d'expertise et ceux rendus successivement le 7 janvier 2009 par les docteurs B...et P...et le 17 novembre 2009 par le docteur N...à la demande de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation de Poitou-Charentes, le même juge des référés a, par une seconde ordonnance du 24 mars 2011, confié une nouvelle expertise au professeur Voyez et au docteurO..., lesquels ont remis leur rapport le 13 décembre 2013.

3. MmeL..., agissant tant en son nom propre qu'en qualité d'ayant droit

de Q...A...et de représentante légale de son fils, Théo, relève appel du jugement

du 21 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CHU de Poitiers à lui verser une indemnité d'un montant global

de 62 987 euros, majorée des intérêts au taux légal et capitalisés à compter du 23 septembre 2014.

Sur le bien-fondé du jugement :

4 Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, (...) tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".

5. Mme L...soutient, en premier lieu, que la responsabilité du CHU de Poitiers est engagée en raison d'une erreur de diagnostic fautive à l'origine du décès de son enfant en l'absence de mise en place d'un traitement anti-reflux sous surveillance hospitalière prolongée et d'exploration de l'hypothèse médicale de syndrome de Münchhausen par procuration.

6. Il résulte toutefois de l'instruction et notamment des rapports d'expertise judiciaire que la prise en charge du jeune Q...A...par le CHU de Poitiers à la suite des malaises dont il était victime pour établir le diagnostic de la pathologie dont il souffrait, notamment par les nombreuses investigations réalisées, qui sont toutes restées négatives, a été diligente, attentive et conforme aux données acquises de la science médicale. En outre, il résulte des constatations effectuées notamment par le DrI..., anatomo-pathologiste, que le décès de l'enfant n'est, en définitive, pas la conséquence d'un reflux gastro-oesophagien, de sorte qu'il ne peut être reproché aux soignants de n'avoir pas mis en oeuvre la poursuite d'un traitement anti-reflux sous surveillance hospitalière à la suite des examens qu'ils avaient réalisés. Les opérations d'expertise n'établissent pas davantage que le décès de Q...A...serait imputable à un syndrome

de Münchhausen par procuration. Son décès ne peut donc être en lien en causalité direct et certain avec la carence, à la supposer même fautive, du service de pédiatrie du CHU à mettre en oeuvre les investigations nécessaires pour identifier un tel syndrome, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

7. Mme L...soutient, en second lieu, que le CHU a commis une faute en ayant fait le choix thérapeutique de laisser son enfant rentrer au domicile familial le 7 juin 2007 sans démarche thérapeutique.

8. Il résulte cependant de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise, que si dans les trois semaines précédant son décès le jeune Q...A...avait présenté de nombreux malaises, il avait, à chaque fois, récupéré sans difficulté notable. Au soir du 7 juin 2007 et après les multiples examens qui avaient été réalisés, les médecins du CHU de Poitiers n'avaient aucun argument pour penser que le pronostic vital de Q...A...était susceptible d'être engagé en raison de son état de santé. Ils ont pu ainsi, en dépit de l'absence de diagnostic précis sur l'origine des malaises et, par conséquent, d'une prescription thérapeutique, évoquer une origine psychique ou psychologique de ses troubles et estimer que le retour de Q...A...au domicile familial permettrait de faire baisser la tension régnant autour de lui. Dans ces conditions, il n'est pas établi qu'ils auraient commis une faute en permettant un tel retour.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme L...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande au motif que la responsabilité du CHU de Poitiers ne pouvait être engagée.

Sur les frais d'expertise :

10. Il y a lieu, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, de laisser à la charge définitive de Mme L...les frais et honoraires d'expertise liquidés et taxés par ordonnance du 21 mars 2014 du président du tribunal administratif de Poitiers à la somme globale de 7 730 euros.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHU de Poitiers, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande Mme L...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme globale de 7 730 euros, sont mis à la charge définitive de MmeL....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...L..., à M. C...A..., au centre hospitalier universitaire de Poitiers, à l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-maritime.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 avril 2019.

Le rapporteur,

Didier E...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX01101


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01101
Date de la décision : 02/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SELARL BIROT - RAVAUT ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-04-02;17bx01101 ?
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