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22/03/2019 | FRANCE | N°18BX04036

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 22 mars 2019, 18BX04036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 9 avril 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802237 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2018

, MmeD..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 9 avril 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802237 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2018, MmeD..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 18 octobre 2018 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 9 avril 2018 ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît l'article 7 bis (b) de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît l'article 6 -5° de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est illégale en ce qu'elle peut se prévaloir d'un titre de séjour de plein droit ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée au sens de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que le jugement du tribunal administratif de Toulouse n'est pas entaché d'erreur de droit, que la prise en charge de Mme D...par ses parents n'est pas suffisamment établie et s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 janvier 2019.

Par ordonnance du 7 décembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 février 2019 à 12h00.

Un mémoire déposé pour Mme D...a été enregistré le 14 février 2019, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme C...pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. B...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeD..., ressortissante algérienne née le 29 août 1996, déclare être entrée en France le 17 octobre 2016 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Le 31 mai 2017, elle a déposé une demande de certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 7 bis (b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté en date du 9 avril 2018, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D...relève appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 24 janvier 2019, Mme D...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 avril 2018 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : (...) b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ".

4. Si Mme D...fait valoir qu'elle était âgée de moins de vingt et un ans à la date de sa demande de titre de séjour, il est constant qu'elle était âgée de plus de vingt et un ans à la date du refus litigieux. Par ailleurs, si Mme D...soutient être à la charge de M. et MmeD..., ressortissants français qui l'ont recueillie par acte de kafala du 30 novembre 1996 et qui ont obtenu la délégation de l'autorité parentale par un jugement du 16 janvier 2014 du tribunal de grande instance de Créteil, les pièces versées au dossier ne permettent pas d'établir qu'ils pourvoient régulièrement à ses besoins faute de justifier des ressources nécessaires à cette fin. Enfin, en tout état de cause, un acte de kafala ne crée aucun lien de filiation et n'emporte, par suite, aucun droit particulier à l'accès de l'enfant sur le territoire français. Par suite, Mme D...ne peut utilement se prévaloir du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Selon l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) ; / 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...). ". Pour l'application des stipulations précitées, le ressortissant qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. Mme D...se prévaut de la présence en France de M. et MmeD..., qui l'ont recueillie par acte de kafala comme indiqué au point précédent, et de celle du fils de ces derniers qui les héberge tous. Cependant, Mme D...est célibataire et sans charge de famille et elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales en Algérie où elle a vécu la majeure partie de sa vie et où elle continue de se rendre comme en attestent les cachets figurant sur son passeport. Par ailleurs, comme indiqué précédemment, contrairement à ce qu'elle soutient, la requérante n'établit pas que M. et MmeD..., qui n'ont pas de ressources propres et qui sont hébergés par leur fils, subviennent à ses besoins. Dans ces conditions, et eu égard à la brève durée de son séjour en France, le refus litigieux n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels il a été opposé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doit être écarté pour les mêmes motifs.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre séjour à l'encontre de celle portant obligation de quitter le territoire français.

8. En deuxième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les motifs énoncés au point 6.

9. En dernier lieu, si Mme D...soutient qu'elle ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement dans la mesure où elle relève d'un cas dans lequel un certificat de résidence doit lui être délivré de plein droit, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qu'elle n'établit pas se trouver dans une telle situation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Mme D...reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 9 avril 2018. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 20 février 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président- assesseur,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mars 2019.

Le rapporteur,

Paul-André B...Le président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX04036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX04036
Date de la décision : 22/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : BENHAMIDA DJAMILA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-22;18bx04036 ?
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