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21/03/2019 | FRANCE | N°17BX02298

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 21 mars 2019, 17BX02298


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La SARL High Pressure Systems a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 novembre 2012, et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1500693 du 22 mai 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juillet 2017 et un mémoire enregistré le 10 avril 2018, la so

ciété High Pressure Systems, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La SARL High Pressure Systems a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 novembre 2012, et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1500693 du 22 mai 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juillet 2017 et un mémoire enregistré le 10 avril 2018, la société High Pressure Systems, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée contestés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les seuls documents concernant la période soumise à vérification ont été présentés au vérificateur lors du contrôle sur place ; le vérificateur n'a pas fait état de l'attestation du 17 février 2013 dans la proposition de rectification, elle n'a été évoquée que dans la réponse aux observations du contribuable du 23 octobre 2013 ; ceci démontre que ce document n'a pas été consulté sur place mais a été obtenu par la suite ;

- le vérificateur devait dès lors user auprès de la société High Pressure Systems de son droit de communication, prévu par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales ;

- elle n'a pas été informée de l'origine de ce document, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; ledit document, obtenu irrégulièrement, ne lui est pas opposable ;

- le véhicule litigieux a été transformé en " dérivé VP " avec seulement deux places à l'avant ; selon les termes de la doctrine exprimée par une réponse Meslot du 6 avril 2010, le dispositif d'expulsion du droit à déduction ne s'applique pas aux véhicules de ce type ; elle est fondée à en demander le bénéfice.

Par des mémoires enregistrés le 11 décembre 2017 et le 11 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la société était en possession de l'attestation du 17 janvier 2013, portée à la connaissance du vérificateur lors des opérations de contrôle sur place ; le vérificateur n'avait pas à exercer un droit de communication auprès de la société High Pressure Systems, qui n'est pas un tiers ; l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ne peut donc être utilement invoqué en l'espèce ;

- les modifications apportées au véhicule n'ont pas eu de caractère irréversible ; ceci est confirmé par l'attestation du 17 janvier 2013 établi par la société Atlantic Auto Concept ; il n'est pas déterminant à cet égard que le véhicule ait été enregistré comme utilitaire au service des Mines ; la réponse Meslot ne tranche pas le cas d'espèce des véhicules modifiés après leur acquisition en tant que véhicule de tourisme, sans perdre irréversiblement leurs caractéristiques d'origine.

Par une ordonnance du 6 décembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 25 janvier 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL High Pressure Systems, qui a pour objet la fabrication d'équipements hydrauliques et pneumatiques de haute pression, a fait l'objet en 2013 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, prolongée jusqu'au 30 novembre 2012 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, le service a notamment remis en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix de la location d'un véhicule. Il en est résulté des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 14 166 euros en droits et pénalités au titre de la période considérée, que la société a contesté en vain. Elle relève appel du jugement du 22 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge de ce rappel.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : L'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dispose : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Aux termes de l'article L. 81 du même livre dans sa rédaction applicable : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées ", et selon l'article L. 83 du livre : " Les administrations de l'Etat (...), les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat (...) ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel (...) ".

3. Si la société requérante allègue que l'attestation établie le 17 janvier 2013 par la société Atlantic Auto Concept, qui fait état de la remise dans son état initial du véhicule BMW immatriculé AG-277-RT, aurait été irrégulièrement obtenue par l'administration postérieurement aux opérations de contrôle sur place menées par le vérificateur, elle se borne à déduire ceci de l'absence de mention expresse de cette attestation dans la proposition de rectification du 14 mai 2013. Or, la réponse aux observations du contribuable en date du 23 octobre 2013, qui évoque cette attestation, précise qu'elle figurait au rang des éléments présentés par le contribuable lui-même lors du contrôle, et cette indication est corroborée par la circonstance qu'elle a été établie à l'attention du gérant de la société High Pressure Systems antérieurement au contrôle. Ainsi, et alors au demeurant que la proposition de rectification mentionnait déjà l'ensemble des éléments de fait fondant la rectification, à savoir que le véhicule a été initialement conçu et immatriculé comme véhicule de particulier et n'a été transformé en utilitaire qu'après la signature du bail de location, il ne résulte nullement de l'instruction que l'attestation du 17 janvier 2013 n'aurait pas été présentée au vérificateur par le contribuable lors des opérations de contrôle. Par suite, les moyens tirés de ce que ce document aurait été obtenu dans des conditions qui imposaient à l'administration de mettre en oeuvre le droit de communication prévu aux articles L. 81 et suivants du livres des procédures fiscales, et d'informer la société High Pressure Systems de son existence en application de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, doivent en tout état de cause être écartés.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I.1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) ". Le 2 de l'article 273 du code prévoit cependant que des décrets en Conseil d'Etat " peuvent édicter des exclusions ou des restrictions et définir des règles particulières, soit pour certains biens ou certains services, soit pour certaines catégories d'entreprises ". Aux termes de l'article 237 de l'annexe II au code général des impôts, pris sur le fondement de ces dernières dispositions : " Les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, qui constituent une immobilisation ou, dans le cas contraire, lorsqu'ils ne sont pas destinés à être revendus à l'état neuf, n'ouvrent pas droit à déduction (...) ". Selon les dispositions de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". Selon les dispositions de l'article 206 de ladite annexe : " (...) / IV - 1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. / 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : / (...) / 6° Pour les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes (...) ".

5. Pour apprécier si un véhicule ou un engin a été conçu pour le transport des personnes ou pour un usage mixte, au sens de ces dispositions, il y a lieu non pas de se référer aux conditions d'utilisation du véhicule mais de rechercher, compte tenu de ses caractéristiques lors de l'acquisition, l'usage auquel il est normalement destiné.

6. Il résulte de l'instruction que la société High Pressure Systems a pris le 5 décembre 2009 en location de longue durée auprès de la société BMW Location un véhicule de type modèle 5 Touring 530d Sport Design de 235 cv, doté d'un certain nombre d'options (finitions " sport ", sellerie cuir, toit ouvrant panoramique...). Ce véhicule, immatriculé le 7 décembre 2009 en tant que véhicule de particulier (VP), a fait l'objet le 8 décembre d'une transformation par un carrossier, visant, notamment par la suppression de la banquette arrière et la mise en place d'un plancher plat, à en faire un véhicule de type véhicule de société/utilitaire. Une nouvelle carte grise a ainsi été établie le 14 janvier 2010 avec la codification " Derivé VP ", au regard de laquelle la société High Pressure Systems a déduit mensuellement la taxe sur la valeur ajoutée grevant les loyers dont elle s'acquittait. Toutefois, les modifications apportées à ce véhicule postérieurement à la date de conclusion du bail ne présentent pas un caractère irréversible et n'ont pas eu pour effet de le rendre incompatible avec le transport de personnes, compte tenu notamment de ses finitions, de son confort et de ses équipements. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le bénéfice de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les loyers a été refusé à la société High Pressure Systems sur le fondement de la loi fiscale.

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

8. La société requérante se prévaut, sur le fondement des dispositions qui précèdent, de la réponse du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, publiée au Journal officiel le 6 avril 2010 à la question n° 58198 du député Damien Meslot, publiée au Journal officiel le 15 septembre 2009 et applicable en l'espèce, selon laquelle : " En application des dispositions de l'article 206-IV-2-6° de l'annexe II au code général des impôts, la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux véhicules ou engins conçus pour le transport de personnes ou à usage mixte est exclue du droit à déduction. (...) Par ailleurs, si le dispositif d'exclusion ne s'applique pas aux véhicules dits " dérivés VP " qui ne comportent que deux places, il ne s'applique également pas aux véhicules qui comportent, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises, et qui sont utilisés par l'entreprise pour amener son personnel sur les lieux de travail (...) ". Toutefois, cette réponse, qui précise que le droit à déduction en faveur des véhicules conçus pour un usage professionnel concerne non seulement ceux de type camionnette à deux places mais aussi ceux destinés au transport de personnel, n'a ni pour objet ni pour effet d'étendre ce droit aux véhicules autres que ceux configurés dès l'origine pour un tel usage. A cet égard, la doctrine invoquée ne comporte donc aucune interprétation du texte fiscal dont la société High Pressure Systems pourrait utilement se prévaloir.

9. Il résulte de ce qui précède que la société High Pressure Systems n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la société High Pressure System tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge titre des frais d'instance qu'elle a exposés doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société High Pressure Systems est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société High Pressure Systems et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 21 février 2019, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 mars 2019.

Le rapporteur,

Laurent POUGET Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 17BX02298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02298
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET DOMINIQUE RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-21;17bx02298 ?
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