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08/08/2018 | FRANCE | N°18BX01631

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 08 août 2018, 18BX01631


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n°1701737 du 22 mars 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en production d

e pièces, enregistrés respectivement le 23 avril 2018 et le 9 mai 2018, MmeA..., représentée par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n°1701737 du 22 mars 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés respectivement le 23 avril 2018 et le 9 mai 2018, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 22 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 2 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " ou " étudiant ", dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure : la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;

- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation : elle justifie du caractère réel et sérieux de ses études dès lors qu'elle est scolarisée en France depuis 2015 où elle a obtenu un brevet d'étude professionnel et qu'elle est actuellement en classe de terminale ; en outre, elle justifie de ressources suffisantes dès lors qu'elle est boursière et réside chez son oncle par qui elle est prise en charge ;

- le tribunal n'a pas statué sur le refus opposé à sa demande de titre de séjour " étudiant " ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : elle justifie d'attaches familiales en France où elle résident depuis 2014 ainsi que plusieurs membres de sa famille dont ses parents et ses frères et soeurs et dont une est de nationalité française ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée des mêmes vices de légalité externe et interne que ceux invoqués à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée des mêmes vices de légalité interne que ceux invoqués à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2018, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 25 juin 2018 à 12h00.

Par décision du 13 juin 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de MmeA....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et le protocole annexé au premier avenant de l'accord ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

- le rapport de Mme Sylvande Perdu a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...A..., ressortissante algérienne née le 19 septembre 1998 est entrée en France le 22 décembre 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Le 25 juillet 2016, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " ainsi qu'un certificat de résidence portant la mention " étudiant ". Par un arrêté du 2 novembre 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée. Mme A...relève appel du jugement du

22 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. A supposer même que Mme A...ait entendu critiquer la régularité du jugement attaqué au motif qu'il aurait omis de statuer sur le bien-fondé du rejet de sa demande de titre de séjour " étudiant ", il ressort des termes mêmes de ce jugement qu'il a confirmé la légalité de ce refus de titre de séjour en se fondant sur la circonstance que l'intéressée n'était pas titulaire d'un visa de long séjour. Le tribunal a ainsi estimé que

" quand bien même la requérante justifierait du caractère sérieux de ses études et disposer de moyens d'existence suffisants, c'est sans méconnaître les stipulations précitées de l'accord franco-algérien que le préfet de la Haute-Vienne a refusé de délivrer à l'intéressée le titre de séjour étudiant sollicité en l'absence de présentation d'un visa de long séjour ". En conséquence, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, Mme A...reprend en appel, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut de saisine de la commission du titre de séjour. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

4. En deuxième lieu, aux termes du titre III du protocole annexé à l'accord

franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire ". (...). ". Ces dispositions permettent à l'administration d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies. Aux termes de l'article 9 de cet accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre (...) du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...). ".

5. Mme A...n'établit ni même n'allègue avoir été en possession d'un visa d'une durée supérieure à trois mois à laquelle la délivrance d'un certificat de résidence " étudiant " est, en principe, subordonnée en vertu des stipulations précitées. Dès lors, le préfet de la Haute-Vienne a pu légalement, pour ce seul motif, refuser la délivrance du certificat de résidence portant la mention " étudiant " qu'elle avait sollicité.

6. En troisième et dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...). ". En vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Mme A...soutient qu'elle vit en France depuis 2014 où elle est scolarisée en classe de terminale et où résident de nombreux membres de sa famille, notamment ses parents et frères et soeurs, dont une a la nationalité française. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les parents de l'intéressée sont, comme elle, en situation irrégulière et se sont vus également opposer un refus de titre de séjour. En outre, MmeA..., qui est célibataire et sans enfant, n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge 16 ans et où, d'ailleurs, rien ne s'oppose à ce qu'elle poursuive ses études. Dans ces conditions, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé et celles de

l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Mme A...déclare " reprendre à l'encontre de la décision litigieuse les mêmes moyens de légalité externe et interne que ceux invoqués à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ". Pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 3 à 7 du présent arrêt, ces moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

9. La décision fixant le pays de renvoi vise les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquelles elle a été prise ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, elle indique que l'intéressée, qui ne démontre ni n'allègue être exposée personnellement à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, peut être éloignée à destination du pays dont elle a la nationalité ou qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ou encore à destination de tout autre pays où elle établit être légalement admissible. Par suite, elle est suffisamment motivée.

10. Si Mme A...soutient que la décision fixant le pays de destination est entachée des mêmes vices de légalité interne que le refus de séjour, ces moyens doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 à 7 du présent arrêt.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 août 2018.

Le rapporteur,

Sylvande Perdu

Le président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N°18BX01631


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18BX01631
Date de la décision : 08/08/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Sylvande PERDU
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : DUPONTEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 21/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-08-08;18bx01631 ?
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