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08/08/2018 | FRANCE | N°16BX01084

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 08 août 2018, 16BX01084


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Distrivit a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 mars 2010.

Par un jugement n°1301462, 1301463 du 4 février 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et u

n mémoire, enregistrés les 1er avril 2016 et 17 janvier 2017, la société Distrivit, représentée par Me B...et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Distrivit a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 mars 2010.

Par un jugement n°1301462, 1301463 du 4 février 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er avril 2016 et 17 janvier 2017, la société Distrivit, représentée par Me B...et MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 4 février 2016 ;

2°) d'annuler les avis de compensation en date du 28 février 2013 ;

3°) de prononcer la décharge des rappels et taxe sur la valeur ajoutée et intérêts de retard mis à sa charge à hauteur de 872 345 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il convient de faire une distinction entre sa qualité d'importateur, au titre de laquelle elle acquitte et déduit la taxe sur la valeur ajoutée à l'importation, et sa qualité de revendeur de tabacs au titre de laquelle elle est dispensée de collecter la taxe sur la valeur ajoutée en application de la doctrine et de la jurisprudence ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne sont fondés sur aucune disposition législative ou réglementaire ; en application de l'article 298 quaterdecies et 294 du code général des impôts, les importations de tabacs dans les départements d'outre-mer sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les opérateurs lors de l'importation de tabacs manufacturés est déductible conformément à l'article 298 quindecies du code général des impôts ; en revanche, en application de l'article 298 sexdecies, les marges commerciales postérieures à la fabrication ou à l'importation demeurent exclues de la taxe sur la valeur ajoutée et selon l'instruction fiscale 3 G-261 du 1er septembre 1998, les négociants grossistes, dépositaires, détaillants ou débitants qui opèrent la distribution des tabacs ne doivent pas être recherchés en paiement de la taxe; cette instruction garantit l'absence totale de taxe sur la valeur ajoutée sur les reventes postérieures aux importations ; toute interprétation contraire reviendrait à méconnaître les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; cette lecture est celle retenue en Martinique ; sauf à méconnaître les principes de confiance légitime et de sécurité juridique, l'administration, qui n'a jamais remis en cause l'absence de taxation, ne peut adopter à présent une position différente ;

- la détermination par l'administration d'un prix de revient des marchandises sur la base des documents d'importation, qui aurait pour but de prendre en compte le fait que les marges commerciales postérieures à la fabrication et à l'importation sont exclues de la taxe sur la valeur ajoutée, est dépourvue de toute base légale ; admettre le contraire reviendrait pour le législateur à méconnaître la compétence qui lui est dévolue par l'article 34 de la constitution ; l'article

298 sexdecies ne précise ni le fait générateur ni l'assiette et la notion de marge commerciale ne fait l'objet d'aucune définition légale ; aucune disposition du code général des impôts ne renvoie à la définition de la notion de marge commerciale retenue par l'Autorité des normes comptables ; dans le silence de la loi, elle ne pouvait que se référer à la doctrine de l'administration, opposable sur le fondement de l'article L. 80A du livre des procédures fiscales ;

- elle se trouve dans une situation en tous points identiques à celle de la société Somaf dont le tribunal administratif a eu à connaître dans l'affaire n° 1200417 du 24 avril 2015 et ne peut ainsi être tenue d'une quelconque collecte de taxe sur la valeur ajoutée sur les reventes de tabacs manufacturés ;

- le tribunal administratif a considéré à tort que la doctrine précitée, qui prévoit la non imposition des négociants, ne serait applicable qu'à la condition que les importateurs-négociants n'exercent pas leur droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; la jurisprudence du Conseil d'Etat (Distrivit) a validé la déduction de taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les opérateurs à l'importation des tabacs manufacturés alors même que les ventes subséquentes de l'importateur aux distributeurs n'avaient pas été soumises à la taxe sur la valeur ajoutée en application de la doctrine administrative référencée 3G-261; la haute juridiction confirme ainsi le principe dégagé par sa décision n° 2049 du 3 novembre 1978, Sté touristique et hôtelière de Divonne-les-Bains.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 octobre 2016 et 18 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les requêtes présentées devant le tribunal administratif, et par suite, la requête d'appel sont irrecevables en l'absence de réclamation préalable ; une fin de non-recevoir avait été opposée en première instance ; or, le tribunal n'a pas statué sur cette fin de non-recevoir ; par suite, le jugement est irrégulier ;

- par l'instruction dont se prévaut la requérante, l'administration n'a pas renoncé à percevoir la taxe sur les ventes de tabacs ; elle a seulement subordonné la non-perception de taxe sur la valeur ajoutée à la renonciation par les redevables de leur droit à déduction correspondant ; à défaut, elle est en droit, non pas de remettre en cause le droit à déduction pratiquée, mais de procéder au rappel de la taxe sur la valeur ajoutée collectée à tort ;

- en faisant valoir son droit à déduction en amont, lors de sa demande de remboursement, la société requérante a entendu expressément se placer sur le terrain de la loi fiscale et ne plus se conformer à l'instruction 3 G-261 ; dès lors qu'elle n'en remplit plus les conditions, la société requérante ne saurait invoquer la doctrine administrative ;

- la dispense de fait de la taxe prévue par la doctrine administrative, à laquelle en tout état de cause la requérante a entendu renoncer, ne saurait faire obstacle à la taxation des opérations légalement passibles de la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article

298 quaterdecies du code général des impôts ;

- le jugement rendu par le tribunal administratif de la Guadeloupe (n° 1200417, SAS Somaf) dont se prévaut la requérante fait l'objet d'un recours devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ;

- l'administration a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée les opérations de vente de tabacs réalisés par la société requérante en application des dispositions combinées des articles 298 quaterdecies et 298 sexdecies du code général des impôts ; pour tenir compte de l'exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée des marges commerciales postérieures à l'exportation, le service a retenu comme base d'imposition un prix de revient des marchandises tel qu'il ressortait des documents d'importation ;

- la notion de marge commerciale a été précisée par l'autorité de normes comptables ; l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux opérations portant sur les tabacs manufacturés est ainsi définie précisément ;

- la requérante ne conteste plus la régularité des avis de compensation du 28 février 2013 ;

- l'administration était en droit de procéder à la compensation entre les droits à déduction de la société et les insuffisances constatées en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée.

Par ordonnance du 18 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au

29 janvier 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marianne Pouget,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la SAS Distrivit, et de M.C..., représentant le ministre de 'laction et des comptes publics.

Une note en délibéré présentée par la SAS Distrivit a été enregistrée le 27 juin 2018.

Considérant ce qui suit :

1. La société Distrivit exploite une activité de commerce de gros de produits à base de tabacs et à ce titre importe du tabac en Guadeloupe et le revend à des distributeurs locaux. A la suite d'un contrôle sur pièces portant sur la TVA afférente à la période du 1er janvier 2010 au

31 décembre 2010, l'administration lui a notifié, par proposition de rectification du 14 septembre 2012, des rappels de la TVA collectée sur ses opérations de vente de tabacs pour un montant de 968 617 euros. Compte tenu du crédit de TVA d'un montant de 160 890 euros constaté par la société au 31 décembre 2010, le montant des droits mis en recouvrement a été fixé à

872 345 euros en droits et pénalités. Par lettre du 28 février 2013, le service des impôts a notifié à la société un avis de compensation lui indiquant que la créance qu'elle détenait sur l'Etat d'un montant de 798 818 euros, correspondant à un crédit de taxe, avait été, en application de l'article L. 257 B du livre des procédures fiscales, employé à l'apurement de sa dette fiscale de

872 345 euros et qu'elle restait par conséquent débitrice d'une somme de 73 527 euros. Par une deuxième lettre du 28 février 2013, le service l'a informée de la compensation opérée entre la dette de 73 527 euros et une créance globale de 130 973 euros résultant du remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée afférent au mois de septembre 2012 et, par suite, d'un reliquat de créance de 57 446 euros.

2. La société Distrivit a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe de deux requêtes tendant à des avis de compensation émis le 28 février 2013 et à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour un montant de 872 345 euros. Par un jugement n° 1301462, 1301463 du 4 février 2016, dont la société Distrivit relève appel, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses demandes.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

3. Aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial selon le cas, de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition.(...) ". Aux termes de l'article L. 199 du même livre : " En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif ". Aux termes de l'article R. 199-1 dudit livre : " L'action peut être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation ou, si le contribuable n'a pas reçu la décision de l'administration, dans le délai de six mois suivant la date de présentation de sa réclamation ". Ces dispositions font obstacle à la recevabilité, devant le tribunal administratif, d'une demande qui n'a pas été précédée d'une réclamation à l'administration.

4. Il résulte de l'instruction que la société Distrivit n'a présenté à l'administration aucune réclamation contentieuse contestant les avis de compensation et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige. Par suite, ses demandes en annulation de ces avis et en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sont irrecevables ainsi que le soutenait l'administration fiscale devant le tribunal administratif de la Guadeloupe. La société requérante n'est, dès lors, pas fondée à se plaindre de ce que ce tribunal a rejeté ces demandes.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Distrivit demande au titre des frais qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Distrivit est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Distrivit et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera délivrée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 3 juillet à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 août 2018.

Le rapporteur,

Marianne Pouget

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics. en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 16BX01084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01084
Date de la décision : 08/08/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : FIDAL - DIRECTION INTERNATIONALE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-08-08;16bx01084 ?
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