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28/06/2018 | FRANCE | N°16BX01083

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 28 juin 2018, 16BX01083


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2013 par lequel le président du syndicat intercommunal de la piscine Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre a prononcé sa révocation.

Par un jugement n° 1400325 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il rétroagit au 1er novembre 2009 et a enjoint au syndicat intercommunal Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre de procéder à la régularisation de la situation de M. C..

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Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2013 par lequel le président du syndicat intercommunal de la piscine Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre a prononcé sa révocation.

Par un jugement n° 1400325 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il rétroagit au 1er novembre 2009 et a enjoint au syndicat intercommunal Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre de procéder à la régularisation de la situation de M. C...au regard de la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension, pour la période du 1er novembre 2009 au 19 novembre 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 mars 2016, le syndicat intercommunal Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre, représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe ;

2°) de rejeter dans son ensemble la demande présentée devant le tribunal par M. C... ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la sanction de révocation est parfaitement fondée, légitime et justifiée au regard des faits qui la fondent ;

- M. C...a reconnu les faits qui lui sont reprochés et pour lesquels il a été condamné par le juge répressif ;

- il n'a pas remboursé les sommes détournées.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2016, M.C..., représenté par la société d'avocats Ezelin Dione, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 21 janvier 2016 en tant que celui-ci a limité dans la durée l'annulation de l'arrêté contesté du 19 novembre 2013 ; il demande également qu'une somme de 3 600 euros soit mise à la charge du syndicat intercommunal Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a toujours donné satisfaction à son employeur, ainsi qu'en témoignent ses évaluations ;

- son épouse a été affectée par une maladie nécessitant des soins constants et des déplacements fréquents en métropole ; c'est pour faire face à ces charges nouvelles et particulières qu'il a été amené à commettre les détournements qui lui sont reprochés ;

- le conseil de discipline proposait une sanction d'exclusion temporaire de six mois ; la sanction finalement prononcée est excessive ;

- le tribunal administratif de la Guadeloupe a d'ailleurs annulé la décision du conseil de discipline de recours proposant la sanction de révocation ;

- c'est à bon droit que le tribunal a par ailleurs sanctionné une rétroactivité illégale de l'arrêté du 19 novembre 2013 ;

- la décision de révocation n'a pas été prise par l'autorité compétente ; en effet, seul le président du syndicat intercommunal était compétent, sans possibilité de délégation ;

- par ailleurs, dès lors que la décision du conseil de discipline de recours était illégale, l'autorité disposant du pouvoir de sanction ne pouvait maintenir sa décision sans méconnaître les garanties de l'agent ; elle devait saisir de nouveau le conseil de discipline ;

- les effets de cette irrégularité vont au-delà d'une annulation limitée dans le temps ; elle emporte l'annulation totale de l'arrêté contesté.

Par une ordonnance du 3 août 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 septembre 2017 à 12 heures.

Par un mémoire enregistré le 15 septembre 2017, le syndicat intercommunal Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre confirme ses précédentes écritures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., qui exerçait les fonctions de régisseur de recettes au sein du syndicat intercommunal de la piscine Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre (SIPGAP), a été reconnu coupable de détournements de fonds au préjudice dudit syndicat par un jugement définitif du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre du 10 juin 2008, et condamné pénalement de ce chef. Par un arrêté du 26 octobre 2009, le président du SIPGAP a prononcé sa révocation à compter du 1er novembre 2009. La cour administrative d'appel de Bordeaux, par un arrêt n° 12BX02349 du 30 septembre 2013, a toutefois annulé cet arrêté au motif de la méconnaissance par son auteur de l'étendue de sa compétence, celui-ci s'étant estimé lié par une délibération du conseil d'administration du syndicat intercommunal. Le président du SIPGAP a en conséquence pris le 19 novembre 2013 un nouvel arrêté de révocation de M.C..., toujours à compter du 1er novembre 2009. Saisi par M.C..., le tribunal administratif de la Guadeloupe, par un jugement du 21 janvier 2016, a annulé cet arrêté du 19 novembre 2013 en tant qu'il rétroagit, et a ordonné en conséquence au SIPGAP de régulariser la situation de l'agent pour la période du 1er novembre 2009 au 19 novembre 2013. Le syndicat intercommunal relève appel de cette annulation partielle de l'arrêté litigieux et de l'injonction qui lui est faite par le jugement. Par la voie de l'appel incident, M. C...sollicite l'annulation complète de l'arrêté du 19 novembre 2013 et demande la reconstitution de sa carrière jusqu'à la date du présent arrêt.

Sur l'appel principal :

2. En se bornant à faire valoir que la sanction de révocation est justifiée et n'est pas disproportionnée au regard des faits reprochés à M.C..., le SIPGAP ne critique pas utilement l'analyse du tribunal, au demeurant fondée, selon laquelle l'arrêté contesté du 19 novembre 2013, en vertu du principe de non-rétroactivité des actes administratifs, ne pouvait prendre effet à compter du 1er novembre 2009, ni la conséquence qu'en ont tiré les premiers juges quant à la nécessité pour l'autorité administrative de procéder à la régularisation de la situation administrative de l'agent au titre de la période du 1er novembre 2009 au 19 novembre 2013, s'agissant notamment de la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension.

Sur l'appel incident :

3. Lorsque le juge administratif annule une sanction infligée à un agent public, puis que l'autorité administrative édicte une nouvelle sanction à raison des mêmes faits, elle n'est pas tenue d'inviter l'intéressé à prendre à nouveau connaissance de son dossier ni de saisir à nouveau le conseil de discipline compétent dès lors que ces formalités ont été régulièrement accomplies avant l'intervention de la première sanction. En l'occurrence, le précédent arrêt de la cour en date du 30 septembre 2013, devenu définitif, a annulé la première sanction prise contre M. C... au seul motif d'une méconnaissance par l'autorité disciplinaire du champ de sa compétence. Il n'a censuré aucune irrégularité dans la procédure préalable à l'intervention de cette sanction. La seconde décision lui infligeant une sanction à raison des faits ayant donné lieu à la sanction annulée n'avait, dès lors, pas à être précédée d'une nouvelle procédure de consultation de l'instance paritaire compétente. Par ailleurs, la circonstance que, par un jugement définitif du 22 mai 2012, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'avis rendu le 21 septembre 2010 par le conseil de discipline de recours en faveur de la sanction de révocation, n'a pas eu pour effet de vicier la procédure disciplinaire dès lors que M. C...conservait la possibilité de saisir de nouveau ce conseil de recours.

4. A supposer que M. C...entende invoquer devant la cour un moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction prononcée à son encontre, un tel moyen doit être écarté. Il ressort en effet des pièces du dossier qu'il s'est livré, entre 2001 et avril 2007 à des détournements de fonds au préjudice de son employeur, pour lesquels il a été définitivement condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis, à dix-huit mois de mise à l'épreuve et au paiement d'une indemnité de 43 600 euros. Si M. C...allègue qu'il n'avait d'autre moyen de faire face aux dépenses de soins nécessitées par l'état de santé de son épouse, les faits considérés, qui sont matériellement établis, constituent indéniablement une faute de nature à justifier une sanction et, au regard de leur gravité et de leur caractère répété sur une longue période de temps, alors au surplus que l'intéressé était précisément en charge de veiller à la sincérité des comptes du syndicat intercommunal et à la bonne gestion des deniers publics, la sanction de révocation retenue par l'autorité administrative n'apparaît pas disproportionnée.

5. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que le SIPGAP n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l'arrêté contesté en tant qu'il rétroagit et lui a enjoint de régulariser dans cette mesure la situation administrative de M. C...et, d'autre part, que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que ce même jugement a limité les effets de l'annulation prononcée à la période du 1er novembre 2009 au 19 novembre 2013.

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du SIPGAP et les conclusions d'appel incident de M. C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat intercommunal de la piscine Abymes-Gosier-Pointe-à-Pitre et à M. B... C....

Copie en sera adressée au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 juin 2018.

Le rapporteur,

Laurent POUGETLe président,

Aymard de MALAFOSSELe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 16BX01083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01083
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative - Non rétroactivité des actes administratifs.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DEPORCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-28;16bx01083 ?
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