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22/06/2018 | FRANCE | N°16BX01616

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 22 juin 2018, 16BX01616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...E...ont demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils sont été assujettis au titre de l'année 2009, au titre des réductions d'impôt pour des investissements réalisés en outre-mer.

Par un jugement n° 1400608 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2016 et un mémoire

complémentaire, enregistré le 24 juin 2016, M. et MmeE..., représentés par MeA..., demandent à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...E...ont demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils sont été assujettis au titre de l'année 2009, au titre des réductions d'impôt pour des investissements réalisés en outre-mer.

Par un jugement n° 1400608 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2016 et un mémoire complémentaire, enregistré le 24 juin 2016, M. et MmeE..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 10 mars 2016 et de prononcer la réduction de l'imposition en litige ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la souscription au capital de la société civile immobilière Beauville Daniel pour un montant de 138 000 euros est établie : la somme de 89 700 euros non prise en compte par l'administration correspondant à deux prêts à titre gratuit consentis à Mme E...par le locataire, M. C...(qui bénéficiait ainsi d'une créance à valoir sur les loyers) et par la société Nordy (associé à la société Beauville) ; la décision collective unanime des associés du

22 décembre 2007 confirme le versement des sommes nécessaires à l'augmentation de capital ;

- l'origine des fonds est sans incidence à cet égard, ainsi que le précise l'instruction

5 B-1-06 du 9 janvier 2006, confirmée par la doctrine BOI-IR-RICI-80-20-10 n° 170 ;

- par ailleurs, ils sont éligibles à la réduction d'impôt au titre de l'investissement réalisé par le biais des sociétés en participation ; en application de l'article 199 undecies B et du II de l'article 95 de son annexe II, le fait générateur de cette réduction est la date de livraison effective du bien dans le département d'outre-mer ; en tout état de cause, contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal, une demande de raccordement de la centrale photovoltaïque au réseau d'EDF avait été déposée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- aucun moyen n'est soulevé à l'encontre de la reprise de réduction d'impôts afférente aux travaux de réhabilitation de la maison n° 1 (1 493 euros en litige) de sorte que les conclusions tendant à obtenir la décharge des impositions restant à la charge des requérants sont, sur ce point, irrecevables et doivent être rejetées ;

- en ce qui concerne le bénéfice de la réduction d'impôt sur le revenu prévu par l'article 199 undecies A du code général des impôts et la réalité de la souscription au capital de la

SCI Beauville : aucune justification n'est apportée du versement du solde de souscription de

89 700 euros ; c'est à bon droit que seul le versement justifié de la somme de 48 300 euros a été pris en compte ;

- en ce qui concerne la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B : les conditions pour en bénéficier ne sont pas réunies.

Par ordonnance du 20 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 20 avril 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvande Perdu,

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauzies, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E...ont demandé le bénéfice de réductions d'impôt pour investissements en outre-mer dans le secteur du logement, prévu par l'article 199 undecies A du code général des impôts, pour un montant de 37 390 euros, et dans le cadre d'une entreprise, pour un montant de 78 005 euros, correspondant à la souscription au capital de sociétés en participation (SEP) en vue de bénéficier de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts. Par décision du 16 juin 2014, le service a admis partiellement leur demande en limitant toutefois la réduction d'impôts sollicitée dans le secteur du logement à

26 209 euros et celle dans le cadre d'une entreprise à 52 003 euros. M. et Mme E...interjettent appel du jugement du 14 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur requête tendant à obtenir la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils sont restés assujettis au titre de l'année 2009 après admission partielle de leur réclamation.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne la réduction d'impôt sollicitée au titre de l'article 199 undecies A :

2. Aux termes de l'article 199 undecies A du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements d'outre-mer (...) entre la date de promulgation de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer et le 31 décembre 2017 / 2. La réduction d'impôt s'applique : (...) / c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les départements, territoires ou collectivités visés au 1 et qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Ces sociétés doivent s'engager à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts ou actions pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles ; (...) 6. La réduction d'impôt est effectuée, pour les investissements mentionnés au a du 2, pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, et des neuf années suivantes. Pour les investissements visés aux b, c, d, f, g et h du 2, elle est effectuée pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, ou de la souscription des parts ou actions, et des quatre années suivantes. Pour les investissements visés au e, elle est effectuée pour le calcul dû au titre de l'année d'achèvement des travaux de réhabilitation et des quatre années suivantes. Chaque année, la base de la réduction est égale, (...) pour les investissements visés aux b, c, d, e, f, g et h du 2, à 20 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le droit à réduction d'impôt est né (...) 7. En cas de non-respect des engagements mentionnés aux 2 et 6, ou de cession ou de démembrement du droit de propriété, dans des situations autres que celle prévue au 3, de l'immeuble ou des parts et titres, ou de non-respect de leur objet exclusif par les sociétés concernées, ou de dissolution de ces sociétés, la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année où interviennent les événements précités." .

3. Il résulte de l'instruction que la société civile immobilière Beauville Daniel a acquis un terrain à bâtir sur le territoire de la commune de Ducos afin d'y construire une villa. A cette fin, la SCI a procédé à une augmentation de capital le 22 décembre 2007. Dans leur réclamation en date du 18 octobre 2010, les contribuables ont demandé la prise en compte de l'intégralité de leur souscription au capital de la SCI en 2007 d'un montant de 138 000 euros et le bénéfice subséquent de la réduction d'impôts qu'ils avaient omis de reporter dans leur déclaration de revenus souscrite au titre de l'année 2009.

4. L'administration a considéré, comme elle l'avait fait dans le cadre de la remise en cause de la réduction d'impôt à laquelle les contribuables prétendaient avoir droit à ce titre au titre des années 2007 et 2008, que seul le versement de la somme de 48 300 euros par

Mme E...était justifié et que, par suite, une réduction d'impôt à hauteur seulement de

5 216 euros pouvait être accordée sur le fondement des dispositions précitées de l'article

199 undecies A du code général des impôts.

5. Pour justifier de la réalité du complément de souscription en litige d'un montant de 89 700 euros, les requérants font valoir que la société Nordy Gest, associée de la SCI Beauville Daniel, aurait versé sur le compte de la SCI une somme de 152 575 euros correspondant à hauteur de 89 700 euros à un prêt consenti à Mme E...par le locataire de la maison à réaliser, M.C..., garanti par un nantissement des parts de la SCI en faveur de ce dernier. Toutefois, s'il est vrai que la société Nordy Gest a opéré un virement de 152 575 euros sur le compte de la SCI, il n'est pas établi qu'une partie de cette somme aurait été versée pour le compte de MmeE.... En effet, le contrat de prêt à titre gratuit entre MmeE..., la SCI et le locataire dont se prévalent les requérants n'est ni daté ni enregistré et mentionne un crédit de 111 000 euros dont rien ne stipule pour quel montant il est attribué à Mme E...dès lors que le crédit est globalement accordé à cette dernière et à un autre particulier également investisseur. Le contrat porte en outre la signature qui serait celle de M.D..., gérant de la SCI, sans qu'aucun mandat de représentation de Mme E...ne soit mentionné. Les requérants produisent encore la copie d'un second contrat de prêt à titre gratuit signé entre MmeE..., la société Nordy Gest et la SCI daté du 22 décembre 2007, mais sans produire le contrat complet et cette pièce n'indique pas le montant sur lequel porte le prêt.

6. Ainsi, par les éléments qu'ils fournissent, et quand bien même l'origine des fonds dont a disposé Mme E...n'a pas d'incidence sur la validité et l'existence de la souscription, les requérants ne justifient pas avoir versé la somme de 89 700 euros correspondant au solde de la souscription au capital de la société. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a refusé de leur accorder la réduction d'impôt que les contribuables sollicitaient pour le montant de la souscription ayant excédé 48 300 euros.

7. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir sur le fondement de l'article

L. 80 A précité du livre des procédures fiscales des dispositions du 156 de l'instruction 5 B-1-06 du 9 janvier 2006 qui ne donne pas de l'article 199 undecies A du code général des impôts une interprétation différente de celle dont il a été fait application.

En ce qui concerne la réduction d'impôt sollicitée au titre de l'article 199 undecies B du code général des impôts :

8. Aux termes de l'article 199 undecies B applicable aux faits en litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...), dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. / (...) La réduction d'impôt est de 50 % du montant hors taxes des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique. (...) / Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 (...), dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. / La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. / (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions mentionnées aux quatorzième à dix-septième alinéas du I de l'article 217 undecies sont remplies et si 60 % de la réduction d'impôt sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme de diminution du loyer et du prix de cession du bien à l'exploitant. Ce taux est ramené à 50 % pour les investissements dont le montant par programme et par exercice est inférieur à 300 000 euros par exploitant. (...)". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II à ce code dans sa rédaction applicable à l'année litigieuse : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article, au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...). ".

9. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. En ce qui concerne l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés en nom collectif (SNC) en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.

10. Il résulte de l'instruction que l'exercice, par l'administration, de son droit de communication auprès d'EDF à l'occasion de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société Sun Sep 9 dont Mme E...est associée, a révélé que la centrale photovoltaïque au titre de laquelle a été pratiquée la réduction d'impôt litigieuse n'avait pas fait l'objet d'un raccordement électrique. Le service a d'ailleurs précisé que l'installation photovoltaïque en cause n'a pas été mise en service avant le 20 mars 2011.

11. Par suite, en ayant relevé l'absence de raccordement au cours de l'année au titre de laquelle l'avantage fiscal avait été demandé et en constatant et en ayant refusé pour ce motif la réduction d'impôt sollicitée par les requérants au titre de l'imposition de leurs revenus de 2009, l'administration n'a pas ajouté de critères particuliers aux conditions fixées par la loi et la réglementation mais s'est bornée à mettre en oeuvre les conditions légales auxquelles les investissements effectués devaient satisfaire pour pouvoir être regardés comme réalisés au sens et pour l'application des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme E...ne sont pas fondés à contester le jugement par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. et Mme E...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. et Mme E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.et Mme B...E...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2018 à laquelle siégeaient :

Philippe Pouzoulet, président,

Marianne Pouget, président-assesseur,

Sylvande Perdu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 juin 2018.

Le rapporteur,

Sylvande Perdu

Le président,

Philippe Pouzoulet Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 16BX01616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01616
Date de la décision : 22/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Sylvande PERDU
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SIMON ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-22;16bx01616 ?
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