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24/05/2018 | FRANCE | N°16BX00831

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 24 mai 2018, 16BX00831


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de la Martinique de leur accorder la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1500234 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mars 2016, M. et MmeC..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1500234 d

u 31 décembre 2015 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de leur accorder la décharge des im...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de la Martinique de leur accorder la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1500234 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mars 2016, M. et MmeC..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1500234 du 31 décembre 2015 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de leur accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal administratif n'a pas analysé dans son jugement le moyen tiré de l'opposabilité à l'administration, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 225 de l'instruction 5 B-1-06 ;

- en vertu du 7 de l'article 199 undecies A du code général des impôts, la reprise des réductions d'impôt 2008 et 2009 en tant qu'elle est fondée sur le non-respect de l'engagement de réaliser les fondations de l'immeuble dans un délai de deux ans à compter de la souscription au capital de la SCI Kafecail devait nécessairement intervenir au titre de l'année 2007 ; dès lors, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le délai de reprise de l'administration expirait le 31 décembre 2010, de sorte que la proposition de rectification du 12 décembre 2011 est intervenue après cette expiration ;

- en vertu du paragraphe 225 de l'instruction 5 B-1-06, qui est opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la réduction d'impôt dont a bénéficié le contribuable au titre de l'article 199 undecies A doit faire l'objet d'une reprise au titre de l'année de rupture de l'engagement ;

- contrairement à ce qu'a estimé le service, la cession en 2008 d'une des deux parcelles du terrain, vendue par la SCI à un prix inférieur au prix d'acquisition, n'a pas constitué une rupture de la condition tenant à l'objet réel exclusif de la société bénéficiaire de l'apport.

Par un mémoire enregistré le 19 août 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués dans la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 31 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 2 juin 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aymard de Malafosse,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C...ont souscrit, en décembre 2005, au capital de la SCI Kafecail, qu'ils ont créée entre eux, et dont l'objet social est, selon ses statuts, la construction de logements neufs en outre-mer pour des locations à des personnes qui en font leur résidence principale. Du fait de cette souscription, ils ont bénéficié, sur le fondement des dispositions du c) du 2 de l'article 199 undecies A du code général des impôts, de réductions d'impôt pour les années 2005 à 2009. L'administration a estimé, d'une part, que l'engagement d'achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de la souscription, soit avant le 31 décembre 2007, n'avait pas été respecté, d'autre part, que la société n'avait pas eu pour objet réel et exclusif de construire des logements neufs en vue d'une location nue à des personnes qui en font leur habitation principale puisqu'elle avait vendu une parcelle en 2008. Une proposition de rectification du 12 décembre 2011 a ainsi informé les contribuables de l'intention de l'administration de remettre en cause l'ensemble des réductions d'impôt pratiquées. Finalement, l'administration a renoncé, pour cause de prescription, à remettre en cause les réductions pratiquées au titre des années 2005 à 2007. M. et Mme C...qui ont ainsi été assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des seules années 2008 et 2009 font appel du jugement par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande à fin de décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Ainsi que le relèvent à juste titre les requérants, le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'invocation, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 5 B-1-06, qui n'était pas inopérant. Le jugement attaqué est ainsi entaché d'une irrégularité qui entraîne son annulation.

3. Il y a lieu de statuer par voie d'évocation sur la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif.

Au fond :

4. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce (...) jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) ".

5. Aux termes de l'article 199 undecies A du code général des impôts alors applicable : " 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements d'outre-mer (...) entre la date de promulgation de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer et le 31 décembre 2017. / 2. La réduction d'impôt s'applique : (...) / c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les départements, territoires ou collectivités visés au 1 et qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Ces sociétés doivent s'engager à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts ou actions pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles / 6. La réduction d'impôt s'applique pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure (...) et des quatre années suivantes (...) ; /7. En cas de non-respect des engagements mentionnés aux 2 (...) la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année où interviennent les événements précités. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que, dans l'hypothèse d'une rupture, avant l'échéance légale, de l'engagement prévu par le c) du 2 de l'article 199 undecies A relatif à l'achèvement des fondations des immeubles, les réductions d'impôt sur le revenu dont a bénéficié le contribuable l'année au cours de laquelle l'engagement a été rompu et, le cas échéant, les années antérieures, font l'objet d'une reprise globale au titre de l'année de rupture, et celles pratiquées au titre des années postérieures font l'objet d'une reprise annuelle au titre de chacune des années concernées.

7. Les requérants ne contestent pas que l'engagement d'achever les fondations de l'immeuble dans les deux ans ayant suivi la souscription au capital de la SCI Kafecail n'a pas été respecté. L'année au cours de laquelle a été rompu l'engagement prévu par le c) du 2 de l'article 199 undecies A est donc l'année 2007. Par suite, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que lorsque, comme en l'espèce, les années d'imposition concernées par la reprise sont celles postérieures à l'année au cours de laquelle est intervenue la rupture de l'engagement, l'imposition est légalement établie au titre de chacune de ces années. Dès lors, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le délai de reprise de l'administration expire à la fin de la troisième année qui suit chacune de ces années. Il s'ensuit que, les impositions litigieuses ayant été établies à bon droit au titre des années 2008 et 2009, le délai de reprise de l'administration n'était pas expiré lorsque la proposition de rectification du 12 décembre 2011 a été notifiée aux contribuables.

8. M. et Mme C...se prévalent toutefois, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 225 de l'instruction 5 B-1-06 qui précise : " En cas de remise en cause, la réduction d'impôt dont a bénéficié le contribuable fait l'objet d'une imposition supplémentaire au titre de l'année au cours de laquelle est intervenue la rupture de l'engagement ou le non-respect des conditions d'application de l'avantage fiscal. Cette remise en cause intervient dans le délai normal de reprise, soit dans les trois ans de la rupture de l'engagement ou la survenance de l'événement entraînant la déchéance de l'avantage fiscal. La reprise des cinq fractions annuelles de la réduction est faite la même année. ". Ces dispositions ne comportent toutefois aucune interprétation formelle de l'article 199 undecies A qui diffère du sens et de la portée qu'il doit légalement recevoir. Le moyen tiré de l'invocation de cette doctrine administrative ne peut, par suite, être accueilli.

9. Pour le seul motif tiré de ce que les fondations des immeubles n'avaient pas été réalisées dans le délai de deux ans suivant la souscription litigieuse, l'administration fiscale a pu à bon droit remettre en cause la réduction d'impôt pratiquée au titre des années 2008 et 2009, Dès lors il n'est pas nécessaire de se prononcer sur le second motif qui a conduit l'administration à remettre en cause les réductions d'impôt dont ont bénéficié M. et Mme C....

10. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. et Mme C...devant le tribunal administratif ne peut qu'être rejetée. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par les requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Martinique n° 1500234 du 31 décembre 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme C...devant le tribunal administratif est rejetée, de même que leurs conclusions présentées en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 26 avril 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 mai 2018.

Le président-assesseur,

Laurent POUGETLe président-rapporteur,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 16BX00831


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00831
Date de la décision : 24/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : GILARD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-05-24;16bx00831 ?
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