La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/03/2018 | FRANCE | N°16BX00507

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 16BX00507


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1400646, 1400759, 1404477, du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 février 2016, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :r>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de prononcer la décharge des...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1400646, 1400759, 1404477, du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 février 2016, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt contestés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration ne pouvait, pour l'application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, prendre en considération les revenus perçus par son fils Georges au titre de l'année 2009, alors que ce dernier n'avait pas demandé à être rattaché au foyer fiscal de son père dans les conditions prévues par l'article 6-3-2° du code général des impôts ; dès lors, le montant des crédits apparaissant sur les comptes bancaires n'excédait pas le double des revenus déclarés et la procédure prévue par l'article L. 16 ne pouvait être mise en oeuvre pour l'année 2009 ;

- s'agissant de l'année 2010, il n'a pas eu, en dépit d'une demande en ce sens, communication de l'ensemble des pièces ou documents obtenus par l'administration auprès de tiers, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- il n'a pu lui-même répondre à la demande de renseignements adressée par l'administration fiscale au motif que ses comptes bancaires avaient été saisis par l'autorité judiciaire et non restitués, et il en a justifié ; le tribunal n'a pas statué sur ce point ;

- il n'est pas justifié par l'administration du bien-fondé de la balance de trésorerie qu'elle a opérée au titre de 2010 ; en particulier il n'apparaît pas que l'administration a inclus dans les disponibilités dégagées la somme de 12 439 euros correspondant à la différence entre les loyers provenant de Mme D...et le total des loyers ; de même, l'administration n'établit pas qu'il aurait financé l'intégralité du véhicule " Transporter " par des liquidités ni que celles-ci proviendraient de revenus encaissés en 2010 ; or, en vertu de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, il appartient à l'administration d'apporter cette preuve ;

- dès lors, la discordance entre les disponibilités dégagées et les disponibilités employées au titre de 2010 s'élève en réalité à 19 699,30 euros ; une telle discordance, compte tenu notamment de l'évaluation des dépenses de train de vie faite par l'administration, n'est pas suffisamment significative pour permettre d'imposer la somme considérée dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics (direction spécialisé de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le fils majeur de M. C...a été déclaré à la charge du foyer fiscal de son père pour 2009, ainsi qu'il résulte des termes d'un courrier du 12 juillet 2012 ; c'est donc à juste titre qu'il a été tenu compte des revenus de ce dernier ; les sommes portées au crédit des comptes bancaires en 2009 s'établissaient donc à 76 057,13 euros alors que le contribuable n'avait déclaré que 20 200 euros de revenus ; c'est donc régulièrement que le vérificateur a adressé à M. C...une demande de justifications sur le fondement des articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales ;

- il ressort de la proposition de rectification du 5 décembre 2012 que le vérificateur a indiqué la nature et la teneur des documents contenant les renseignements que l'administration a obtenus dans l'exercice de son droit de communication, et une copie des relevées bancaires utilisés a été annexée à cette proposition de rectification ; le contribuable n'a jamais répondu à cette proposition ni demandé communication des documents cités ;

- le calcul des disponibilités dégagées n'est entaché d'aucune erreur et le requérant n'en établit pas l'exagération ;

- il n'est pas justifié par M.C..., qui a déclaré travailler au noir, de l'acquisition partielle du véhicule Transporter au moyen d'un chèque émis le 6 octobre 2010 ;

- le montant de 47 108 euros auquel est évalué la balance de trésorerie du contribuable en 2010, alors que celui-ci a évalué ses dépenses de train de vie à 6 000 euros pour l'année, présente un caractère significatif et c'est régulièrement que ce montant a été imposé d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; l'exagération des bases d'imposition n'est pas démontrée.

Par une ordonnance du 23 mars 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mai 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., entrepreneur individuel, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2009 et 2010, à l'issue duquel l'administration a constaté l'existence, sur ses comptes bancaires, de revenus d'origine indéterminée. Il en est résulté des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, au titre des années considérées. M. C... relève appel du jugement du 8 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition.

Sur la régularité du jugement :

2. M. C...a soulevé devant le tribunal administratif un moyen tiré de ce que l'administration a entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en ne lui communiquant pas la copie des procès-verbaux d'audition et des documents d'instruction obtenus de l'autorité judiciaire et ayant fondé les rectifications, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Contrairement à ce qu'il soutient, les premiers juges n'ont pas omis de statuer sur ce moyen, qui fait l'objet des points 6 et 7 du jugement attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de ce jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la date de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont le contribuable a fait l'objet : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable (...) des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. L'administration, lorsqu'elle entend comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés en vue d'établir l'existence d'indices de revenus dissimulés, n'est en droit d'user de cette procédure de demande de justifications à l'égard de ce contribuable qu'à la condition que les sommes ainsi portées au crédit de ses comptes équivalent au moins au double de ses revenus connus.

4. Selon l'article L. 69 dudit livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration a demandé des justifications à un contribuable, elle est fondée à l'imposer d'office, sans mise en demeure préalable, à raison des sommes au sujet desquelles il s'est abstenu de répondre dans le délai requis. Pour les sommes au sujet desquelles il a apporté des éléments de réponse jugés insuffisants, l'administration est tenue de mettre préalablement en demeure le contribuable de compléter sa réponse, en lui indiquant les compléments de réponse qu'elle attend pour chacune d'elles.

5. Il résulte de l'instruction que, par lettre du 19 juillet 2012, le vérificateur a demandé à M. C...de fournir des justifications, d'une part, sur l'objet, la nature et l'origine de dépôts de chèques et d'espèces ainsi que sur des virements enregistrés sur trois comptes bancaires au cours de l'année 2009 pour un montant total de 76 057 euros et, d'autre part, sur un solde créditeur de balance de trésorerie de 62 108 euros au titre de l'année 2010. Le contribuable n'a que partiellement répondu à cette demande par un courrier du 19 septembre 2012, puis n'a pas donné suite à la mise en demeure de compléter sa réponse, qui lui a été adressée par le service le 4 octobre 2012. Dès lors, les crédits bancaires inexpliqués et le solde de la balance de trésorerie ont été taxés d'office en tant que revenus d'origine indéterminée, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

6. S'agissant de l'année 2009, M. C...soutient que l'administration ne pouvait, pour la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, prendre en considération les revenus figurant sur un compte bancaire ouvert au nom de son fils et sur lequel il ne dispose pas de procuration. Il en tire la conséquence que cette procédure a été mise en oeuvre irrégulièrement, les montants des revenus figurant sur ses propres comptes n'excédant pas le double de ses revenus déclarés pour ladite année. Il résulte toutefois de l'instruction que les revenus déclarés par M. C...au titre de l'année 2009 s'élèvent à la somme de 20 200 euros. Or, les sommes figurant la même année sur les seuls comptes bancaires du requérant, non compris le compte dont son fils était titulaire, s'élevaient au montant total de 49 973,73 euros, soit plus du double de ses revenus déclarés. Dans ces conditions, et en tout état de cause, le service a pu régulièrement mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales.

7. M. C...reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ni de critique utile de la motivation du jugement sur ce point, le moyen tiré de la méconnaissance par l'administration des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

8. M. C...ayant été régulièrement taxé d'office en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, il supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions, en vertu des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du même livre.

9. Il résulte de l'instruction que le vérificateur, ayant effectué la balance entre les disponibilités dégagées par M. C...au cours de l'année 2010, lesquelles s'établissent, au regard de ses comptes bancaires, à la somme de 126 459,97 euros, et le montant reconstitué des dépenses engagées dans le même temps par l'intéressé, soit 188 567,93 euros, a ainsi constaté un montant de disponibilités non justifié de 47 108 euros, qu'il a réintégré dans le revenu imposable du contribuable en tant que revenus d'origine indéterminée.

10. Le requérant soutient, d'une part, que ses revenus justifiés ont été vraisemblablement minorés par l'administration dans la mesure où il ne ressort pas clairement des sommes dont l'origine a pu être identifiée par le vérificateur qu'il a pris en compte à ce titre l'intégralité des loyers acquittés par la locataire d'un logement lui appartenant. L'administration expose cependant, sans être contredite, que l'ensemble des loyers perçus a été pris en compte, soit 8 218,95 euros réglés par la caisse location familiale (CAF) pour le compte de la locataire sur le compte CCP n° 07.535.68P022, et 2 521,08 euros réglés par la locataire elle-même sur le compte CRCAM n° 54922536204, que les autres virements de la CAF sur ce dernier compte correspondent à des allocations et non à des loyers, et que la somme de 15 000 euros qu'elle a retranchée du solde créditeur de la balance de trésorerie correspond aux revenus fonciers bruts redressés, qui abondent d'autant les disponibilités dégagées.

11. M. C...prétend, d'autre part, que l'acquisition d'un véhicule utilitaire au prix de 30 000 euros a été réalisée en partie au moyen des chèques bancaires identifiés sur ses comptes, et que si son financement a pu être complété par un versement en espèces, rien n'indique que ces espèces auraient été encaissées au cours de l'année 2010. Cependant, le requérant qui, lors de son audition par les services de gendarmerie, a admis avoir travaillé " au noir " et se faire ainsi régler en espèces par certains clients, n'a pas été en mesure de présenter une facture d'achat du véhicule attestant de la réalité et de la date de son acquisition auprès du garage qu'il mentionne comme l'ayant vendu, ni de justifier des moyens de paiement utilisés.

12. Par suite, le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe ainsi qu'il a été dit, de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration pour l'année 2010.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. C...de la somme qu'il sollicite au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

Le rapporteur,

Laurent POUGET

Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 16BX00507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00507
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-002 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : POMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-29;16bx00507 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award