Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de la Guyane de condamner la commune de Rémire-Montjoly et l'Etat à lui verser respectivement les sommes de 25 000 euros et de 31 500 euros, assorties des intérêts au taux légal, en réparation de fautes commises par le maire de la commune, d'une part, par le préfet de la Guyane d'autre part, dans l'exercice de leurs pouvoirs de police.
Par un jugement n° 1400182,1400183 du 28 mai 2015, le tribunal administratif de la Guyanne a condamné la commune de Rémire-Montjoly à payer à Mme C...la somme de 4 500 euros, tous intérêts et capitalisation confondus, et a condamné l'Etat à lui payer la somme de 6 000 euros, tous intérêts et capitalisation confondus.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 août 2015, et des mémoires enregistrés les 27 septembre 2016, 4 janvier 2017 et 10 février 2017, la commune de Rémire-Montjoly, représentée par MeF..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane ;
2°) de rejeter comme irrecevables et non fondées les demandes de Mme C...;
3°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 5 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que:
- la réclamation préalable a été présentée par la mandataire de Mme C...en sa qualité d'avocat et le rejet de cette réclamation a été adressée également à l'avocat ; compte tenu de sa qualité de professionnel du droit, les délais de recours contentieux ont couru dès la notification de cette décision de rejet, quand bien même elle ne comportait pas mention des voies et délais de recours ; la requête, présentée hors délai, est donc irrecevable ;
- la circulation et le stationnement sur la route des Plages, qui est une route départementale, est réglementée par l'article R. 417-10 du code de la route ; il appartient seulement au maire de veiller au respect de cette réglementation, sans y ajouter ; c'est donc à bon droit que le tribunal a estimé qu'aucune carence ne pouvait être retenu contre le maire en matière de circulation et de stationnement sur la route des Plages ;
- les griefs formulés à l'encontre du maire de la commune de Rémire-Montjoly sur le fondement de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ne sont pas de nature à engager sa responsabilité dans la mesure où ce dernier est intervenu à chaque fois que Mme C...s'est plainte de nuisances ; aucune carence ne saurait lui être reprochée ; si Mme C... s'est plainte de stationnements gênants sur la voie privée desservant son domicile, c'est uniquement dans ses courriers datés des 9 septembre 2009 et 28 décembre 2010, auxquels le maire de la commune a précisément répondu ; en dehors de ces plaintes, Mme C...n'a jamais sollicité les services de la police municipale pour faire cesser les stationnements prétendument gênants sur la voie privée menant à sa résidence ; qui plus est, Mme C...n'établit pas que le chemin privé menant à son domicile est ouvert à la circulation publique ; il ne peut donc pas être utilement reproché au maire d'avoir ignoré les plaintes de Mme C...et de n'avoir pris aucune mesure de nature à faire cesser les troubles de jouissance allégués ;
- Mme C...n'établit pas que l'accès à son domicile aurait été obstrué par des véhicules stationnés, circonstance pour laquelle elle n'a jamais sollicité l'intervention de la police municipale ; les stationnements gênants et anarchiques allégués ne sont pas prouvés ;
- les gênes ponctuelles de la circulation sur la route des Plages constituent des inconvénients normaux de voisinage inhérents à la configuration des lieux et ne nécessitant pas une réglementation particulière ;
- le siège de l'association Les Ecuries de Concours de Fort Diamant est fixé au domicile de sa présidente, MmeE... ; il s'agit donc en réalité d'une maison d'habitation et non pas d'un établissement recevant du public au sens des dispositions de l'article R. 123-2 du code de la construction et de l'habitation ; aucune demande de permis de construire relative à un établissement recevant du public n'a été autorisée par le maire de Rémire-Montjoly à cette adresse ; l'activité équestre dont se plaignait Mme C...a été définitivement transférée aux Ecuries de la Roseraie depuis février 2011 ;
- le maire a entrepris toutes les démarches nécessaires auprès de Mme E...afin de faire respecter les règles de sécurité ; en tout état de cause, le maire ne pouvait prendre un arrêté de fermeture de cet établissement que sur avis défavorable de la commission de sécurité compétente en application des dispositions de l'article R. 123-52 du code de la construction et de l'habitation ; le maire n'était donc pas en mesure de prendre un arrêté de fermeture sans commettre d'illégalité.
- le maire de Rémire-Montjoly est tenu de faire respecter le règlement sanitaire départemental de la Guyane édicté par arrêté préfectoral du 12 mars 1984 modifié le 16 juillet 2009 ; s'agissant de ce pouvoir tiré de l'article L.1311-2 du Code de la santé publique, il existe un pouvoir de substitution du préfet au maire résultant de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ; l'affirmation selon laquelle les boxes à chevaux sont implantés à moins de 20 mètres des eaux de baignades n'est étayée par aucune pièce probante ; il ne peut être fait grief au maire de n'avoir entrepris aucune démarche pour faire cesser ces constructions illicites, alors qu'il a fait dresser par la police municipale un procès-verbal de constat qui a été transmis aux services de l'environnement en vue des poursuites judiciaires et qu'un arrêté interruptif des travaux a été pris le 12 octobre 2009 ;
- par ailleurs, le juge judiciaire est seul compétent pour sanctionner les infractions aux règles d'urbanisme et à la législation relative au permis de construire ; dans ces hypothèses, il appartient au maire de dresser un procès-verbal de constat qu'il remet aux autorités de poursuites judiciaires ; le maire ne peut ni ordonner la fermeture de l'établissement, ni prescrire la remise en état des locaux au motif que le propriétaire aurait procédé à des travaux sans permis de construire ; Mme E...a d'ailleurs été jugée et condamnée par le tribunal correctionnel de Cayenne le 1er décembre 2011 pour avoir effectué ces constructions sans avoir obtenu au préalable un permis de construire ;
- s'agissant de la pollution éventuelle des eaux de baignade du fait de ces constructions illicites, il convient de rappeler que, sauf cas de péril imminent, le maire ne peut s'immiscer dans la police de l'eau, réservée au préfet, une telle immixtion étant susceptible d'entacher les actes du maire d'illégalité ; dans la présente affaire, aucun danger grave et imminent n'était caractérisé ; il s'est écoulé seulement 18 mois entre la saisine du maire de la commune de Rémire-Montjoly par Mme C...et le départ du centre équestre de la route des plages ; pendant ce délai, le maire n'est pas resté inactif ; aucune anomalie concernant le dispositif de traitement des déjections de chevaux n'a été relevée par la direction des services vétérinaires ; à réception de ce rapport d'inspection, le maire de Rémire-Montjoly formulait au préfet de la Guyane une plainte contre l'association Les Ecuries de Concours de Fort Diamant ; il appartenait dès lors au préfet, s'il estimait que ce rapport mettait en exergue l'insalubrité des conditions d'exploitation du centre équestre de l'association Les Ecuries de Concours de Fort Diamant, de prendre toutes mesures propres à y remédier ;
- en tout état de cause, ce grief manque en fait puisque le rapport d'inspection de la direction des services vétérinaires du 1er mars 2010 considère que les locaux de 1'association les Ecuries de concours de Fort Diamant sont compatibles avec l'activité exercée ; l'état sanitaire et d'entretien des locaux a également été jugé conforme par l'inspecteur de la direction des services vétérinaires ;
- ni le rapport d'inspection de la direction des services vétérinaires en date du 1er mars 2010, ni le rapport du coordinateur de la sécurité publique générale au maire, en date du 20 mai 2010, ne font état de l'existence de cet épandage ; les dispositions générales du règlement sanitaire départemental n'interdisent pas de manière absolue l'épandage de "lisiers, purins, fumiers, déchets solides d'animaux", sauf lorsqu'il est situé à moins de 35 mètres des berges des cours d'eau ; en l'espèce, à supposer que l'épandage allégué existe, il n'est pas démontré qu'il serait situé à moins de 35 mètres des berges ;
- s'agissant des dispositions spéciales du règlement sanitaire départemental applicables aux "lisiers, purins, eaux résiduaires de lavages des locaux abritant le bétail", l'épandage est interdit à moins de 100 mètres des immeubles d'habitation mais cette distance peut être inférieure ou égale à 50 mètres " Si les lisiers, purins et eaux résiduaires sont désodorisés ou enfouis dans les meilleurs délais par une action culturale superficielle " ; il appartient à Mme C... de démontrer que les dispositions du règlement sanitaire départemental de la Guyane ne seraient pas respectées ;
- en tout état de cause, les travaux projetés dans le plan de masse joint à la demande de Mme E...n'ont pas été autorisés par le maire ; aucune pièce du dossier ne permet de prouver que les travaux ont, comme Mme C...le prétend, continué pendant plus de deux mois après la notification de 1'arrêté interruptif ; par conséquent, aucune négligence de la commune de Rémire-Montjoly, eu égard aux dispositions de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, ne peut être caractérisée en l'espèce ;
- pour allouer 3 500 euros à Mme C...en raison des troubles subis par cette dernière dans ses conditions d'existence, le tribunal n'a fait aucunement référence aux troubles subis en raison du non-respect des règles de stationnement par les usagers du centre équestre ;
- Mme C...ne pourrait se prévaloir que des nuisances olfactives dont elle aurait été victime du fait de l'activité équestre mais dont la preuve n'est pas rapportée ; pour être indemnisables, les nuisances olfactives doivent dépasser les inconvénients normaux de voisinage ; or, en l'espèce, ni la réalité, ni l'intensité, ni la périodicité, ni la gravité des nuisances olfactives n'est démontrée et prouvée ; par ailleurs, la seule responsable de ces nuisances olfactives était Mme E...et non pas le maire de la commune de Rémire-Montjoly, qui n'a absolument pas failli à l'exercice de son pouvoir de police générale ;
- en tout état de cause, si la juridiction de céans devait accorder une quelconque indemnisation à Mme C...du fait des nuisances olfactives, il y a lieu de la ramener à des plus justes proportions ;
- le trouble dans les conditions d'existence n'est absolument pas caractérisé et il est dépourvu de lien de causalité avec une faute de la commune de Rémire-Montjoly qui elle-même n'a jamais été démontrée
- le préjudice moral allégué n'est pas établi.
Par des mémoires enregistrés les 11 juillet 2016, 27 septembre 2016, 16 novembre 2016 et 27 janvier 2017, Mme C...sollicite à titre principal le rejet de la requête de la commune de Rémire-Montjoly pour irrecevabilité ou, à titre subsidiaire, la réformation du jugement du 28 mai 2015 en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à ses demandes indemnitaires ; elle demande également que soit mise à la charge de la commune la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune ne justifie pas avoir mandaté son maire pour relever appel du jugement en cause ; en l'absence de toute justification dans ce sens, la requête d'appel ne pourra qu'être rejetée ; de plus, les conclusions de la commune sont imprécises ; la requête parait dirigée contre le jugement dans son ensemble alors que seule une partie du jugement lui fait grief ;
- la décision de rejet de la réclamation préalable ne mentionnait pas les voies et délais de recours et la circonstance qu'elle ait été adressée à un professionnel du droit est sans incidence sur les mentions qui doivent figurer dans une décision administrative ;
- le maire est chargé de la police municipale et pour cela doit faire cesser le trouble à l'ordre public en vertu de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ; en n'agissant pas alors qu'il était parfaitement informé de l'exploitation du centre équestre, il a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;
- les nuisances sont olfactives et sonores ; la preuve qu'elle apporte de ces nuisances ne résulte pas seulement des témoignages de proches mais aussi, et surtout, des écritures de la commune ;
- or, le maire pouvait sur simple arrêté ordonner la fermeture du centre équestre illégal, ce qu'il n'a jamais fait ;
- en raison de l'absence de toute autorisation de construire, l'exploitant doit être regardé comme gérant un établissement illégalement ouvert en violation des dispositions du code de la construction et de l'habitation relatives aux établissements recevant du public ; le maire était tenu de lui intimer l'ordre de fermer le centre équestre ; il est constant qu'un établissement de cette nature devait faire l'objet d'une déclaration aux autorités sanitaires et notamment à l'agence régionale de santé ; cette déclaration est faite par le maire ; or, il ressort du courrier du 8 juillet 2010 de l'agence régionale de la santé de Guyane que la commune n'a effectué aucune déclaration ;
- le centre équestre est situé à environ 100 m de la mer ; or, une activité équestre doit être située à moins de 200 m des eaux de baignade ; les dispositions de l'article 254 de l'arrêté préfectoral du 16 juillet 2009 portant règlement sanitaire départemental ne sont pas respectées ; il eut suffi que le maire de Rémire-Montjoly prenne un arrêté ordonnant la fermeture d'un établissement recevant du public illégalement ouvert et ne disposant d'aucune autorisation ;
- elle a subi et subit encore le stationnement sauvage sur le chemin ouvert à la circulation publique et menant aux deux villas, au droit de sa propriété et devant son portail, la mettant en grande difficulté pour entrer et quitter son domicile surtout en cas d'urgence ; elle a dû aller habiter ailleurs le week-end ; elle a même dû quitter son domicile familial constitué d'une villa construite par elle pour aller vivre à Cayenne dans une petite maison de ville afin de pouvoir répondre aux appels de la régulation médicale en cas d'urgence sans encourir le risque de rester bloquée dans son garage ;
- si la commune allègue que le centre équestre se serait déplacé vers une autre commune, elle ne produit aucune décision de fermeture ; en réalité, les deux sites sont exploités et celui en litige est dédié à l'accueil des poulinières gestantes, des poulains au sevrage ou des animaux nécessitant un isolement pour des soins particuliers ;
- l'exploitation irrégulière et intensive de l'établissement lui a causé un préjudice moral et a troublé profondément ses conditions d'existence et celles de sa famille ; elle a vu ses conditions de vie totalement bouleversées et dégradées.
Par une ordonnance du 10 février 2017, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu, au 27 février 2017 à 12h00.
Les parties ont été informées, par un courrier du 11 octobre 2017, qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le règlement sanitaire départemental de la Guyane ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la commune de Rémire-Montjoly.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...est propriétaire d'une maison située route des Plages, sur le territoire de la commune de Rémire-Montjoly, en Guyane. Elle se plaint de nuisances et de troubles dans ses conditions d'existence liées à la présence sur la propriété voisine de la sienne, entre avril 2009 et février 2011, d'un centre équestre exploité dans des conditions illégales. Imputant ses préjudices à diverses carences du maire de la commune et du préfet de la Guyane dans l'exercice de leurs pouvoirs de police respectifs, et ses demandes indemnitaires adressées à la commune et à l'Etat ayant été implicitement rejetées, Mme C...a saisi le tribunal administratif de la Guyane aux fins de voir la commune et l'Etat condamnés respectivement à lui payer des indemnités de 25 500 euros et de 31 500 euros. La commune de Rémire-Montjoly relève appel du jugement du 28 mai 2015 par lequel le tribunal l'a condamnée à verser à Mme C...une somme de 4 500 euros en réparation de ses préjudices et a condamné l'Etat au paiement d'une indemnité de 6 000 euros.
Sur la recevabilité de la requête :
2. La commune de Rémire-Montjoly a dûment justifié, par la production d'une délibération du conseil municipal en date du 16 avril 2014, du mandat général confié à son maire " d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ". Par suite, la fin de non-recevoir opposée à la requête de la commune par Mme C...doit être écartée.
3. En revanche, la commune de Rémire-Montjoly ne justifie pas d'un intérêt lui conférant qualité pour agir à l'encontre du jugement attaqué en tant que, par son article 2, il condamne l'Etat à verser 6 000 euros à Mme C...en réparation des conséquences de la carence du maire dans la mise en oeuvre de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, le maire agissant en la matière au nom de l'Etat, et non en qualité d'agent exécutif de la collectivité locale. Les conclusions de la requête sont ainsi, dans cette mesure, irrecevables et doivent être rejetées.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
4. Il est constant que la décision du 10 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune de Rémire-Montjoly a rejeté la réclamation préalable de Mme C...en date du 20 mai 2013 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours. La notification de cette décision, alors même qu'elle a été faite auprès de l'avocat de MmeC..., professionnel du droit, n'a dès lors pas eu pour effet d'enclencher le délai de recours contentieux à son encontre, en vertu des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative. Par suite, aucune tardiveté ne peut être opposée à la requête de Mme C...enregistrée le 20 février 2014 au greffe du tribunal administratif de la Guyane.
Sur la responsabilité de la commune :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques ... 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser (...) les pollutions de toute nature (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au maire de prendre les mesures appropriées et strictement nécessaires afin notamment de prévenir et de réprimer les comportements et situations susceptibles de compromettre la sécurité et la salubrité publiques, notamment en réglementant le stationnement abusif sur la voie publique, visé aux articles R. 417-10 et suivants du code de la route, ou encore en s'assurant du respect de la réglementation sanitaire départementale. La carence du maire à prendre les mesures à même de faire cesser les troubles à l'ordre public est susceptible de constituer une faute engageant la responsabilité de la commune.
6. Il résulte de l'instruction qu'entre avril 2009 et février 2011, la parcelle voisine de celle supportant l'habitation de Mme C...a accueilli un club hippique exploitant seize chevaux dénommé " Les Ecuries de concours de Fort Diamant ", lequel n'a pas donné lieu de la part de son exploitante à une déclaration préalable d'ouverture. Il a été constaté dans les mois suivants, par les différents services administratifs et techniques compétents, que ce centre équestre non déclaré et qui ne bénéficiait pas d'un avis favorable des services vétérinaires, ne respectait pas la réglementation applicable aux établissements recevant du public ni la réglementation d'urbanisme, plusieurs boxes à chevaux ayant été construits sans autorisation.
7. Si la requérante fait valoir que la fréquentation non négligeable du club équestre et l'absence d'espace de stationnement adapté a eu pour conséquence un stationnement automobile anarchique dans les alentours immédiats, et en particulier le long de la voie assurant à la fois la desserte de ce club et celle de sa propriété, l'empêchant parfois d'entrer ou de sortir en voiture de chez elle, il résulte de l'instruction qu'elle n'a pour autant jamais contacté les services de la fourrière et ne s'est plainte de cet état de fait auprès du maire qu'à deux reprises, à plus d'un an d'intervalle. Dans ces conditions, elle ne démontre pas l'existence de circonstances dont la gravité requérait de façon manifeste du maire qu'il fît usage des pouvoirs que lui confère le 1° de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. C'est par suite à tort que le tribunal administratif a estimé que la responsabilité de la commune de Rémire-Monjoly se trouvait engagée à l'égard de Mme C...à raison d'une telle carence.
8. Il est établi, en revanche, que les conditions de fonctionnement du club hippique contrevenaient à diverses dispositions du règlement sanitaire départemental de la Guyane, relatives notamment à la protection du voisinage et aux distances minimales à respecter, à l'hygiène des locaux ainsi qu'au stockage, à l'épandage et à l'évacuation des fumiers, purins et eaux résiduaires de lavage. Il en est résulté pour le voisinage, et en particulier pour MmeC..., d'importantes nuisances tenant à de fortes odeurs ainsi qu'à une prolifération des mouches et taons. Or, alors que Mme C...a appelé une première fois l'attention du maire de Rémire-Montjoly le 9 octobre 2009 sur les gênes occasionnées par le fonctionnement intempestif du club hippique, qu'une pétition d'une soixantaine de riverains en date du 19 janvier 2010 soulignait également les différents dysfonctionnements de cette structure, alertant la commune sur les risques et les nuisances en résultant, qu'un rapport de la police municipale en date du 27 avril 2010 concluait, après enquête, à la violation du règlement sanitaire départemental, qu'un membre du cabinet municipal a alerté à son tour le maire le 20 mai 2010, lequel avait également connaissance des manquements constatés par les services vétérinaires, et que Mme C...a enfin réitéré sa demande d'intervention le 28 décembre 2010, le maire, en dépit de quelques déclarations d'intention, n'a pas mis en oeuvre de manière effective, durant toute la période d'activité du centre équestre, soit pendant près de deux ans, ses pouvoirs de police générale pour faire cesser les atteintes à la salubrité publique dont il avait connaissance. Cette carence du maire est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Rémire-Montjoly à l'égard de MmeC..., quand bien même les troubles avaient cessé à la date à laquelle cette dernière a présenté sa demande indemnitaire préalable.
9. Enfin, la commune de Rémire-Montjoly ne peut utilement, pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité, invoquer une carence du préfet dans l'exercice de son pouvoir de substitution au maire qu'il tient de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, une éventuelle responsabilité de l'Etat en la matière ne pouvant, en tout état de cause, se substituer à celle, propre, de la commune.
Sur les préjudices :
10. Il résulte de l'instruction que la carence du maire à faire cesser les troubles occasionnés par l'activité du club hippique a eu pour conséquence de causer à Mme C...d'importants troubles dans ses conditions d'existence, en raison en particulier des nuisances olfactives et des invasions d'insectes qu'elle a subies à son domicile, qui excédaient les sujétions normales du voisinage. Eu égard à ces troubles, et compte tenu de leur intensité et de leur caractère continu sur une période de vingt-deux mois, le tribunal administratif, en condamnant la commune de Rémire-Montjoly à payer à MmeC..., à titre de réparation, une indemnité de 4 500 euros, tous intérêts et capitalisation compris, n'a pas fait une inexacte appréciation de son préjudice.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Rémire-Montjoly n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane l'a condamnée à verser à Mme C...la somme de 4 500 euros, intérêts et capitalisation confondus.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeC..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont la commune de Rémire-Montjoly sollicite le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune la somme de 1 500 euros à verser à Mme C...en application des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Rémire-Montjoly est rejetée.
Article 2 : La commune de Rémire-Montjoly versera à Mme C...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rémire-Montjoly et à Mme B...C....
Copie en sera adressée au ministre des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président assesseur,
Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 décembre 2017.
Le rapporteur,
Laurent POUGET
Le président,
Aymard de MALAFOSSE
Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX02899