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30/10/2017 | FRANCE | N°15BX03027

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 30 octobre 2017, 15BX03027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait d'agissements fautifs qu'elle impute à son employeur, consistant en une mise à l'écart de son service et une privation de l'exercice effectif de ses fonctions, constitutives d'un harcèlement moral ayant porté atteinte à sa dignité ainsi qu'à son état de santé physique et mentale.

Par un jugement

n° 1302992 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait d'agissements fautifs qu'elle impute à son employeur, consistant en une mise à l'écart de son service et une privation de l'exercice effectif de ses fonctions, constitutives d'un harcèlement moral ayant porté atteinte à sa dignité ainsi qu'à son état de santé physique et mentale.

Par un jugement n° 1302992 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif enregistrés les 7 septembre et 12 octobre 2015, Mme D...E..., représentée par la Société Civile Professionnelle H. Masse-Dessen - Thouvenin - Coudray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision de rejet de sa réclamation préalable ;

3°) de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme totale de 70 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis, sauf à parfaire, outre les intérêts et les intérêts capitalisés ;

4°) de mettre à la charge du département de la Gironde la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que la copie qui lui a été transmise ne permet pas de s'assurer que sa minute comportait la signature des magistrats qui l'ont rendu, en violation de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- sur le fond, les premiers juges ont omis de mettre en oeuvre le régime de la charge de la preuve applicable au cas d'espèce et il n'apparaît nulle part, dans la motivation du jugement attaqué, qu'ils se seraient interrogés sur la question de savoir si les faits invoqués faisaient naître une présomption d'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral et, si tel était le cas, si le département avait soumis une argumentation de nature à renverser cette présomption en justifiant de ce que les faits dénoncés ne révélaient pas des actes qui avaient excédé l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et qui n'étaient pas étrangers à toute considération de harcèlement moral ;

- en outre, c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle n'a pas fait l'objet d'agissements constitutifs de harcèlement moral, en relevant de manière erronée qu'elle s'était abstenue significativement de désigner l'agent qui se serait livré aux actes dont elle faisait état ;

- en effet, à la suite d'une réorganisation de la direction des collèges au cours du mois d'avril 2008, qui l'ont contrainte dans un premier temps à faire face à une surcharge de travail considérable, elle a été conduite progressivement à constater qu'elle était mise à l'écart de toutes les activités de la direction des collèges, que toutes les propositions qu'elle formulait dans le but de prévenir des risques professionnels se heurtaient au rejet ou à tout moins à la remise en cause systématique de la part de sa hiérarchie, qu'elle n'était plus associée à aucune des actions de prévention et de sécurité entamées au sein de son service, qu'elle ne recevait plus les comptes rendus des réunions et n'était plus conviée à faire partie des groupes de travail portant sur des missions relevant de sa compétence, à quoi s'ajoutent l'interdiction orale de se rendre dans les collèges, les refus qui lui ont été opposés à chaque fois qu'elle a demandé à pouvoir participer à une formation ou intervenir directement dans un établissement où existait une situation à l'origine d'un accident de service ou ayant justifié une alerte de la part d'un des gestionnaires des collèges ;

- c'est en vain qu'elle a contesté la dégradation de sa situation au sein du service, aucune de ses demandes visant à se voir confier des missions ayant en pratique un contenu réel ou pour bénéficier d'une mobilité, pas plus qu'aucune de ses démarches pour interpeller l'administration sur sa situation ne s'étant traduites par des mesures concrètes ;

- ne pouvant plus assurer convenablement ses tâches et les relations avec sa hiérarchie s'étant considérablement dégradées, épuisée physiquement et mentalement du fait d'une telle situation, elle a dû finalement être placée en congé de maladie pour cause d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel à la dégradation de son cadre professionnel ;

- c'est dans ce contexte que l'autorité administrative a finalement cru pouvoir considérer qu'elle était à l'origine des difficultés relationnelles rencontrées et qu'elle n'avait pas atteint les objectifs qui lui avaient été fixés pour justifier du refus d'avancement qui lui a été opposé et de l'abaissement sensible de la notation qui lui a finalement été attribuée ;

- ainsi, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, dès lors que la responsabilité du département se trouvait engagée en raison des faits de harcèlement moral dont elle a fait l'objet, elle est en droit de prétendre à la réparation des préjudices qu'elle a subis résultant, à hauteur de 30 000 euros, de la perte de chance sérieuse dont elle a été privée de bénéficier d'un déroulement de carrière plus favorable, ainsi que, à hauteur de 40 000 euros, de son préjudice moral et de ses troubles dans ses conditions d'existence.

Une pièce produite pour Mme E...a été enregistrée le 11 août 2016.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 octobre 2016, le département de la Gironde, représenté par MeB..., conclut :

1°) avant dire droit, à ce qu'il sollicité auprès de Mme E...la production de l'expertise complète du docteur Ferrière et, plus généralement, de tout document médical utile ;

2°) au rejet de la requête d'appel et à la confirmation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2015.

Il fait valoir que :

- le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité dès lors que l'obligation de signature ne vaut que pour la minute du jugement c'est-à-dire l'original du jugement qui a été transmis à la cour avec l'entier dossier relatif à cette affaire, dont il n'est pas établi qu'il ne comportait pas les signatures requises ;

- sur le fond, il convient de rappeler que le juge administratif considère qu'" une souffrance psychologique liée à des difficultés professionnelles ne saurait caractériser à elle seule un harcèlement moral qui se définit également par l'existence d'agissements répétés de harcèlement et d'un lien entre ces souffrances et ces agissements " et que les multiples difficultés professionnelles d'un agent pouvaient caractériser une insatisfaction professionnelle et un défaut de reconnaissance sans pour autant constituer des agissements relevant du harcèlement moral ;

- en l'espèce, la demande indemnitaire de la requérante est vouée au rejet dès lors qu'aucune faute ne peut être reprochée au département, les décisions ou actes qu'il a pris à l'égard de Mme E...- et que celle-ci a cru pouvoir interpréter comme étant constitutifs de harcèlement moral - étant en réalité justifiés par des éléments objectifs voire une certaine bienveillance vis-à-vis de l'intéressée et relevant de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ;

- il convient de rappeler, à titre liminaire, que dès son entrée en fonctions, Mme E... a éprouvé des difficultés à appréhender et exécuter ses missions qui lui avaient pourtant été exposées dans le détail, ce qui a été relevé lors de son évaluation professionnelle au titre de l'année 2005 ;

- malgré les instructions de sa hiérarchie, l'intéressée ne s'est pas recentrée sur les missions prioritaires que sa hiérarchie lui avait pourtant fixées, en l'occurrence, préconiser clairement les travaux et mesures à prendre au sein des établissements scolaires, de manière à garantir la sécurité des biens et des personnes et la continuité du service public, ce qui a été à l'origine d'un retard croissant de celle-ci dans ses missions, relevés notamment lors de ses évaluations annuelles successives pour les années 2006 et 2007, dont elle n'a d'ailleurs jamais contesté le contenu ;

- dans le cadre de la modification de l'organisation de la direction des collèges entreprise au cours de l'année 2008, aboutissant à la création de deux pôles (un pôle maîtrise d'ouvrage collèges et un pôle fonctionnement des collèges) placés sous la responsabilité d'un directeur adjoint des collèges, la collectivité a élaboré, afin d'aider MmeE..., une nouvelle fiche de poste de chargé mission prévention-sécurité au sein de la direction des collèges au sujet de laquelle l'intéressée, cadre A de la filière technique expérimenté et spécialiste de l'hygiène et la sécurité au travail, avait obtenu des informations détaillées ;

- ainsi qu'il ressort d'une note du 24 janvier 2008, ce poste de chargé de mission contenait de réelles missions concrètement détaillées, faisait appel à l'expertise de l'agent et répondait à l'obligation du département en matière de santé et sécurité ;

- en dépit d'une nouvelle affectation, au cours de l'année 2008, sur le poste de chargé de mission prévention-sécurité au sein de la direction des collèges, et de son enthousiasme initial, l'intéressée s'est révélée, de nouveau, dans l'incapacité d'assumer effectivement cette nouvelle mission pourtant restreinte et formellement acceptée par elle ;

- aussi, dès 2009, à l'occasion de changements mineurs dans l'organisation de la direction des collèges, le département a été encore amené à prendre en compte la situation de Mme E...afin de ne pas la laisser davantage en difficulté, en requalifiant le poste de chargé de mission prévention-sécurité en poste de préventeur, dont les missions se trouvaient limitées aux seuls risques professionnels des ATTEE, ainsi qu'il ressort de la fiche de poste établie à cette occasion en concertation avec l'intéressée ;

- l'intéressée n'a jamais contesté davantage la décision de l'affecter, le 1er août 2009, à la cellule d'appui au fonctionnement des collèges qui relève du pôle fonctionnement des collèges, conformément à la note d'affectation collective du 1er septembre 2009 signée par le directeur général des services départementaux ;

- surtout, et ainsi qu'il avait déjà été relevé depuis 2005, l'intéressée n'est pas parvenue à envisager sa mission de façon opérationnelle, alors qu'elle était tout particulièrement chargée de proposer " des mesures correctives des dysfonctionnements constatés et de sécurité ", de formuler des conseils dans la mise en oeuvre des mesures de prévention et d' " établir des analyses/diagnostics des accidents du travail les plus graves et proposer toute action visant à en réduire le risque " ;

- alors qu'afin de pallier les carences professionnelles de MmeE..., le directeur des collèges lui avait adressé, le 25 novembre 2009, une lettre de mission lui précisant, de nouveau, les tâches qu'elle devait accomplir dans le cadre de sa nouvelle fiche de poste, en l'occurrence, accompagner dix collèges dans l'évaluation des risques professionnels, les problèmes professionnels de l'intéressée ont perduré ;

- en 2010, la cristallisation de ses difficultés professionnelles l'ont amenée à effectuer des démarches afin d'être mise à la disposition de la DRH et à solliciter l'intervention de plusieurs conseillers généraux, mais aussi de personnels du cabinet du président du conseil général afin d'obtenir une mobilité professionnelle au sein de services de la collectivité, mais sans succès ;

- dans le cadre d'une procédure de gestion des accidents de service des ATTEE arrêtée le 11 mai 2011 au cours d'une réunion réunissant ces différents services et à laquelle Mme E... participait, l'intéressée a été désignée comme référent dans le gestion des accidents du travail et s'est vu confier la mission de traiter ces dossiers en lien avec le service prévention de la DRH, ce qui constitue - là encore - une réelle affectation au sein de la direction des collèges assortie d'une mission effective et de tâches à accomplir correspondant à son grade ;

- en définitive, depuis qu'elle a intégré le département, Mme E...n'a cessé de solliciter, d'une part, un aménagement de poste consistant à réduire ses missions à un minimum qu'elle n'est d'ailleurs même pas parvenue à exécuter et, d'autre part, un changement de poste ;

- outre le fait que Mme E...ne remplissait pas ses objectifs professionnels, elle ne respectait pas les règles de fonctionnement de la collectivité, ce qui a été relevé dans les évaluations établies au titre des années 2011 et 2012 ;

- il résulte de tous ces rappels factuels liminaires que Mme E...n'a pas été privée de l'exercice effectif de fonctions et finalement " mise à l'écart de toutes les activités de la direction des collèges, en méconnaissance des dispositions de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations de fonctionnaires et de l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 portant statut de la fonction publique territoriale dont elle s'est prévalue en première instance ;

- en effet, depuis son arrivée dans les services du département, elle a toujours été affectée sur un poste correspondant à son grade et ses compétences, en exerçant des missions conformément au décret n° 90-126 du 9 février 1990, et a été invitée à participer à de nombreuses réunions traitant de problèmes de sécurité dans divers établissements avec les autres agents concernés des différents services de la collectivité (direction des collèges, DRH, DQG, DSI,...) ;

- à aucun moment, Mme E...n'a été dépourvue de mission effective ou mise à l'écart de la direction des collèges, ni même de la collectivité ;

- contrairement à ce qu'elle soutient, la note du 11 avril 2008, par laquelle M. A...lui a demandé de se rapprocher de M. G...afin " d'effectuer le transfert des dossiers traitant du sujet avant la fin du mois d'avril " est intervenue dans le cadre de la mise en oeuvre de la réorganisation de la direction des collèges (laquelle a d'ailleurs fait l'objet d'une présentation en CTP dès le 29 janvier 2008) transférant le suivi des commissions de sécurité au pôle maîtrise d'ouvrage de ladite direction et ne constituait pas une mesure malveillante à son égard ;

- en réalité, les efforts dont l'entourage professionnel a systématiquement fait preuve à l'égard de Mme E...pour l'aider à exercer ses fonctions quitte à établir, en concertation et accord avec l'intéressée elle-même, des fiches de poste adaptées à ses capacités, ont fini par être interprétées par celle-ci comme constitutives d'une mise à l'écart ;

- en outre, l'intéressée a toujours eu à sa disposition les moyens matériels adaptés à l'exécution de sa mission (bureau, téléphone et véhicule de service) ;

- si l'intéressé n'a pas été conviée à la réunion qui s'est tenue le 12 août 2010, et qui a dû être organisée en urgence, c'est parce qu'elle se trouvait alors en congés, étant précisé que si elle a été absente de cette réunion, elle a tout de même été destinataire du compte rendu qu'elle produit ;

- on peut d'ailleurs se demander si la requérante, dans l'hypothèse où sa hiérarchie lui aurait refusé ses congés annuels pour raison de service, ne reprocherait pas aujourd'hui cette décision ;

- Mme E...n'a pas été mise à l'écart de groupes de travail ou instances de concertation mises en place entre l'État et la direction des collèges du département et, notamment, la commission technique départementale des collèges (CTDC), dont la création a fait l'objet d'une publicité auprès de tous les agents du service ;

- l'argumentation de la requérante est d'ailleurs contradictoire dès lors que, d'un côté, elle reproche à son employeur de lui avoir systématiquement confié des missions trop lourdes et, d'un autre côté, elle reproche à ce même employeur de ne pas lui avoir donné des missions supplémentaires à celles qu'il lui avait déjà confiées comme, par exemple, la participation à l'un de ces groupes de travail ;

- en revanche, si l'intéressée a pu avoir le sentiment d'être mise à l'écart, c'est justement parce qu'elle ne remplissait pas sa mission ;

- l'incapacité de l'intéressée à formuler des propositions quant aux mesures susceptibles de corriger les dysfonctionnements qu'elle avait relevés a eu de graves conséquences ;

- si elle affirme avoir fait l'objet de divers reproches virulents et injustifiés de la part de sa hiérarchie, sans d'ailleurs le démontrer, c'est au contraire l'intéressée qui a eu des difficultés à accepter les règles, de sorte que les reproches qui ont pu lui être formulés relèvent de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, qu'il s'agisse du refus de sa demande de remboursement de frais de déplacement pour un déplacement au collège du Haillan du 17 février 2010 qui n'avait jamais été autorisé au préalable par sa hiérarchie, ou d'un rappel à l'ordre adressé par une note du 8 juin 2011 dans le cadre de l'utilisation d'un véhicule de service par l'intéressée pour se rendre à une formation à Rennes les 18 et 19 mai 2011 dont elle n'avait informé personne au préalable ;

- il paraît utile d'ajouter qu'en s'obstinant à vouloir faire prendre en compte des formations au titre de missions, Mme E...n'a pas permis aux services compétents du Département de lui rembourser les frais de déplacement auxquels elle a pourtant droit ;

- la requérante a bénéficié de multiples formations depuis son arrivée au sein des services du département afin de lui permettre d'actualiser et de perfectionner ses compétences et de remplir sa mission au mieux ;

- Mme E...s'est maintes fois écartée des règles afférentes aux pointages requis dans le cadre de la comptabilisation du temps de travail, ce qui a donné lieu à plusieurs rappels oraux et notes de la part des services de la DRH du département, mais aussi de sa hiérarchie, qui ont donné lieu à pas moins de cinq notes de décembre 2008 à janvier 2012 et un courriel du 31 mai 2010 ;

- le blocage de carrière allégué qu'elle aurait subi n'est pas plus assorti du moindre commencement de démonstration ;

- à cet égard, depuis son arrivée au département, Mme E...a systématiquement franchi les échelons de la grille d'ingénieur à la durée minimale ;

- si, comme d'autres agents du département, l'intéressée remplit les conditions statutaires pour prétendre au grade d'ingénieur principal telles que prévues par l'article 22 du décret du 9 février 1990, d'une part, l'avancement au grade d'ingénieur principal n'est pas un droit pour les agents remplissant les conditions statutaires et, d'autre part, l'autorité territoriale étant obligée de faire des choix en application de la règle des quotas, tous les agents ne peuvent pas bénéficier d'un avancement ;

- s'agissant du montant réclamé (30 000 euros), la requérante ne fournit pas les calculs lui ayant permis d'aboutir à cette somme ;

- en définitive, dès lors que l'intéressée n'a subi aucun harcèlement moral, ni préjudice de carrière, sa demande indemnitaire destinée à réparer une prétendue perte de chance sérieuse de bénéficier d'un déroulement de carrière plus favorable est dépourvue de tout fondement ;

- s'agissant de la dégradation de son état de santé, le certificat d'arrêt de travail initial dressé le 8 décembre 2011 par le Docteur Boyer Vidal, médecin au CHS, et plaçant Mme E... en arrêt maladie à compter de cette même date jusqu'au 5 janvier 2012, ne mentionne pas de " syndrome anxio-dépressif réactionnel à la dégradation de son cadre professionnel " mais un " trouble de l'humeur ", sans établir un lien entre cette affection et le service ;

- à cet égard, la jurisprudence exige que soit établie l'existence d'un lien à la fois certain, direct et déterminant avec le service pour que la pathologie soit reconnue comme imputable à l'exercice des fonctions, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- dans son rapport d'expertise du 15 juillet 2014, le docteur Ferrière a retenu une personnalité obsessionnelle et que l'équilibre psychique sous-jacent étant sûrement fragile, il n'en a pas fallu davantage pour que l'arrivée d'une nouvelle supérieure hiérarchique en 2008 déclenche la décompensation d'un état psychique sous-jacent fragile ou vulnérable ;

- si Mme E...a désigné l'auteur du harcèlement moral auprès du médecin qui l'a expertisé, comme étant MmeF..., il importe de rappeler qu'elle a connu des difficultés professionnelles dès son arrivée au département, soit dès 2005 (alors que Mme F...n'est arrivée à la direction des collèges qu'en 2008) et que ces difficultés ont perduré malgré les modifications apportées à ses missions et validées par elle ;

- en définitive, au regard de l'ensemble de ce qui précède, aucun acte ne peut être qualifié de harcèlement moral et, plus généralement, aucune faute ne peut être reprochée au Département ou à l'un de ses agents vis-à-vis de MmeE....

Par ordonnance du 19 juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 5 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 90-126 du 9 février 1990 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Axel Basset,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant le département de la Gironde et de MmeE....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 mai 2005, Mme D...E..., fonctionnaire titulaire du grade d'ingénieur territorial, a été recrutée par le président du conseil général de la Gironde, par voie de mutation, sur un poste de catégorie A, nouvellement créé par délibération de l'assemblée délibérante du 20 décembre 2004, de chargée de mission responsable de la prévention et de la sécurité dans les collèges, au sein du service du fonctionnement et de l'exploitation des collèges relevant de la direction des collèges, elle-même rattachée à la direction générale adjointe de la jeunesse, de l'éducation, des sports et de la vie associative (DGAJ). Elle avait notamment pour missions, en fonction du calendrier des commissions de sécurité, de mener les actions préventives nécessaires pour réduire au maximum les risques relatifs à la sécurité des biens et de personnes induits par l'exploitation quotidienne des collèges et de répondre aux questions posées par les établissements en la matière, les mesures et travaux ainsi préconisés devant ensuite être réalisés par le techniciens de la direction des collèges. Par une lettre du 14 mai 2013 adressée par l'intermédiaire de son conseil, Mme E...a sollicité du président du conseil général de la Gironde le versement de la somme totale de 70 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la mise à l'écart de son service et de la privation de l'exercice effectif de ses fonctions dont elle affirme avoir fait l'objet depuis le mois d'avril 2008 lors de la réorganisation de la direction des collèges, constitutives d'un harcèlement moral ayant porté atteinte à sa dignité ainsi qu'à son état de santé physique et mentale, ce qui l'a conduite à être placée en congé de longue durée du 8 décembre 2011 jusqu'au 16 janvier 2015, date de sa reprise d'activité à mi-temps thérapeutique. MmeE..., à qui un refus implicite de cette réclamation préalable a été opposé, relève appel du jugement du 7 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Gironde à lui verser la somme de 70 000 euros susmentionnée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". En vertu de l'article R. 741-10 du même code : " La minute des décisions est conservée au greffe de la juridiction pour chaque affaire, avec la correspondance et les pièces relatives à l'instruction (...) ".

3. Mme E...soutient que le jugement attaqué est irrégulier dès lors que la copie qui lui a été transmise ne permet pas de s'assurer que sa minute comportait les signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Il résulte toutefois de l'examen du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte bien la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / (...). ". D'une part, il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration, dont il relève, à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement, la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se déterminant au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. D'autre part, pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels agissements répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas de telles limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive d'un harcèlement moral au sens des dispositions précitées. A cet égard, une souffrance psychologique liée à des difficultés professionnelles ne saurait caractériser à elle seule un harcèlement moral, qui se définit également par l'existence d'agissements répétés de harcèlement et d'un lien entre ces souffrances et ces agissements.

5. Aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Le grade est distinct de l'emploi. Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. (...) ". L'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée dispose : " L'activité est la position du fonctionnaire qui, titulaire d'un grade, exerce effectivement les fonctions de l'un des emplois correspondant à ce grade (...) ". Aux termes de l'article 1 du décret du 9 février 1990 susvisé, alors en vigueur : " Les ingénieurs territoriaux constituent un cadre d'emplois scientifique et technique de catégorie A au sens de l'article 5 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée susvisée. / Ce cadre d'emplois comprend les grades d'ingénieur, d'ingénieur principal et d'ingénieur en chef. (...) ". Aux termes de l'article 2 de ce même décret, alors en vigueur : " Les ingénieurs territoriaux exercent leurs fonctions dans tous les domaines à caractère scientifique et technique entrant dans les compétences d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public territorial, notamment dans les domaines de l'ingénierie, de la gestion technique et de l'architecture, des infrastructures et des réseaux, de la prévention et de la gestion des risques, de l'urbanisme, de l'aménagement et des paysages, de l'informatique et des systèmes d'information. / (...) Les ingénieurs territoriaux sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du fonctionnaire chargé de la responsabilité des services techniques dans la collectivité ou l'établissement (...) ".

6. Mme E...soutient, comme elle l'a déjà fait devant les premiers juges, qu'elle a subi, depuis la réorganisation de la direction des collèges du conseil général de la Gironde en avril 2008, une mise à l'écart de son service et une privation de l'exercice effectif de ses fonctions pendant plus de trois ans et demi, constitutives d'un harcèlement moral ayant porté atteinte à sa dignité ainsi qu'à son état de santé physique et mentale. Elle souligne à cet égard tout particulièrement qu'après avoir dû faire face, dans un premier temps, à une surcharge de travail considérable, elle a été conduite progressivement à constater qu'elle était mise à l'écart de toutes les activités de la direction des collèges, que toutes les propositions qu'elle formulait dans le but de prévenir des risques professionnels se heurtaient au rejet ou, à tout moins, à des remises en cause systématiques de la part de sa hiérarchie, qu'elle n'était plus associée à aucune des actions de prévention et de sécurité entamées au sein de son service, qu'elle ne recevait plus les comptes rendus des réunions et n'était plus conviée à faire partie des groupes de travail portant sur des missions relevant de sa compétence, à quoi se sont agrégés l'interdiction orale de se rendre dans les collèges ainsi que des refus répétés de pouvoir participer à une formation ou intervenir directement dans un établissement où existait une situation à l'origine d'un accident de service ou ayant justifié une alerte de la part d'un des gestionnaires des collèges. L'appelante ajoute que c'est en vain qu'elle a contesté la dégradation de sa situation au sein du service, par diverses lettres transmises à sa hiérarchie au cours des années 2009 à 2011, aucune de ses demandes visant à se voir confier des missions ayant en pratique un contenu réel ou pour bénéficier d'une mobilité, ne s'étant traduite par des mesures concrètes.

7. L'ensemble des agissements mentionnés ci-dessus, et le placement de MmeE..., à compter du 8 décembre 2011, en congé maladie en raison de troubles de l'humeur puis d'une dépression sévère (" burn out "), qui a conduit d'abord le médecin de prévention, le 5 octobre 2011, à proposer un changement de service de l'intéressée, puis le docteur Boyer-Vidal, le 10 mai 2012, à préconiser une thérapie cognitive et comportementale, sont susceptibles de faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral à son encontre. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit au point 4, il incombe, d'une part, à l'administration de démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement et, d'autre part, de tenir compte des comportements respectifs des agents auxquels il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.

8. En premier lieu, d'une part, il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par la requérante que dès sa prise de fonctions, en mai 2005, comme chargée de mission responsable de la prévention et de la sécurité dans les collèges, au sein du service du fonctionnement et de l'exploitation des collèges relevant de la direction des collèges, Mme E...a éprouvé des difficultés à appréhender et exécuter ses missions, nombreuses et variées, qui la conduisaient notamment à assister aux commissions de sécurité dans les 104 établissements d'enseignement du département. C'est ainsi que sa hiérarchie l'a invitée, lors de l'établissement de sa notation au titre de l'année 2005, à " se recentrer, au vu de la charge de travail, sur l'obtention des avis favorables sur l'ensemble des commissions de sécurité périodiques dans les collèges, ainsi que sur les rapports des services vétérinaires dans les demi-pensions ", tout en émettant alors un avis favorable à ce que l'agent puisse suivre diverses formations, notamment en matière de logiciel comptable et de marchés publics. Toutefois, et ainsi que l'a relevé sa notation établie au titre de l'année 2006, Mme E...n'a " pas su se recentrer dans sa fonction ", en formulant notamment des préconisations claires de mesures à prendre au sein des établissements scolaires, de manière à garantir la sécurité des biens et des personnes, ce qui s'est traduit par la dégradation, dans sa grille d'évaluation, du critère d'aptitude générale, d'aptitude au changement et du critère d'efficacité de " mise en oeuvre des objectifs-respect des délais ". Il résulte également de l'instruction que, dans le cadre d'une modification de l'organisation de la direction des collèges, validée par le comité technique paritaire du département de la Gironde le 29 janvier 2008, aboutissant à la création de deux pôles, à savoir un pôle maîtrise d'ouvrage collèges (PMOC) et un pôle fonctionnement des collèges (PFC), placés sous la responsabilité d'un directeur adjoint des collèges, Mme E...s'est vu proposer une nouvelle fiche de poste de chargée de mission prévention-sécurité la recentrant sur plusieurs tâches. Cette fiche de poste ayant reçu une adhésion pleine et entière de l'intéressée le 11 janvier 2008, compte tenu de la surcharge de travail qu'elle estimait subir, il lui a été confirmé, par lettre du 24 janvier suivant, qu'elle n'aurait pas à intervenir quant au suivi des travaux induits par les demandes ou remarques des organismes de contrôle et des commissions de sécurité - cette tâche étant désormais dévolue aux techniciens maintenance - et que ses missions consistaient essentiellement, en matière de prévention, à sensibiliser les établissements à leurs obligations en matière de sécurité, au suivi des divers contrats d'entretien et de contrôle obligatoires et à la tenue des différents documents et registres et, en matière de sécurité du travail, à déceler les carences et proposer des priorités d'action. Il est vrai que, par une note du 11 avril 2008, le directeur adjoint des collèges, chef du pôle maîtrise d'ouvrage des collèges, a informé Mme E...que le suivi des commissions de sécurité et les observations en découlant seraient désormais traités au niveau du bureau de la maintenance et qu'il lui a été demandé à cette occasion de se rapprocher du responsable des travaux de maintenance afin " d'effectuer le transfert des dossiers traitant du sujet avant la fin du mois d'avril ". Toutefois, et contrairement à ce que soutient l'appelante, un tel transfert de dossiers, rendu nécessaire par la réorganisation de la direction des collèges en cours, était justifié par des considérations d'intérêt général et ne saurait, dès lors, être regardé comme constitutif d'une mesure vexatoire. Il résulte tout autant de l'instruction que compte tenu de l'incapacité de Mme E...à assumer effectivement les nouvelles missions restreintes ainsi fixées en 2008, le poste de chargée de mission prévention-sécurité de l'intéressée a été transformé, dès l'année 2009, en poste de préventeur, dont les missions se trouvaient limitées aux seuls risques professionnels des adjoints techniques des établissements d'enseignement (ATTEE), en concertation là encore avec MmeE.... Toutefois, alors qu'elle s'était vu confier la responsabilité de proposer des mesures correctives des dysfonctionnements constatés et de sécurité, de formuler des conseils dans la mise en oeuvre des mesures de prévention et d'établir des analyses / diagnostics des accidents du travail les plus graves et proposer toute action visant à en réduire le risque, l'intéressée n'est pas parvenue à envisager et concrétiser sa mission de façon opérationnelle. Il résulte également de l'instruction que dans le cadre de la mise en oeuvre d'une lettre de mission du 5 juillet 2011 qui lui avait été adressée par la nouvelle directrice générale adjointe des services départementaux en charge de la jeunesse, et donc de la direction des collèges, la désignant comme référente dans la gestion des accidents du travail en lien avec le service prévention de la DRH, Mme E...a accumulé un retard croissant dans le traitement des dossiers d'accidents du travail, qu'elle n'est pas parvenue à résorber en dépit de plusieurs rappels à l'ordre les 3 mai, 4 novembre et 1er décembre 2011, le total de dossiers non traités s'élevant à une cinquantaine à la fin de l'année 2011. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que Mme E...aurait été évincée des réunions de travail portant sur ses attributions. En particulier, si l'intéressée a fait état, dans ses correspondances adressées à sa hiérarchie, de ce qu'elle n'a pas été conviée à une réunion qui s'est tenue le 12 août 2010, le département de la Gironde intimé fait valoir sans contredit utile que cette réunion a dû être organisée en urgence, compte tenu du nombre important d'accidents de travail subis par les ATTEE durant la fin de l'année scolaire 2009-2010, un jour où Mme E...se trouvait en congés, et qu'elle a été néanmoins rendue destinataire du compte rendu de cette réunion à titre informatif. Enfin, l'appelante n'établit ni même n'allègue qu'elle n'aurait pas eu à disposition les moyens matériels adaptés à l'exécution de ses missions (bureau, téléphone et véhicule de service). Ainsi, et contrairement à ce qu'elle soutient, MmeE..., qui s'est vu fixer tout au long des années litigieuses des missions précises au sein de la direction des collèges, n'a pas été privée, par son employeur, de la possibilité d'exercer de manière effective des fonctions correspondant à son grade.

9. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les rappels à l'ordre dont Mme E... a fait l'objet par diverses notes transmises par sa hiérarchie de décembre 2008 à janvier 2012 ainsi qu'un courriel du 31 mai 2010, trouvent leur origine dans le non-respect, par l'intéressée, de certaines règles de fonctionnement applicables dans la collectivité territoriale, en matière notamment de demandes de remboursement de frais de déplacement dans le cadre de missions ou de formations, d'utilisation et de remisage des véhicules de service pour suivre des formations, requérant à chaque fois des validations préalables par les autorités compétentes, ou, encore, en matière de pointage, ce qui a justifié plusieurs remarques négatives à ce sujet dans ses évaluations établies au titre des années 2010 et 2011, dont elle n'a d'ailleurs jamais contesté le contenu et le bien-fondé. Partant, il n'est pas établi qu'en lui adressant de tels rappels à l'ordre, la hiérarchie directe de MmeE..., et tout particulièrement, la nouvelle directrice adjointe des collèges en charge du pôle fonctionnement des collèges depuis mai 2008 aurait excédé les limites de son pouvoir hiérarchique. Il résulte également de l'instruction, et notamment d'un relevé informatique édité le 14 novembre 2014 par le service formation que, contrairement à ce qu'elle allègue, Mme E...a bénéficié de nombreuses formations depuis son arrivée au sein des services du département afin de perfectionner ses compétences, pour un total de 38,5 jours de formation tout au long des années 2005 à 2011. D'ailleurs, c'est en considération de ce que l'intéressée avait émis le souhait de " terminer son cycle d'études en hygiène et sécurité commencé au CNAM de Paris en 1996 ", cette formation constituant alors pour elle " l'ultime étape de sa réorientation professionnelle en hygiène et sécurité ", que Mme E...a été autorisée à n'exercer ses fonctions qu'à 80 % d'un temps complet, à compter du 1er avril 2006, afin de pouvoir disposer librement de ses lundis. Il s'ensuit que l'appelante n'établit ni avoir fait l'objet de brimades injustifiées ni, davantage, d'obstructions systématiques à ses demandes de formation.

10. En troisième et dernier lieu, il résulte de l'instruction que, depuis son arrivée au sein des services du département de la Gironde, Mme E...a bénéficié de manière systématique des avancements d'échelons prévus par la grille des ingénieurs territoriaux. Si, ainsi qu'elle le soutient, elle n'a pas été promue au grade supérieur d'ingénieur principal dans les conditions prévues par l'article 22 du décret du 9 février 1990, l'avancement de grade ne constitue pas un droit pour les agents remplissant les conditions statutaires et l'intéressée n'établit ni même n'allègue que le choix de l'exécutif territorial de promouvoir d'autres de ses collèges de travail à ce grade les années litigieuses serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le blocage de carrière dont elle fait état ne peut être regardé comme établi.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande de supplément d'instruction sollicitée par le département de la Gironde, que MmeE..., qui ne démontre pas avoir fait l'objet de faits constitutifs d'un harcèlement moral et d'agissements susceptibles d'engager la responsabilité de la collectivité territoriale, n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Gironde, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme E...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...E...et au département de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Gil Cornevaux, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 octobre 2017.

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Gil CornevauxLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 15BX03027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX03027
Date de la décision : 30/10/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative - Garanties diverses accordées aux agents publics.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. CORNEVAUX
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP MASSE - DESSEN - THOUVENIN - COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-30;15bx03027 ?
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