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01/06/2017 | FRANCE | N°17BX00120

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 01 juin 2017, 17BX00120


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision en date du 12 décembre 2014 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait introduite au bénéfice de son épouse et de leurs quatre enfants mineurs.

Par un jugement n° 1500789 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2017 et deux mémoires enregi

strés le 13 mars et le 7 avril 2017, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision en date du 12 décembre 2014 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait introduite au bénéfice de son épouse et de leurs quatre enfants mineurs.

Par un jugement n° 1500789 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2017 et deux mémoires enregistrés le 13 mars et le 7 avril 2017, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 novembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 12 décembre 2014 du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) d'enjoindre au préfet d'autoriser le regroupement familial sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- ses ressources sont supérieures à celles exigées dans le cadre du regroupement familial ; le montant indiqué par la préfecture de 1 271,08 euros correspond au montant de son allocation chômage perçue en 2013 ; depuis décembre 2013 il perçoit un salaire mensuel moyen de 1 850 euros ; en outre, la circulaire du 1er mars 2000 invite à apprécier avec indulgence la condition de ressources et la stabilité des ressources si le demandeur a été momentanément au chômage dès lors qu'une longue habitude de travail est attestée par le demandeur, ce qui est son cas ; il travaille toujours à ce jour et il percevait en outre pour la période concernée la somme de 270 euros d'allocation personnalisée au logement ;

- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence car il n'a pas motivé sa décision au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le refus de regroupement familial constitue une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ainsi qu'une atteinte aux droits de l'enfant en méconnaissance des articles 3-1 et 9 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- sa situation est en conformité avec les dispositions des articles R. 411-1 à R. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il réside en France depuis 1989 et est titulaire d'une carte de résident de 10 ans ; il dispose de ressources stables et suffisantes et d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable.

Par une décision du 13 décembre 2016, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M.C....

Par un mémoire enregistré le 20 mars 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 avril 2017, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 avril 2017 à 12 heures.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue,

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., de nationalité tunisienne, est titulaire d'une carte de résident valable dix ans. Il a sollicité le 15 mai 2014 le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse et de leurs quatre enfants mineurs. Sa demande a été rejetée par une décision du préfet de la Haute-Garonne du 12 décembre 2014. Il relève appel du jugement du 8 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. C...résidait en France depuis près de 25 ans et qu'il était titulaire d'une carte de résident de dix ans valable jusqu'au 18 septembre 2025. Il est marié depuis 1995 et il n'est pas contesté que M. C...entretient des relations permanentes avec sa famille en faisant des déplacements en Tunisie. M. C... disposait en outre d'un logement adapté à la venue de sa famille. L'activité professionnelle exercée par M. C...lui a procuré un revenu mensuel moyen au cours des douze mois précédent sa demande de regroupement familial, de 1 271 euros, soit un salaire légèrement inférieur au salaire minimum de croissance exigible, majoré d'un cinquième compte tenu de la taille de la famille du requérant, qui comprend six membres, soit 1 347,83 euros net. Mais eu égard au montant de ses ressources, qui atteignent pratiquement le montant exigé par la loi, et qui se sont élevées à 1 850 euros par mois à partir de décembre 2013, et des conditions de son séjour en France, la décision portant refus de regroupement familial a porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes de l'article R. 411-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'âge du conjoint et des enfants pouvant bénéficier du regroupement familial est apprécié à la date du dépôt de la demande ".

6. Si l'administration, dont la décision de rejet d'une demande a été annulée par le juge, statue à nouveau sur cette demande en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision, il en va différemment lorsqu'une disposition législative ou réglementaire prévoit qu'un élément de cette situation est apprécié à une date déterminée.

7. L'annulation, sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'un refus de délivrance d'une autorisation de regroupement familial entraîne en principe l'obligation pour l'administration, statuant à nouveau sur la demande, de délivrer l'autorisation sollicitée.

8. En application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'âge des bénéficiaires du regroupement familial est apprécié à la date du dépôt de la demande de regroupement familial sur laquelle le préfet a statué par la décision annulée. En l'espèce, les quatre enfants de M. C...étaient âgés de 6, 15, 16 et 17 ans à la date du dépôt de la demande de regroupement familial le 15 mai 2014 et peuvent de ce fait être admis à séjourner en France au titre du regroupement familial.

9. Eu égard aux motifs d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenus et alors, d'une part, que les ressources du requérant sont proches du montant exigé par la loi et que le préfet a admis que M. C...disposait d'un logement suffisant et, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Haute-Garonne accorde le bénéfice du regroupement familial à l'épouse de M. C... et à leurs quatre enfants dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Le jugement du 8 novembre 2016 du tribunal administratif de Toulouse et la décision en date du 12 décembre 2014 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé d'accorder à M. C... le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse et de leurs quatre enfants, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à M. C...une autorisation de regroupement familial au profit de son épouse et de leurs quatre enfants dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au préfet de la Haute-Garonne et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er juin 2017.

Le rapporteur,

Florence MadelaigueLe président,

Marianne PougetLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX00120


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00120
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : DERBALI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-01;17bx00120 ?
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