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04/05/2017 | FRANCE | N°17BX00102

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 04 mai 2017, 17BX00102


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 17 mai 2016 par lequel le préfet du Tarn a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602826 du 16 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2017, MmeB..., représentée

par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulous...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 17 mai 2016 par lequel le préfet du Tarn a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602826 du 16 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2017, MmeB..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 16 décembre 2016 ;

2°) d'annuler le refus de titre de séjour opposé par le préfet du Tarn le 17 mai 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision n'est pas suffisamment motivée en fait en l'absence d'un énoncé exhaustif des éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale ;

- la motivation de la décision ne permet pas d'établir qu'il a été procédé à un examen complet de sa situation ;

- c'est à tort que le préfet s'est fondé sur le caractère irrégulier de son entrée sur le territoire national puisque le consulat lui a délivré un visa, pour une entrée unique, valable du 20 avril 2014 au 6 juin 2014. Elle a à cet effet acheté un billet pour se rendre de Oujda à Paris. Elle n'a fait que traverser l'Espagne pour se rendre sur le territoire national où elle a ouvert un livret A dès le 29 avril 2014. Elle démontre ainsi être entrée régulièrement sur le territoire national ;

- elle est mariée à un ressortissant français et elle est enceinte. D'ailleurs son état ne lui permet pas de voyager. Les pièces versées au dossier démontrent que la communauté de vie est antérieure au mariage. Dès lors, le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2017, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- l'arrêté est suffisamment motivé en droit et en fait en visant les textes dont il est fait application et en retraçant son parcours depuis son entrée sur le territoire français, et en précisant les raisons pour lesquelles l'entrée de l'intéressée est considérée comme étant irrégulière ;

- il résulte de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint d'un ressortissant français est subordonnée à la détention d'un visa de long séjour et à la justification d'une entrée régulière sur le territoire national. Il n'est pas contesté que Mme B...est entrée en Espagne le 26 avril 2014. En revanche, elle n'établit pas être entrée régulièrement sur le territoire français, faute de produire un document, notamment la déclaration d'entrée sur le territoire français, permettant d'attester qu'elle serait entrée en France avant le 4 juin 2014, date d'expiration de son visa. Au surplus, l'intéressée a séjourné irrégulièrement en France une fois son visa expiré. Enfin, étant sans emploi et sans enfant, elle ne fait pas état d'une circonstance faisant obstacle à ce qu'elle retourne dans son pays d'origine pour y solliciter un visa de long séjour ;

- si la durée de la communauté de vie de plus de six mois n'est pas contestée, des doutes demeurent.sur le caractère réel et sérieux des relations entre les époux, la réalité de leur relation avant leur union n'étant nullement démontrée et semble au contraire contredite par les pièces versées au dossier, notamment une demande de mariage La grossesse ne révèle pas davantage une erreur manifeste d'appréciation. Des agents de police ont constaté que l'intéressée avait quitté le domicile conjugal. En outre, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à 32 ans et où résident sa mère, quatre soeurs et trois frères. La décision contestée ne porte donc pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 février 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

-la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-André Braud a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., ressortissante marocaine née le 24 novembre 1982, est, selon ses déclarations, entrée en France le 26 avril 2014 sous couvert d'un visa de court séjour. Après avoir épousé M. C...le 11 avril 2015, elle a sollicité le 27 novembre 2015 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 17 mai 2016, le préfet du Tarn a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. L'intéressée n'ayant pas déféré à la convocation adressée par les services de gendarmerie, le préfet du Tarn a décidé le 18 août 2016 de l'assigner à résidence pour une période de quarante-cinq jours. Par un premier jugement en date du 29 août 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté les demandes de Mme B...tendant à l'annulation de la décision du 18 août 2016 et des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi. Par un second jugement du 16 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour opposé par le préfet du Tarn le 17 mai 2016. Mme B...relève appel de ce dernier jugement.

2. En premier lieu, Mme B...fait valoir que le refus de titre de séjour n'énonce pas de façon exhaustive les éléments afférents à sa situation personnelle et familiale, ce qui révèlerait un défaut de motivation en fait. Il résulte cependant des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration que le préfet est tenu de mentionner seulement les considérations de fait sur lesquelles il se fonde et non de manière exhaustive tous les éléments afférents à la situation personnelle et familiale de l'intéressée. En l'espèce, l'arrêté litigieux énonce les considérations de fait fondant le refus. Le défaut de motivation allégué doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté, qui rappelle les conditions d'entrée sur le territoire national et la situation familiale de l'intéressée, que, contrairement à ce que soutient MmeB..., le préfet du Tarn a procédé à un examen individuel de sa situation personnelle.

4. En troisième lieu, d'une part, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l' état civil français (...). ". Aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. ". En vertu de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 211-2-1 dudit code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ". Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire à un étranger en qualité de conjoint de ressortissant français est subordonnée à la production d'un visa pour un séjour supérieur à trois mois et que l'octroi d'un tel visa par l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour est subordonné à la justification d'une entrée régulière sur le territoire français.

5. D'autre part, l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la déclaration obligatoire mentionnée à l'article 22 de la convention de Schengen est souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen. Sont toutefois dispensés de cette formalité, en vertu de l'article R. 212-6 du même code, les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois et ceux qui sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen.

6. Si Mme B...soutient que, contrairement à ce qui est indiqué dans l'arrêté en litige, elle est entrée régulièrement en France sous couvert d'un visa de court séjour, il n'est pas contesté qu'elle n'a pas effectué la déclaration prévue par l'article 22 de la convention de Schengen. Par suite, et nonobstant la production d'un billet de bus non composté et d'un formulaire de demande d'ouverture d'un livret A daté du 29 avril 2014, elle ne peut justifier d'une entrée régulière en France. Dès lors, le préfet du Tarn a pu à bon droit estimer qu'elle ne remplissait pas les conditions posées par l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance en France du visa de long séjour requis pour l'obtention d'un titre de séjour en vertu de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise.

8. S'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a épousé M. C...le 11 avril 2015, les pièces produites ne permettent pas d'établir l'existence d'une communauté de vie antérieure. En outre, il ressort du compte-rendu d'audition du 1er juillet 2014 que la requérante n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans et où résident sa mère, quatre soeurs et trois frères. Par ailleurs, si Mme B...fait valoir qu'elle est enceinte, les pièces qu'elle produit ne permettent pas d'établir qu'elle était enceinte à la date de l'arrêté en litige. Dans ces circonstances, et eu égard au caractère relativement récent du mariage, en refusant de délivrer un titre de séjour, le préfet du Tarn n'a pas porté au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été opposé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doivent être écartés.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour opposé par le préfet du Tarn le 17 mai 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à MmeD... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 mai 2017.

Le rapporteur,

Paul-André BRAUDLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

No 17BX00102


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00102
Date de la décision : 04/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-05-04;17bx00102 ?
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