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27/04/2017 | FRANCE | N°16BX01386

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 27 avril 2017, 16BX01386


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Guadeloupe a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler pour excès de pouvoir le permis de construire un centre commercial délivré le 11 mars 015 par le maire de Saint-François à la SARL Lunabam.

Par un jugement n° 1500588 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé ce permis de construire.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête n° 16001386 et des mémoires enregistrés respectivement les 26 avril 2016, 23 septembre

2016, et 22 février 2017, la SARL Lunabam, représentée par la SELARL Lazare Avocats, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Guadeloupe a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler pour excès de pouvoir le permis de construire un centre commercial délivré le 11 mars 015 par le maire de Saint-François à la SARL Lunabam.

Par un jugement n° 1500588 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé ce permis de construire.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête n° 16001386 et des mémoires enregistrés respectivement les 26 avril 2016, 23 septembre 2016, et 22 février 2017, la SARL Lunabam, représentée par la SELARL Lazare Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 7 avril 2016 ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif ;

3°) de rejeter l'intervention volontaire de la société Soguacal ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le déféré du préfet était tardif, le délai de recours n'ayant pu être prorogé par le recours gracieux du 29 mai 2015 ne lui ayant pas été régulièrement notifié en violation de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- l'intervention de la société Soguacal était irrecevable, par voie de conséquence de l'irrecevabilité du déféré préfectoral ;

- le permis de construire n'est pas entaché de détournement de procédure.

Par un mémoire enregistré le 24 janvier 2017, le préfet de la région Guadeloupe conclut au rejet de la requête de la société Lunabam comme non fondée.

Par interventions, enregistrées respectivement les 6 juillet 2016, 27 octobre 2016, 26 janvier 2017 et 15 mars 2017, la société Soguacal, représentée par MeC..., demande que la cour rejette la requête n° 16BX01386 de la société Lunabam et demande en outre à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-François et de la société Lunabam une somme de 4 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le déféré du préfet devant le tribunal administratif n'était pas tardif ;

- son intervention volontaire au soutien des conclusions du préfet de la Guadeloupe était recevable en raison de sa qualité d'exploitante d'un fonds de commerce situé sur un terrain voisin ;

- les motifs pour lesquels le tribunal administratif a annulé le permis de construire contesté sont fondés ;

- le permis de construire est en outre entaché d'un détournement de procédure.

II - Par une requête n° 16BX01408 et des mémoires enregistrés respectivement les 26 avril 2016, 28 juin 2016 et 22 février 2017 la SARL Lunabam, représentée par la SELARL Lazare Avocats, demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement n° 1500588 du 7 avril 2016 du tribunal administratif de la Guadeloupe ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis de construire ayant été mis à exécution en fin d'année 2015, son annulation emporte de graves conséquences en raison des coûts d'arrêt et de reprise du chantier auprès des titulaires des marchés de travaux et de l'impossibilité d'anticiper les commandes auprès des entreprises ;

- l'irrecevabilité du déféré du préfet de la Guadeloupe et, par suite, de l'intervention de la société Soguacal, constitue un moyen sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement et le rejet des conclusions du préfet tendant à l'annulation du permis de construire.

Par interventions, enregistrées respectivement les 6 juin 2016, 27 octobre 2016 et 15 mars 2017 la société Soguacal, représentée par MeC..., demande que la cour rejette la requête n° 16BX01386 de la société Lunabam comme non fondée, et demande en outre à la cour de mettre à la charge de celle-ci une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Mège,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SARL Lunabam, et de Me C..., représentant la société Soguacal.

Considérant ce qui suit :

1. Par la requête n° 16BX01386, la société Lunabam relève appel du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 7 avril 2016 qui a annulé le permis de construire un centre commercial que le maire de Saint-François lui a délivré le 11 mars 2015. Par la requête n° 16BX01408, elle demande à la cour de surseoir à l'exécution dudit jugement. Ces requêtes sont dirigées contre le même jugement ; par suite, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'intervention de la société Soguacal devant la cour :

2. L'intervention de la société Soguacal au soutien du déféré du préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif a été admise. L'arrêt à rendre sur la requête de la société Lunabam tendant à l'annulation de ce jugement est de nature à préjudicier aux intérêts de la société Soguacal. Dès lors son intervention devant la cour est recevable.

Sur la recevabilité du déféré du préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif :

3. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet (...) à l'encontre (...) d'un permis de construire (...), le préfet (...) est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir bénéficier d'une prorogation du délai de recours contentieux, l'auteur d'un recours administratif dirigé contre une décision relative à l'occupation du sol est tenu de le notifier dans les conditions fixées par l'article R. 600-1, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait former ultérieurement.

4. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire contesté identifie le bénéficiaire de la sorte : " Lunabam, représenté par M. B...D... " et mentionne comme adresse : " E...- 97232 - Lamentin ". Cette mention est conforme aux indications portées par le pétitionnaire sur le formulaire de demande dans les cadres destinés à renseigner sur l'identité du demandeur lorsque celui-ci est une personne morale ainsi que sur les coordonnées de celui-ci. Si ce formulaire comporte en outre, dans le cadre destiné aux pétitionnaires souhaitant que les courriers de l'administration soient adressés à une autre personne, l'indication du nom de M. B... ou raison sociale GBH, suivie de l'adresse " E...- 97232- Lamentin ", cette mention ne concerne que les relations entre le pétitionnaire et le service instructeur de sa demande, à l'exclusion d'ailleurs de toutes décisions. Elle ne pouvait dès lors induire le préfet en erreur quant à l'identification de la société Lunabam comme étant la seule bénéficiaire du permis. Dans ces conditions, la notification faite par le préfet de son recours gracieux à " M. B... -E...- 97232 - Lamentin ", retournée à l'expéditeur en raison d'une " erreur d'adressage " ne peut être regardée comme valablement faite à la société Lunabam, bénéficiaire du permis contesté. A défaut d'avoir été notifié valablement au bénéficiaire, le recours administratif adressé par le préfet le 29 mai 2015 au maire de Saint-François n'a pu suspendre le délai de recours contentieux qui était dès lors expiré lors de l'enregistrement du déféré du préfet de la Guadeloupe auprès du tribunal administratif le 3 août 2015. Il s'en suit que l'intervention de la société Soguacal à l'appui des conclusions présentées par le préfet de la Guadeloupe n'était pas non plus recevable.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Lunabam est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Guadeloupe a fait droit au déféré du préfet et a annulé le permis de construire un centre commercial que le maire de Saint-François lui a délivré le 11 mars 2015.

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement :

6. Le présent arrêt statue sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions présentées en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Lunabam, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société Soguacal, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la société Lunabam au même titre.

DECIDE

Article 1er : L'intervention de la société Soguacal est admise.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 7 avril 2016 est annulé.

Article 3 : Le déféré du préfet de la Guadeloupe et l'intervention de la société Soguacal devant le tribunal administratif de la Guadeloupe sont rejetés.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement du 7 avril 2016.

Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société Lunabam au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6: Les conclusions de la société Soguacal tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société Lunabam, à la ministre du logement et de l'habitat durable, à la commune de Saint-François, et à la société Soguacal. Copie en sera adressée pour information au préfet de la Guadeloupe et à la ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Didier Péano, président,

Mme Christine Mège, président-assesseur,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 avril 2017.

Le rapporteur,

Christine MègeLe président,

Didier PéanoLe greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne à la ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

2

Nos 16BX01386, 16BX01408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01386
Date de la décision : 27/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Obligation de notification du recours.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: Mme Christine MEGE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SELARL LAZARE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-27;16bx01386 ?
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