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20/04/2017 | FRANCE | N°16BX04096,16BX04097

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 20 avril 2017, 16BX04096,16BX04097


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Kosovo comme pays de renvoi.

Mme D...C...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quit

ter le territoire français et a fixé le Kosovo comme pays de renvoi.

Par deux jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Kosovo comme pays de renvoi.

Mme D...C...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Kosovo comme pays de renvoi.

Par deux jugements n° 1603663 et n° 1603664 du 16 novembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Procédures devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2016, M.E..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1603663 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté du 22 février 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné les considérations humanitaires invoquées ; or, ils ont justifié de menaces graves pesant sur leur sécurité en cas de retour au Kosovo ; ils devaient donc se voir admettre au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ils résident en France depuis trois ans et demi ; leur enfant est né en France, où il est scolarisé ; ils n'ont plus de contacts avec les membres de leurs familles ; leur état psychologique nécessite des soins ;

- M. E...dispose de perspectives professionnelles sérieuses ; il détient notamment une promesse d'embauche, fait montre d'insertion professionnelle et pourra subvenir aux besoins de sa famille ;

- alors que le préfet n'était pas lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, il a entaché sa décision fixant le Kosovo comme pays de renvoi d'une violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour de deux ans dans l'espace Schengen est également entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'ils ne constituent pas une menace pour l'ordre public au sens du III de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 5 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2017 à 12 heures.

II) Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2016, MmeF..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1603664 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté du 22 février 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné les considérations humanitaires invoquées ; or, ils ont justifié de menaces graves pesant sur leur sécurité en cas de retour au Kosovo ; ils devaient donc se voir admettre au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ils résident en France depuis trois ans et demi ; leur enfant est né en France, où il est scolarisé ; ils n'ont plus de contacts avec les membres de leurs familles ; leur état psychologique nécessite des soins ;

- M. E...dispose de perspectives professionnelles sérieuses ; il détient notamment une promesse d'embauche, fait montre d'insertion professionnelle et pourra subvenir aux besoins de sa famille ;

- alors que le préfet n'était pas lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, il a entaché sa décision fixant le Kosovo comme pays de renvoi d'une violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour de deux ans dans l'espace Schengen est également entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'ils ne constituent pas une menace pour l'ordre public au sens du III de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 5 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laurent Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes enregistrés sous le n° 16BX04096 et sous le n° 16BX04097 présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

2. M. et MmeF..., ressortissants kosovars, ont sollicité leur admission au séjour en qualité de réfugiés. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 13 janvier 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 12 décembre 2014. Par des arrêtés du 22 février 2016, le préfet de la Gironde a refusé de les admettre au séjour et les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi. M. et Mme E... relèvent appel des jugements du 16 novembre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux rejetant leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ".

4. Les requérants soutiennent être personnellement exposés à des risques de violences dans leur pays d'origine dès lors que, Mme E...ayant été promise en mariage dès son plus jeune âge par son père à une autre personne que M.E..., ils ont subi une vendetta familiale qui les a astreints à fuir le pays. Ils n'apportent toutefois à l'appui de leurs allégations, qui n'ont pas été regardées comme probantes par l'OFPRA et par la CNDA, aucun élément justificatif nouveau de nature à établir la réalité du risque dont ils se prévalent, ni d'ailleurs qu'ils n'auraient plus aucun lien avec les membres de leurs familles respectives au Kosovo. M. et Mme E...font également valoir qu'ils souffrent de troubles psychologiques pour lesquels ils suivent un traitement médicamenteux mais, et alors au demeurant que leurs demandes de titres de séjour n'étaient pas fondées sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ils n'établissent aucunement par les pièces qu'ils produisent ne pas pouvoir bénéficier dans leur pays d'origine d'un traitement adapté à leur état de santé. S'ils ajoutent qu'ils résident depuis près de trois ans en France, où est né leur enfant, inscrit en maternelle depuis septembre 2016, et font valoir qu'ils sont bien insérés, M. E...ayant notamment bénéficié de plusieurs contrats de travail et disposant d'une promesse d'embauche, aucune de ces circonstances ne répond à des considérations humanitaires ni ne caractérise un motif exceptionnel d'admission au séjour. Par suite, en refusant l'admission exceptionnelle au séjour de M. et MmeE..., le préfet de la Gironde n'a ni méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation des intéressés.

5. Pour les motifs exposés au point 4, le préfet de la Gironde, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait cru lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en fixant le Kosovo comme pays de renvoi.

6. Enfin, la circonstance que les requérants ne constituent pas une menace pour l'ordre public ne fait pas, par elle-même, obstacle à l'édiction à leur encontre d'une interdiction de retour sur le territoire français sur le fondement du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour prendre de telles décisions à l'égard de M. et MmeF..., le préfet de la Gironde s'est fondé sur les circonstances que les intéressés se maintiennent irrégulièrement en France en dépit de précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre en 2015, qui n'ont pas été exécutées, qu'ils ne remplissent pas les conditions pour séjourner en France, y compris à titre exceptionnel, qu'ils résident depuis peu sur le territoire national et qu'ils disposent d'attaches familiales dans leur pays d'origine. Au regard de ces motifs, le préfet de la Gironde a pu, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, prononcer à l'encontre des requérants des mesures d'interdiction de retour sur le territoire français et fixer la durée de cette interdiction à deux ans.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes respectives. Par suite, leurs conclusions à fin d'injonction, de même que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent rejetées.

DECIDE

Article 1er : Les requêtes de M. E...et de Mme E...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E..., à Mme D...C...épouse E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 20 avril 2017.

Le rapporteur,

Laurent POUGET Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Virginie MARTY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 16BX04096, 16BX04097


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04096,16BX04097
Date de la décision : 20/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-20;16bx04096.16bx04097 ?
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