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31/01/2017 | FRANCE | N°16BX03233

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2017, 16BX03233


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 2 février 2016 du préfet de la Guadeloupe lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1600086 du 21 juillet 2016, le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 septembre 2016, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal

administratif de Guadeloupe du 21 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 2 février 2016 du préfet de la Guadeloupe lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1600086 du 21 juillet 2016, le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 septembre 2016, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Guadeloupe du 21 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant haïtien né le 11 décembre 1973, est entré en France en 1999 selon ses déclarations. Suite à son interpellation le 2 février 2016, le préfet de la Guadeloupe l'a obligé à quitter le territoire français sans délai par arrêté du même jour. M. A...relève appel du jugement n° 1600086 du 21 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de Guadeloupe :

2. Aux termes de l'article R. 776-9 du code de justice administrative : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. Cette notification mentionne la possibilité de faire appel et le délai dans lequel cette voie de recours peut être exercée ". En application de ces dispositions combinées à celles de l'article R. 811-5 du même code relatif aux délais supplémentaires de distance, M. A...disposait d'un délai franc de deux mois à compter de la notification du jugement, de sorte que sa requête d'appel, enregistrée le 23 septembre 2016, n'était pas tardive. La fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Guadeloupe doit, par suite, être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. D'une part, l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur. ".

4. D'autre part, indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est père d'un enfant français, D..., né le 17 juillet 2009. En vertu de l'ordonnance du 21 mai 2013 rendue par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre, le requérant exerce conjointement l'autorité parentale sur son enfant, dispose d'un droit de visite et d'hébergement et doit payer une contribution à l'entretien et à l'éducation de celui-ci de 100 euros par mois. Par une attestation du 17 septembre 2016, la mère du jeune D...certifie que le requérant s'occupe de son enfant depuis sa naissance. Cette affirmation n'est pas contredite par le fait que l'intéressé a procédé tardivement, en 2012, à la reconnaissance de cet enfant, et le caractère tardif de cette reconnaissance ne saurait davantage suffire à établir son caractère frauduleux. En outre, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, M. A...établit par la production de nombreux mandats cash, datés et établis au nom de la mère du jeuneD..., qu'il s'acquitte depuis mars 2013 du paiement de la contribution à l'entretien et à l'éducation de son fils mise à sa charge par l'ordonnance précitée, ainsi que le confirme d'ailleurs la mère de l'enfant dans son attestation. Dans ces conditions, le requérant établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis au moins deux ans à la date de l'arrêté attaqué, et remplissait dès lors à cette date les conditions précitées du 6° de l'article L. 313-11 pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, le préfet de la Guadeloupe ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées, prendre à son encontre l'arrêté attaqué.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 2 février 2016.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. D'une part, aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " L'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ".

8. D'autre part, aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ".

9. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Guadeloupe, après avoir muni M. A...d'une autorisation provisoire de séjour, procède à un nouvel examen de la situation de l'intéressé dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la notification de cet arrêt.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1600086 du tribunal administratif de Guadeloupe du 21 juillet 2016 et l'arrêté du 2 février 2016 du préfet de la Guadeloupe sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à M. B...A...une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

4

N° 16BX03233


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03233
Date de la décision : 31/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POUGET L.
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre DUPUY
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DIALLO BABACAR

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-01-31;16bx03233 ?
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