La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2016 | FRANCE | N°16BX01740

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2016, 16BX01740


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le refus de séjour et la mesure d'éloignement prononcés à son encontre par un arrêté du 22 juillet 2015 du préfet de la Gironde.

Par un jugement n° 1504979 du 25 janvier 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 mai 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour d'annuler ce jugement du 25 janvier 2016 du tribunal

administratif de Bordeaux, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 juillet 2015, d'enjoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le refus de séjour et la mesure d'éloignement prononcés à son encontre par un arrêté du 22 juillet 2015 du préfet de la Gironde.

Par un jugement n° 1504979 du 25 janvier 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 mai 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour d'annuler ce jugement du 25 janvier 2016 du tribunal administratif de Bordeaux, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 juillet 2015, d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 et l'accord franco-camerounais relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire, signé à Yaoundé le 21 mai 2009 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

2. Contrairement à ce que fait valoir le préfet de la Gironde, il ressort des pièces du dossier, notamment de ses bulletins scolaires, que M.B..., ressortissant camerounais, est entré en France en 2009, à l'âge de seize ans, pour y rejoindre sa soeur aînée qui résidait régulièrement en France avec sa fille de nationalité française. Il n'est pas sérieusement contesté que le requérant, qui a perdu sa mère, décédée en 2011, n'avait jamais connu son père. A la date du 22 juillet 2015 à laquelle le préfet de la Gironde lui a refusé le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement, notamment, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il vivait en France depuis plus de six ans, entouré de sa soeur, de deux tantes et de ses nombreux cousins. Il a été scolarisé à compter de l'année 2009. Il est établi par les bulletins scolaires et les attestations, notamment celle du chef d'établissement, versées au dossier qu'en dépit de ses difficultés d'adaptation, cet élève, qualifié lors de son arrivée en France par ses professeurs comme dépourvu de " toutes les bases ", a obtenu, trois ans plus tard, en octobre 2013, son baccalauréat professionnel de " technicien de maintenance des systèmes énergétiques et climatiques ". Contrairement à ce qui est soutenu en défense, M. B... a recherché activement un emploi et obtenu de nombreuses missions d'intérim. Il fait valoir sans être sérieusement contredit que l'absence d'autonomie financière opposée par le préfet s'explique tant par le rejet de sa demande de titre de séjour en qualité d'étudiant, qui lui aurait permis de poursuivre sa formation en alternance que par le refus d'autorisation de travail. Le 4 mai 2015, antérieurement à l'édiction de l'arrêté contesté, M. B...bénéficiait d'une promesse d'embauche en qualité de chauffeur-livreur au sein de la société " Top Déco et Messageries ", qui avait sollicité une autorisation de travail dès le mois de mars 2015. Dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu tant du jeune âge auquel l'intéressé est entré en France que de sa volonté d'intégration et en l'absence d'élément permettant de présumer qu'il aurait conservé au Cameroun d'autres attaches que son jeune frère et l'oncle qui l'a recueilli, le refus de séjour qui lui a été opposé a porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour, la mesure d'éloignement est privée de base légale. Il en résulte et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 25 janvier 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

3. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. B...d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de la Gironde d'y procéder dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

4. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à MeC..., le recouvrement de cette somme valant renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 25 janvier 2016 du tribunal administratif de Bordeaux et l'arrêté du 22 juillet 2015 du préfet de la Gironde sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer un titre de séjour à M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me C...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, le recouvrement de cette somme valant renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

''

''

''

''

2

N° 16BX01740


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01740
Date de la décision : 18/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Convention européenne des droits de l'homme - Droits garantis par la convention - Droit au respect de la vie privée et familiale (art - 8) - Violation - Séjour des étrangers.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-18;16bx01740 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award