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04/10/2016 | FRANCE | N°14BX01903

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2016, 14BX01903


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier de Melle à lui payer, avec intérêts légaux, d'une part, la somme de 601,08 euros correspondant à cinq jours de congés annuels, deux jours de congés au titre de la réduction de temps de travail (RTT), des jours fériés travaillés non pris et au titre des heures supplémentaires, d'autre part, une indemnité de 1 000 euros pour résistance abusive.

Par un jugement n° 1101753 du 2 octobre 2013, le magistr

at désigné par le tribunal administratif de Poitiers a condamné le centre hospitalie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier de Melle à lui payer, avec intérêts légaux, d'une part, la somme de 601,08 euros correspondant à cinq jours de congés annuels, deux jours de congés au titre de la réduction de temps de travail (RTT), des jours fériés travaillés non pris et au titre des heures supplémentaires, d'autre part, une indemnité de 1 000 euros pour résistance abusive.

Par un jugement n° 1101753 du 2 octobre 2013, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers a condamné le centre hospitalier de Melle au paiement des intérêts légaux sur le montant de 54,31 euros réglé en cours d'instance, a rejeté le surplus de la demande de Mme A...et a mis à sa charge la somme de 1 200 euros à payer au centre hospitalier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif enregistrés les 3 décembre 2013 et 3 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, MmeA..., représentée par la SCP Masse Dessen-Touvenin-Coudray a demandé l'annulation du jugement du 2 octobre 2013 du magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté le surplus de ses demandes et la condamnation du centre hospitalier à lui payer les montants de 1 546,77 euros et 1 000 euros avec intérêts au taux légal eux-mêmes capitalisés, ainsi que la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

- le code civil ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- le décret n° 2002-8 du 4 janvier 2002 ;

- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;

- le décret n° 2002-788 du 3 mai 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau,

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le centre hospitalier de Melle.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., dont le contrat à durée déterminée au centre hospitalier de Melle expirant le 30 juin 2009 n'a pas été renouvelé, a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant au bénéfice, qui lui a été refusé par une décision du 7 juin 2011, d'une indemnité compensatrice de 601,08 euros correspondant à cinq jours de congés annuels, deux jours de réduction du temps de travail, des jours fériés travaillés non pris et des heures supplémentaires, assortie d'une demande tendant à l'allocation de dommages et intérêts de 1 000 euros pour résistance abusive. Par un jugement du 2 octobre 2013, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers a condamné le centre hospitalier de Melle au paiement des intérêts légaux à compter du 8 août 2011 sur le montant de 54,31 euros réglé en cours d'instance au titre des heures supplémentaires, a rejeté le surplus des conclusions de Mme A...et a mis à sa charge la somme de 1 200 euros à payer au centre hospitalier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme A...fait appel de ce jugement en tant que, par ses articles 2 et 3, il a rejeté le surplus de sa demande, d'un montant total de 1 546,77 euros, puis alloué des frais de procès au défendeur.

2. En vertu de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin statue en audience publique et après audition du rapporteur public : " 2° Sur les litiges relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires ou agents de l'Etat et des autres personnes ou collectivités publiques, ainsi que des agents ou employés de la Banque de France, à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline et la sortie du service (...) 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (...) ".

3. Les conclusions présentées par Mme A...dans sa requête introductive d'instance, qui tendent à la " condamnation " du centre hospitalier de Melle à lui payer les montants qu'elle estime lui être dus en exécution de son contrat de travail, tendent au règlement de sommes impayées et se rapportent aux conséquences financières de la sortie du service. Elles ne présentent donc pas un caractère indemnitaire, au sens du 7° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative et ne se rapportent à aucun des litiges énumérés par les autres dispositions du même article. Par suite, même assorties de conclusions accessoires tendant à l'allocation d'une indemnité pour résistance abusive au paiement, la requête de Mme A...n'était pas au nombre des litiges sur lesquels un magistrat peut statuer seul. Il suit de là que ce jugement est irrégulier. Il y a lieu, dès lors et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres irrégularités alléguées, de l'annuler dans les limites des conclusions d'appel de MmeA..., et, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Poitiers.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 du décret du 6 février 1991 : " I. - L'agent contractuel en activité a droit, compte tenu de la durée de service effectuée, à un congé annuel rémunéré, déterminé dans les mêmes conditions que celui accordé aux fonctionnaires titulaires des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. (...) II. - En cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire ou à la fin d'un contrat à durée déterminée, l'agent qui, du fait de l'administration, n'a pu bénéficier de tout ou partie de ses congés annuels a droit à une indemnité compensatrice de congés annuels. / L'indemnité compensatrice de congés annuels est égale au 1/10 de la rémunération totale brute perçue par l'agent au cours de sa période d'emploi, entre le 1er janvier et le 31 décembre de l'année en cours. L'indemnité est proportionnelle au nombre de jours de congés annuels dus non pris. (...) L'indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération que l'agent aurait perçue pendant la période de congés annuels dus et non pris. ".

5. Il est constant que compte tenu de son arrêt de travail pour maladie du 2 au 30 juin 2009, MmeA..., n'a pu bénéficier, avant l'expiration de son contrat, des congés annuels programmés à la même date. Elle ne peut ainsi être regardée comme n'ayant pu bénéficier d'une partie de ses congés annuels " du fait de l'administration " au sens des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 6 février 1991. Le centre hospitalier n'a donc pas fait une inexacte application de ce texte, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté. Et aucun principe général du droit ne reconnaît aux agents publics non titulaires un droit à une indemnité compensatrice de congés payés dans le cas où l'agent cesse ses fonctions avant d'avoir pu bénéficier de son congé.

6. Toutefois, après l'expiration du délai de transposition, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives. Il résulte du paragraphe 1 de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, tel qu'interprété par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009, qu'il fait obstacle à l'extinction du droit au congé annuel à l'expiration d'une certaine période lorsque le travailleur a été en congé de maladie durant tout ou partie de cette période. Par suite, les dispositions de l'article 8 du décret du 6 février 1991, qui ne réservent pas le cas des agents dans l'impossibilité de prendre leurs congés annuels en raison d'un congé de maladie et s'opposent à l'indemnisation de ces congés lorsqu'il est mis fin à la relation de travail, sont incompatibles dans cette mesure avec les objectifs de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. Il en résulte que Mme A...peut prétendre à l'indemnité compensatrice des congés annuels non pris à compter du 23 mars 2005, date d'expiration du délai de transposition de la directive 2003/88/CE. Le centre hospitalier fait valoir sans être sérieusement contredit qu'il ressort du planning établi pour la période du 1er janvier au 31 juin 2009, versé au dossier, que Mme A...avait acquis un solde de trois jours de congés et non de cinq jours. Dans ces conditions, la requérante peut seulement prétendre à une indemnité pour ces trois jours.

7. En deuxième lieu, Mme A...n'invoque aucun texte qui permettrait de bénéficier d'une indemnité compensatrice pour des jours de RTT non pris ou les jours fériés travaillés et non récupérés et ne soutient pas remplir les conditions réglementaires pour se voir attribuer une telle indemnité. Si elle a entendu invoquer le principe général du droit à la rémunération après service fait, cette garantie fondamentale pour les agents publics, consacrée par l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983, s'applique aux rémunérations reposant sur un fondement légal.

8. Enfin, le paiement en cours de procédure du montant sollicité au titre des heures supplémentaires ne révèle par lui-même aucune résistance abusive. En l'absence, au surplus, de tout élément justifiant d'un préjudice spécifique, distinct de celui réparé par les intérêts légaux, la demande d'indemnité fondée sur la résistance présentée comme abusive, du centre hospitalier de Melle ne peut être accueillie.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...peut seulement prétendre au règlement de l'indemnité compensatrice pour trois jours de congés. En application de l'article 1153 du code civil, elle a droit aux intérêts de cette somme au taux légal à compter du 16 mars 2011, date à laquelle le centre hospitalier a reçu sa demande préalable. La capitalisation des intérêts ayant été demandée le 3 décembre 2013, date à laquelle un an d'intérêts étaient dus, il y sera procédé à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeA..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer au centre hospitalier de Melle une somme quelconque au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de condamner sur le même fondement le centre hospitalier à payer la somme de 1 500 euros à MmeA....

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du 2 octobre 2013 du magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers sont annulés.

Article 2 : Le centre hospitalier de Melle versera à MmeA..., d'une part, l'indemnité compensatrice correspondant à trois jours de congés assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2011 eux-mêmes capitalisés à chaque échéance annuelle ultérieure à compter du 3 décembre 2013, d'autre part, la somme de 1 500 euros de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme A...et les conclusions du centre hospitalier de Melle sont rejetés.

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