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07/04/2016 | FRANCE | N°14BX03580

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 07 avril 2016, 14BX03580


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Labeyrie a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la pénalité à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, en complément du versement de la taxe d'apprentissage, sur le fondement des dispositions du II et du V de l'article 230 H du code général des impôts.

Par un jugement n° 1301040 du 30 octobre 2014, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 déc

embre 2014, la société Labeyrie, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Labeyrie a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la pénalité à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, en complément du versement de la taxe d'apprentissage, sur le fondement des dispositions du II et du V de l'article 230 H du code général des impôts.

Par un jugement n° 1301040 du 30 octobre 2014, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2014, la société Labeyrie, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 30 octobre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge de la pénalité de 100 % prévue à l'article 230 H du code général des impôts d'un montant de 76 393 euros qui lui a été infligée.

.............................................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2013-371 QPC du 7 mars 2014 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue,

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la société Labeyrie.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations de la société Labeyrie au titre du versement de la contribution supplémentaire à l'apprentissage pour l'année 2012, le préfet de la région Aquitaine a, par une décision du 19 avril 2013, soumis la société au versement d'une contribution supplémentaire à la taxe d'apprentissage d'un montant de 76 393 euros et assorti ce versement d'une majoration équivalente à l'insuffisance de la contribution constatée. Une somme totale de 152 786 euros a dès lors été réclamée à la société. Sans remettre en cause la réalité et le montant de l'insuffisance de son versement de la contribution supplémentaire à l'apprentissage, la société Labeyrie a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la décharge de la pénalité de 76 393 euros qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 230 H du code général des impôts, en complément du versement de la contribution supplémentaire à l'apprentissage. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 30 octobre 2014 qui a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article 230 H du code général des impôts : " I. - Il est institué une contribution supplémentaire à l'apprentissage. (...) V. - Le montant de la contribution mentionnée au I est versé aux organismes collecteurs agréés mentionnés aux articles L. 6242-1 et L. 6242-2 du code du travail avant le 1er mars de l'année suivant celle du versement des salaires. A défaut de versement ou en cas de versement insuffisant à la date précitée, le montant de la contribution est versé au comptable public compétent selon les modalités définies au III de l'article 1678 quinquies, majoré de l'insuffisance constatée. ".

3. La société requérante soutient, en premier lieu, que les dispositions précitées méconnaitraient le principe de proportionnalité des sanctions garanti par les stipulations de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du fait de l'absence d'un pouvoir de modulation de la sanction dévolu au juge.

4. Par la décision n° 2013-371 QPC rendue le 7 mars 2014, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution les dispositions précitées du premier alinéa du paragraphe V de l'article 230 H du code général des impôts, sous une réserve sans incidence dans le présent litige. Le Conseil constitutionnel a notamment dit pour droit que "le principe d'individualisation des peines qui découle de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen implique que la majoration des droits, lorsqu'elle constitue une sanction, ne puisse être appliquée que si l'administration, sous le contrôle du juge, l'a expressément prononcée en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce" et qu' "en fixant une majoration de la contribution égale au montant de la contribution due, le V de l'article 230 H institue une sanction qui ne revêt pas, en elle-même, un caractère manifestement disproportionné". Ce faisant, le Conseil constitutionnel n'a nullement subordonné la constitutionnalité de la pénalité à la possibilité pour le juge de la moduler. Par suite, le moyen doit être écarté.

5. La société soutient, en deuxième lieu, que les dispositions précitées ne sont compatibles avec l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que si le juge de l'impôt se voie reconnaître le pouvoir de moduler la sanction qui lui est appliquée.

6. Aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) équitablement (...) par un tribunal qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) ".

7. L'objectif de la majoration prévue par les dispositions de l'article 230 H du code général des impôts est essentiellement de réprimer les défauts et retards volontaires de liquidation ou d'acquittement de l'impôt. Elle vise à inciter le contribuable à s'acquitter avec exactitude de ses obligations déclaratives afin de permettre le bon fonctionnement du contrôle ultérieur exercé par l'administration. Ainsi, cette majoration présente le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elle vise et le litige relatif à son application procède d'une accusation en matière pénale au sens des stipulations précitées.

8. Le législateur a prévu dans le code général des impôts plusieurs sanctions qui visent à réprimer des comportements de non-respect des obligations déclaratives. Les dispositions précitées de l'article 230 H du code général des impôts proportionnent la majoration qu'elles instituent au montant des sommes sur lesquelles porte l'infraction que l'amende vise à réprimer. Ainsi, la loi a elle-même assuré, dans une certaine mesure, la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés. De plus, ainsi que l'a relevé le Conseil constitutionnel dans la décision susmentionnée, le juge de l'impôt exerce un plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration pour appliquer la majoration et décide, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir cette amende, soit d'en prononcer la décharge. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 230 H du code général des impôts seraient incompatibles avec les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. En troisième lieu, la société Labeyrie fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute et que l'absence de versement de la contribution supplémentaire à l'apprentissage résulte d'un défaut du logiciel de son organisme collecteur n'ayant pas mis à sa disposition un formulaire en ligne approprié à sa situation. Toutefois, cette circonstance est sans influence sur l'obligation pour l'organisme de s'assurer lui-même du versement de la contribution qui lui incombe et d'effectuer les démarches nécessaires pour s'en acquitter. Par suite, les arguments invoqués par la société relatifs à cet éventuel dysfonctionnement sont inopérants et ne sont pas de nature à justifier la décharge de la majoration qui lui a été appliquée.

10. Il résulte de ce qui précède que la société Labeyrie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête tendant à l'annulation dudit jugement et à la décharge des impositions litigieuses ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de la société Labeyrie est rejetée.

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N° 14BX03580


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX03580
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés - Taxe d'apprentissage.

Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : GASSER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-04-07;14bx03580 ?
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