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31/03/2016 | FRANCE | N°15BX03755

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 31 mars 2016, 15BX03755


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2015, complétée par un mémoire enregistré le 27 janvier 2016, la société par actions simplifiée (SAS) Sotourdi et la société civile immobilières (SCI) HJC, représentées par Me Bouyssou, demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 septembre 2015 en tant qu'elle a admis trois des quatre recours qui lui avaient été présentés par le préfet de l'Aveyron, la société Distaff et la SAS Josama sous les numéros 2737T, 2738T et 2751D

, et a émis un avis défavorable au projet d'extension du supermarché Carrefour Market ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2015, complétée par un mémoire enregistré le 27 janvier 2016, la société par actions simplifiée (SAS) Sotourdi et la société civile immobilières (SCI) HJC, représentées par Me Bouyssou, demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 septembre 2015 en tant qu'elle a admis trois des quatre recours qui lui avaient été présentés par le préfet de l'Aveyron, la société Distaff et la SAS Josama sous les numéros 2737T, 2738T et 2751D, et a émis un avis défavorable au projet d'extension du supermarché Carrefour Market de Saint-Affrique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

A... --------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- les observations de Me Bouyssou, avocat de la SAS Sotourdi et de la SCI HJC, celles de Me Jauffret, avocat de la SAS Josama et celles de Me Gauci, avocat de la société Distaff ;

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Sotourdi exploite à Saint-Affrique, sur un terrain appartenant à la société civile immobilière (SCI) HJC, un supermarché " Carrefour Market " dont la surface de vente autorisée était de 2 300 m². A la suite d'une crue de la Sorgues ayant entraîné une importante inondation le 28 novembre 2014, ce supermarché a dû fermer. Afin de procéder à la régularisation des travaux entrepris au début de l'année 2015 pour permettre la réouverture du supermarché le 10 mars 2015, la SCI HJC a déposé le 5 février 2015 un dossier de demande de permis de construire pour la rénovation de la façade principale du supermarché par l'extension du mail et la création d'un sas vitré et le 12 février 2015 un dossier de permis de construire concernant la création de bureaux sur pilotis. Dans le cadre de ces travaux la SAS Sotourdi a projeté d'étendre de 630 m² la surface de vente du supermarché. En application de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le projet de la SAS Sotourdi a été soumis à la commission départementale d'aménagement commercial de l'Aveyron qui a, le 13 mai 2015, émis un avis favorable à la demande d'autorisation d'extension de la surface de vente du supermarché " Carrefour Market ". Alors que cet avis a fait l'objet de quatre recours entre le 4 et le 18 juin 2015, le maire de Saint-Affrique a, par un arrêté du 11 juin 2015, accordé à la SCI HJC le permis de construire sollicité, lequel autorise également l'exploitation commerciale de l'extension de la surface de vente de 630 m². Le 10 septembre 2015, la Commission nationale d'aménagement commercial a, après avoir rejeté le recours de la société Macris et admis les recours du préfet de l'Aveyron et des sociétés Josama et Distaff, émis un avis défavorable au projet d'extension de 630 m² de la surface de vente du supermarché " Carrefour Market " de Saint-Affrique. La SAS Sotourdi et la SCI HJC sollicitent l'annulation de cet avis en tant qu'il a admis les recours du préfet de l'Aveyron et des sociétés Josama et Distaff et qu'il a émis un avis défavorable au projet d'extension.

2. En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant du caractère régulier de sa composition. Dès lors, en se bornant à soutenir que la commission était irrégulièrement composée lors de sa séance du 10 septembre 2015, les sociétés requérantes n'assortissent pas ce moyen des précisions susceptibles de permettre d'en apprécier le bien-fondé.

3. En deuxième lieu, si les sociétés HJC et Sotourdi soutiennent que les dispositions de l'article R. 752-35 du code de commerce relatives aux documents devant être communiqués aux membres de la Commission nationale d'aménagement commercial auraient été méconnues, ce moyen n'est pas davantage assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

4. En troisième lieu, l'article R. 752-51 du code de commerce, alors applicable, dispose que : " (...) Le commissaire du Gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission. Il donne son avis sur les demandes examinées par la Commission nationale d'aménagement commercial au regard des auditions effectuées. " Il résulte de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, que les directeurs d'administration centrale peuvent signer, au nom du ministre et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité. En vertu de l'article 3 du même décret, les directeurs d'administration centrale peuvent donner délégation aux fonctionnaires de catégorie A et aux agents contractuels chargés de fonctions d'un niveau équivalent pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles ils ont eux-mêmes reçu délégation.

5. Il résulte de l'application combinée des dispositions du décret du 27 juillet 2005 et de la décision du 2 janvier 2014, régulièrement publiée au Journal officiel de la République française du 4 janvier 2014, habilitant M. D...B...à signer, au nom de la ministre de l'égalité des territoires et du logement et du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, tous actes dans la limite des attributions de la sous-direction de la qualité du cadre de vie que M. D...B...a été régulièrement habilité pour signer l'avis émis par le ministre chargé de l'urbanisme.

6. Il résulte de l'application combinée des dispositions du décret du 27 juillet 2005 et de l'article 29 de l'arrêté du 19 septembre 2014, régulièrement publié au Journal officiel de la République française du 24 septembre 2014, habilitant M. E...C...à signer, au nom du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, tous actes dans la limite des attributions du service du tourisme, du commerce, de l'artisanat et des services, que M. E... C...a été régulièrement habilité pour signer l'avis émis par le ministre chargé du commerce.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 752-17 du code du commerce : " I. Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. La Commission nationale d'aménagement commercial émet un avis sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6 du présent code, qui se substitue à celui de la commission départementale (...) ". Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ;b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. (...) ". Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code. L'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs.

8. Pour apprécier si un projet compromet la réalisation des objectifs de développement durable et de protection des consommateurs, la commission nationale peut légalement prendre en compte le risque d'inondation, lequel est au nombre des risques naturels visés notamment au d) du 3° de l'article L.752-6 précité, pour lesquels la commission doit être attentive aux mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'instruction de la direction départementale des territoires de l'Aveyron, que si le terrain d'assiette du projet est situé en zone bleu clair du plan de prévention du risque inondation Sorgues-Dordou approuvé le 24 février 2003, ce qui correspond à un risque modéré en secteur urbanisé, ce classement est erroné en raison d'erreurs de levés topographiques et qu'une révision du plan de prévention du risque inondation a donc été initiée en 2012 qui devrait aboutir, selon l'unité prévention des risques de la direction départementale des territoires de l'Aveyron, à un classement dans une zone de risque fort d'inondation. Ces éléments, conjugués avec l'inondation survenue en novembre 2014 au cours de laquelle l'intégralité du terrain d'assiette du projet a été submergée par plus d'un mètre d'eau avec de forts courants, démontrent le caractère inondable du terrain. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet, qui implique de par l'augmentation de sa surface de vente une augmentation de la clientèle exposée au risque, envisagerait des aménagements de nature à assurer la sécurité des consommateurs. En outre, il ressort également des pièces du dossier qu'en se fondant sur ce seul risque, la Commission nationale d'aménagement commercial aurait émis le même avis. Par suite, quel que soit le bien-fondé des autres motifs de l'avis, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 752-6 du code de commerce doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées, que la SAS Sotourdi et la SCI HJC ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'avis émis par la Commission nationale d'aménagement commercial le 10 septembre 2015.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demandent la SAS Sotourdi et la SCI HJC au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SAS Sotourdi et de la SCI HJC une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Josama et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Sotourdi et de la SCI HJC est rejetée.

Article 2 : La SAS Sotourdi et la SCI HJC verseront à la SAS Josama une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Sotourdi, à la SCI HJC, à la SAS Josama, à la SAS Distaff, au préfet de l'Aveyron et à la Commission nationale d'aménagement commercial. Copie en sera adressée au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

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No 15BX03755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à trois)
Numéro d'arrêt : 15BX03755
Date de la décision : 31/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-03-31;15bx03755 ?
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