La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/03/2016 | FRANCE | N°15BX03224

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 10 mars 2016, 15BX03224


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet du Tarn du 19 mars 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501841 du 22 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 octobre 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la co

ur :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 septembre 2015 ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet du Tarn du 19 mars 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501841 du 22 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 octobre 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 septembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 19 mars 2015 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

----------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Florence Madelaigue a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., ressortissante de nationalité algérienne, entrée en France le 2 août 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa C " court séjour circulation " a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence au titre de la vie privée et familiale le 14 octobre 2014. Elle relève appel du jugement du 22 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Tarn du 19 mars 2015 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi.

Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 5 novembre 2015, Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, sa demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle est devenue sans objet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

3. En premier lieu, conformément aux exigences de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, la décision contestée vise l'accord franco-algérien et les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet a fait application et mentionne les circonstances de fait propres à la situation de MmeC..., et notamment, la date à laquelle elle est entrée en France, les conditions de son séjour, la promesse d'embauche pour un emploi d'assistante de direction, requalifiée en emploi de vendeuse, dont elle se prévaut mais également son absence de qualification pour ce poste et l'avis défavorable de la DIRECCTE en date du 1er décembre 2014. Elle relève par ailleurs que si la requérante, qui est entrée à l'âge de 32 ans en France, a un projet de vie commune avec un ressortissant de nationalité française il n'existe aucune communauté de vie entre eux. Enfin, elle précise que Mme C...n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Ainsi, la décision attaquée, qui n'a pas à relever de manière exhaustive l'ensemble des éléments de la situation personnelle et familiale de MmeC..., ni à répondre à l'ensemble des arguments qu'elle invoque, est suffisamment motivée au regard des exigences posées par la loi du 11 juillet 1979.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

5. MmeC..., qui vit en France depuis le 2 août 2014 avec son fils Yacine, né le 1er décembre 2007 en Algérie et scolarisé en France, fait valoir qu'elle est divorcée du père de son enfant depuis 2008 et que ses attaches familiales se trouvent désormais en France où résident ses parents et son frère, tous les trois de nationalité française. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante est entrée en France récemment et qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans en Algérie, où demeure également sa soeur. En outre, si Mme C...soutient entretenir une relation avec un ressortissant de nationalité française avec lequel elle a formé un projet de mariage, les pièces qu'elle produit à l'appui de ses allégations, et notamment des billets de train, une attestation peu circonstanciée de l'intéressé et la réservation d'une chambre d'hôtel, ne permettent pas d'établir la réalité de cette relation. Par ailleurs, si l'intéressée se prévaut d'une promesse d'embauche, qui au demeurant a fait l'objet d'un avis défavorable de la DIRECCTE, et de plusieurs attestations témoignant de son intégration, ces éléments ne sauraient à eux seuls justifier que le centre de ses intérêts privés et familiaux seraient désormais établis en France alors que la durée de sa présence sur le territoire national était inférieure à une année à la date de la décision attaquée. Par suite, et compte tenu des conditions de son séjour en France, la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale. La décision attaquée n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeC....

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, il n'est pas établi que le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé serait entaché d'illégalité. Dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée.

7. En deuxième lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

9. Mme C...soutient que son fils est scolarisé en France et qu'il entretient des liens intenses avec ses grands-parents. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa scolarité en France est récente et que rien ne s'oppose à ce qu'il la poursuive en Algérie. Il ressort encore des pièces du dossier que par un jugement du tribunal de Hussein Dey (Algérie) il a été décidé un droit de visite au père de l'enfant ainsi que les modalités de la participation de ce dernier à l'entretien de l'enfant. Dans ces conditions, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. En premier lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, il n'est pas établi que le refus de renouvellement du titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire seraient entachés d'illégalité. Dès lors, l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écartée.

11. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination de Mme C...vise les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, elle mentionne que les risques allégués en cas de retour dans son pays d'origine ne sont étayés par aucun élément probant, qu'elle n'a pas souhaité déposer une demande d'asile et que l'intéressée n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Algérie. La décision fixant le pays de renvoi est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ". Il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui doit faire l'objet d'une mesure d'éloignement de s'assurer, sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

13. Si Mme C...allègue être exposée à des risques pour sa sécurité en cas de retour en Algérie du fait de son appartenance à la communauté mozabite, et se prévaut d'articles de presse qu'elle produit devant la cour, ces documents ne permettent pas de les établir. Au demeurant, Mme C...n'a pas déposé une demande d'asile lors de son entrée en France. Dans ces conditions, la requérante n'établit pas la réalité des risques auxquels elle allègue être personnellement exposée en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, en fixant le pays de renvoi, le préfet n'a pas méconnu les stipulations et les dispositions précitées.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991doivent également être rejetées.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme C...relatives à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

''

''

''

''

2

N° 15BX03224


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX03224
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : FRANCOS

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-03-10;15bx03224 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award