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04/02/2016 | FRANCE | N°14BX01515

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 04 février 2016, 14BX01515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) de Gusomani a sollicité l'attribution à titre gracieux de la parcelle cadastrée section F 256 située sur le territoire de la commune de Saint-Laurent du Maroni, en se prévalant de la qualité de titulaire d'un bail sur ce terrain. Par deux requêtes distinctes, ce GAEC a sollicité l'annulation, d'une part, de la décision implicite et, d'autre part, de la décision explicite par lesquelles le directeur des finances publiques de la Guyane a rejeté sa dem

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Par un jugement commun n°s 1201450,130055 du 27 février 2014, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) de Gusomani a sollicité l'attribution à titre gracieux de la parcelle cadastrée section F 256 située sur le territoire de la commune de Saint-Laurent du Maroni, en se prévalant de la qualité de titulaire d'un bail sur ce terrain. Par deux requêtes distinctes, ce GAEC a sollicité l'annulation, d'une part, de la décision implicite et, d'autre part, de la décision explicite par lesquelles le directeur des finances publiques de la Guyane a rejeté sa demande.

Par un jugement commun n°s 1201450,130055 du 27 février 2014, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté ces deux requêtes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2014, le GAEC de Gusomani, représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1201450, 130055 du tribunal administratif de la Guyane du 27 février 2014 rejetant ses demandes d'annulation des décisions implicite et explicite du directeur des finances publiques de la Guyane refusant de lui attribuer la parcelle cadastrée section F 256 ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre à la direction des finances publiques de la Guyane, d'une part, de respecter les droits qu'il détient en vertu du bail emphytéotique du 25 octobre 1985 et, d'autre part, de réexaminer sa demande de cession de la parcelle cadastrée section F 256 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du domaine de l'Etat ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par convention du 25 octobre 1985, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) de Gusomani est devenu titulaire d'un bail emphytéotique valable du 3 octobre 1983 au 2 octobre 2012 portant sur la parcelle cadastrée section F 256 de la commune de Saint-Laurent-du-Maroni, située au lieu-dit " Plateau des Mines de Saint-Jean ", appartenant au domaine de l'Etat. Par un courrier daté du 16 mai 2012, le conseil du GAEC de Gusomani a demandé au directeur des finances publiques de la Guyane, d'une part, l'autorisation de clôturer à titre provisoire la parcelle cadastrée section F 256 et, d'autre part, de lui céder à titre gratuit ladite parcelle. Par deux requêtes distinctes, le GAEC de Gusomani a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la décision implicite et une décision explicite du 29 novembre 2012, laquelle semble être constituée du mémoire en défense opposé par l'administration à sa requête dirigée contre la décision implicite, rejetant lesdites demandes. Le GAEC de Gusomani relève appel du jugement commun du tribunal administratif de la Guyane en date du 27 février 2014 rejetant ses deux requêtes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le GAEC de Gusomani soutient que le tribunal a omis d'analyser sa demande d'acquisition " à la lumière des dispositions des articles L. 5141-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques ". Toutefois, dans ses écritures de première instance, le GAEC de Gusomani n'a invoqué aucun moyen tiré de la méconnaissance d'un article du code général de la propriété des personnes publiques. Par suite, l'omission à statuer alléguée manque en fait.

Sur la légalité des décisions du directeur des finances publiques de la Guyane :

En ce qui concerne la décision implicite :

3. Aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; infligent une sanction ; subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public ; rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. ". Aux termes de l'article 5 alors applicable de cette même loi : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

4. S'agissant du refus de cession à titre gracieux de terres dépendant du domaine privé de l'Etat aux titulaires de baux emphytéotiques, qui est un refus d'un avantage dont l'attribution ne constitue pas un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, il n'entre dans aucun des cas visés à l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979. Il n'avait donc pas à être motivé en vertu de cette loi. S'agissant du refus d'autorisation de clôturer la parcelle, si ce refus d'autorisation doit être motivé en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, le GAEC de Gusomani n'établit ni même n'allègue avoir demandé communication des motifs de la décision implicite. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne les deux décisions :

5. En se bornant à soutenir que " les services de la DAAF " devaient préalablement être saisis pour réaliser un constat de mise en valeur, sans invoquer la méconnaissance d'aucune norme, le GAEC requérant n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

6. Aux termes de l'article L. 5141-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Dans le département de la Guyane, les terres dépendant du domaine privé de l'Etat peuvent faire l'objet en vue de leur mise en valeur agricole et de la réalisation de travaux d'aménagement rural : (...)2° De cessions gratuites aux titulaires de baux emphytéotiques à vocation agricole (...) ". Aux termes de l'article R. 170-44-1 du code du domaine de l'Etat alors applicable : " Les terres qui font l'objet de baux emphytéotiques à vocation agricole depuis plus de dix ans peuvent, hors des zones protégées mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 5141-2 du code général des propriétés des personnes publiques, être cédées aux titulaires de ces baux si ceux-ci se sont acquittés de l'ensemble de leurs obligations et dans la limite des superficies qu'ils ont effectivement et personnellement mises en valeur. La demande de cession est formulée par le preneur auprès du préfet six mois au plus tard avant l'expiration du bail. En l'absence de décision du préfet à la date d'expiration du bail, ce dernier est prorogé de plein droit pour une durée d'un an. ".

7. Si les dispositions précitées instaurent un avantage au profit des titulaires de baux emphytéotiques à vocation agricole, il résulte de leurs termes mêmes que l'attribution de cet avantage ne constitue pas un droit, mais une simple faculté relevant de l'appréciation discrétionnaire de l'administration. Dans ces conditions, un refus de l'administration d'accorder la cession gratuite d'un terrain dépendant du domaine privé de l'Etat au titulaire d'un bail emphytéotique à vocation agricole satisfaisant aux conditions énoncées à l'article R. 170-44-1 du code du domaine de l'Etat ne saurait par lui-même révéler une méconnaissance ni de cet article ni de l'article L. 5141-1 du code général de la propriété des personnes publiques. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions doivent être écartés, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la validité, aux dates des décisions en litige, du bail emphytéotique dont se prévaut le GAEC de Gusomani et dont le préfet soutient qu'il a été résilié par acte authentique du 3 septembre 2002. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier, qui ne comportent notamment aucun élément sur la mise en valeur qu'aurait effectuée le GAEC, que les refus litigieux soient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Aux termes de l'article L. 5141-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Dans le département de la Guyane, les terres dépendant du domaine privé de l'Etat peuvent faire l'objet en vue de leur mise en valeur agricole et de la réalisation de travaux d'aménagement rural : (...) 3° De cessions gratuites à des agriculteurs installés (...) ". Aux termes de l'article L. 5141-4 de ce code : " Les cessions gratuites de terres à usage agricole mentionnées au 3° de l'article L. 5141-1 peuvent être consenties aux personnes se livrant à une activité essentiellement agricole qui, depuis leur installation, antérieure à la date du 4 septembre 2008 et pendant une période d'au moins cinq ans, ont réalisé l'aménagement et la mise en valeur des terres mises à leur disposition par l'Etat, les ont exploitées directement à des fins exclusivement agricoles et qui s'engagent à les maintenir à cet usage pendant trente ans à compter de la date de transfert de propriété. Pour bénéficier, dans les mêmes conditions, des dispositions du présent alinéa, les mêmes personnes qui exploitent ces terres sans titre régulier doivent présenter une demande avant le 31 décembre 2016. Lorsque la demande est présentée par une personne morale dont l'objet est essentiellement agricole, son capital doit être détenu à plus de 50 % par des personnes physiques qui remplissent à titre individuel les conditions fixées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 5141-5. Elle comporte l'engagement de maintenir l'usage agricole du bien cédé pendant trente ans. ".

9. Le GAEC de Gusomani soutient que si son bail emphytéotique n'était pas regardé comme valide, la parcelle en cause pouvait également lui être cédée en application de l'article L. 5141-4 du code général de la propriété des personnes publiques dans la mesure où toutes les conditions posées par cet article sont réunies. Toutefois, à l'instar des dispositions énoncées au point 6, cet article se borne à instituer une faculté de cession gratuite et non une obligation. Dès lors, la seule circonstance que l'ensemble des conditions posées par ces dispositions seraient satisfaites, ce qui n'est au demeurant pas démontré par les pièces du dossier, qui ne comportent, ainsi qu'il a été dit, aucune justification de la mise en valeur des terres, ne serait pas à elle seule de nature à révéler une méconnaissance de cette disposition. Ce moyen doit donc être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il besoin, d'une part, de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par l'Etat en première instance et en appel, et d'autre part, d'ordonner la production de l'original de l'acte authentique du 3 septembre 2002 prévoyant la cession de la parcelle cadastrée section F 420 en contrepartie de la résiliation du bail grevant la parcelle cadastrée section F 256, que le GAEC de Gusomani n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du directeur des finances publiques de la Guyane rejetant ses demandes d'autorisation de clôturer à titre provisoire la parcelle cadastrée section F 256 et de cession à titre gratuit de ladite parcelle. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête du GAEC de Gusomani est rejetée.

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No 14BX01515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à trois)
Numéro d'arrêt : 14BX01515
Date de la décision : 04/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CABINET MARCAULT DEROUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-02-04;14bx01515 ?
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