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06/10/2015 | FRANCE | N°15BX01081

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 06 octobre 2015, 15BX01081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Levyskyya demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2014 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1405301 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 15 octobre 2014 en tant qu'il fait obligation à M. Levyskyyde quitter l

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Levyskyya demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2014 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1405301 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 15 octobre 2014 en tant qu'il fait obligation à M. Levyskyyde quitter le territoire français et fixe le pays d'éloignement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à MeA....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 avril 2015 le préfet de la Dordogne demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 mars 2015 en tant qu'il annule l'obligation de quitter le territoire français et la désignation du pays d'éloignement ainsi qu'en tant qu'il met à la charge de l'Etat une somme à verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention d'application de l'accord de Schengen, du 19 juin 1990 ;

- le règlement (CE) n° 1030/2002 du Conseil du 13 juin 2002 établissant un modèle uniforme de titre de séjour pour les ressortissants de pays tiers ;

- le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontière Schengen), modifié ;

- la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Mège,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant M.Levyskyy.

Considérant ce qui suit :

1. Le 15 octobre 2014, le préfet de la Dordogne a, d'une part, refusé à M.Levyskyy, ressortissant ukrainien, la délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné l'Ukraine comme pays à destination duquel il serait éloigné. Par jugement du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les conclusions de M. Levyskyytendant à l'annulation du refus de titre de séjour et annulé l'obligation de quitter le territoire français ainsi que la désignation du pays d'éloignement au motif que l'intéressé étant titulaire d'un titre de résident de longue durée-CE délivré par les autorités portugaises en cours de validité, le préfet ne pouvait prononcer une obligation de quitter le territoire français mais seulement prendre à son encontre une décision de remise aux autorités portugaises, et, par voie de conséquence, annulé également la décision fixant le pays d'éloignement. Le préfet de la Dordogne relève appel de ce jugement en tant qu'il annule l'obligation de quitter le territoire français et la désignation du pays d'éloignement tandis que M. Levyskyy, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation du refus de titre de séjour.

Sur le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3° ". L'article L. 121-3 du même code, dispose à son 1er alinéa que " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. ". Il résulte de ces dispositions que le membre de famille visé au 5° de l'article L. 121-1 n'a de droit au séjour pour une durée supérieure à trois mois que si son conjoint satisfait lui-même à l'une des conditions posées par l'article L. 121-1. Enfin, l'article R. 121-4 du CESEDA précise que " Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. ".

3. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. Levyskyyn'est titulaire que de contrats de travail saisonnier dont le dernier expirait le 15 octobre 2014. Ses revenus, auxquels il n'y a lieu d'ajouter ni ceux que le requérant tirait de son emploi au Portugal qu'il va nécessairement cesser d'exercer ni ceux qu'il pourrait tirer de l'exercice d'une activité professionnelle en France dès lors qu'il ne se prévaut que d'une promesse d'embauche, sont largement inférieurs au montant forfaitaire du revenu de solidarité active. Par suite M. Levyskyyne peut prétendre à un droit au séjour sur le fondement du 5° de l'article L. 121-1 du CESEDA.

4. Par suite, M. Levyskyyn'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande d'annulation du refus de titre de séjour.

Sur l'obligation de quitter le territoire français et la désignation du pays d'éloignement :

5. Il résulte des dispositions des articles L. 531-1 et L. 531-2 du CESEDA, que le champ des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Ainsi, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 531-1 ou des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 531-2, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagée l'autre. Toutefois, si l'étranger est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une " carte bleue européenne " délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat.

6. Il ressort des pièces du dossier que le titre de séjour délivré par les autorités portugaises à M.Levyskyy, intitulé " cartao de résidencia ", n'est pas revêtu de la mention " résidente de longa duraçao " qui est apposée sur les titres de longue durée-CE délivrés par les autorités portugaises, et ne peut donc être regardé comme un titre de longue durée-CE, pour l'application de L. 531-2 du CESEDA. Il ne peut non plus être assimilé à un tel titre par application des dispositions prises dans le cadre particulier de l'établissement du code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières (code frontières Schengen) issu du règlement (CE) du 15 mars 2006 susvisé et pris pour la création d'un espace de libre circulation, lesquelles sont sans incidence sur la mise en oeuvre de la procédure particulière de réadmission prévue aux articles L. 531-1 et 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, le titre de séjour de M.Levyskyy, en raison de sa durée de validité de cinq ans, doit être regardé comme un titre de résident de longue durée. Dès lors il appartenait au préfet de la Dordogne d'examiner en priorité s'il y avait lieu de reconduire M. Levyskyyau Portugal ou de le réadmettre.

7. Il ne ressort d'aucun des motifs de l'arrêté que le préfet de la Dordogne, avant de prononcer à l'encontre de M. Levyskyyune obligation de quitter le territoire français, avec désignation de l'Ukraine comme pays d'éloignement, ait examiné s'il y avait lieu de le reconduire à destination du Portugal ou de prononcer une réadmission dans cet Etat. La circonstance que l'arrêté mentionne que M. Levyskyypourra également être reconduit d'office à la frontière à destination de tout autre pays dans lequel il pourrait être légalement admissible ne peut suffire à établir qu'un tel examen prioritaire aurait été entrepris. De même la mention qu'en cas d'interpellation, M. Levyskyypourra demander à être réadmis dans le pays de l'Union européenne où il est détenteur d'un titre de séjour ne saurait pallier à l'illégalité dont est affectée la décision de prononcer d'emblée une obligation de quitter le territoire français.

8. Par suite, le préfet de la Dordogne n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par jugement du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 15 octobre 2014, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et désignation du pays d'éloignement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me A....

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. Levyskyyprésentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : La requête présentée par le préfet de la Dordogne est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. Levyskyyprésentées par la voie de l'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. Levyskyyprésentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 15BX01081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX01081
Date de la décision : 06/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: Mme Christine MEGE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : LOPY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-10-06;15bx01081 ?
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