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17/07/2015 | FRANCE | N°13BX03335

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 17 juillet 2015, 13BX03335


Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 11 décembre 2013 et régularisée par courrier le 16 décembre 2013, présentée pour la société Opale Net, dont ...), par la société d'avocats Reinhart Larville Torre ;

La société Opale Net demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900553 du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2004 au 30 juin 2007 ainsi que les pénal

ités y afférentes dont elle s'est acquittée pour un montant de 172 486 euros ;

2°) d...

Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 11 décembre 2013 et régularisée par courrier le 16 décembre 2013, présentée pour la société Opale Net, dont ...), par la société d'avocats Reinhart Larville Torre ;

La société Opale Net demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900553 du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2004 au 30 juin 2007 ainsi que les pénalités y afférentes dont elle s'est acquittée pour un montant de 172 486 euros ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2015 :

- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;

- les conclusions de Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que l'EURL Opale Net, société de droit français établie à Toulouse, détenue en totalité par la société de droit canadien Opale Net Inc, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2003 au 31 mai 2006 et d'un contrôle sur pièces portant sur la période du 1er juin 2006 au 30 juin 2007, périodes pendant lesquelles l'administration a relevé que l'EURL avait facturé en franchise de TVA ses prestations à des sociétés de droit américain ou canadien, les regardant comme des livraisons extracommunautaires à un preneur établi hors de la communauté européenne ; que l'EURL Opale Net a été à ce titre assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de chacun des exercices vérifiés ; qu'elle demande à la cour d'annuler le jugement du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la restitution de ces rappels de taxe, ainsi que les pénalités y afférentes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que pour rejeter la demande de l'EURL Opale Net, le tribunal administratif s'est notamment fondé sur la date à laquelle la société Opale Net LLC, de droit américain, a été radiée du registre des sociétés de l'Etat du Delaware, en relevant que cette date était postérieure à l'envoi des propositions de redressement ; qu'il a ainsi répondu au moyen tiré de la disparition de la société Opale Net LLC; que la circonstance qu'il n'ait pas fait droit à ce moyen relève du bien-fondé des impositions, et non de la régularité du jugement ;

Sur les conclusions en restitution :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle. " ; qu'aux termes de l'article 259 B du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France lorsqu'elles sont effectuées par un prestataire établi hors de France et lorsque le preneur est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ou, à défaut, qui y a son domicile ou sa résidence habituelle : (...) 12° Services fournis par voie électronique fixés par décret . (...) Le lieu de ces prestations est réputé ne pas se situer en France même si le prestataire est établi en France lorsque le preneur est établi hors de la communauté européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la communauté. " ;

4. Considérant que l'article 259 B du code général des impôts définit, pour les prestations qu'il énumère, les règles de territorialité applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ; que la localisation en France ou en dehors de France d'une prestation mentionnée par cet article dépend ainsi des lieux d'établissement du preneur et du prestataire ainsi que de la qualité d'assujetti du preneur ; que dans le cas où cette prestation serait rendue au profit de plusieurs preneurs, elle doit être regardée comme une prestation indivisible rendue au profit d'une entité économique unique ; que, dans ce cas, la prestation ne peut être décomposée en différentes prestations rendues aux différentes personnes composant l'entité économique preneuse ; qu'à moins que le véritable preneur soit, en réalité, une seule des personnes en cause, le preneur de la prestation doit être regardé comme une entité économique distincte des personnes qui la composent, alors même que cette entité n'aurait pas la personnalité morale ;

5. Considérant que l'EURL Opale Net est entièrement détenue par la société Opale Net Inc, de droit canadien, et juridiquement indépendante des deux autres sociétés du groupe, Opale Net LLC et Opale Net USA LLC, de droit américain ; que si l'EURL Opale Net invoque la dissolution puis la liquidation des sociétés Opale Net LLC et Opale Net USA, il résulte de l'instruction que leur radiation du registre de l'Etat du Delaware n'est intervenue que le 13 novembre 2007, et que ces sociétés sont restées actives après leur dissolution ; qu'eu égard à la proximité entre les sociétés Opale Net LLC et Opale Net USA qui, selon la requérante, se seraient en fait succédées, et avec la société Opale Net Inc, chez laquelle la société Opale Net USA a été domiciliée, les prestations effectuées par la société doivent être regardées comme ayant été rendues indistinctement au profit des différentes sociétés du groupe Opale; que, par suite, l'EURL Opale Net ne peut utilement soutenir qu'en l'absence de moyens propres, et compte tenu d'une activité limitée au transfert de fonds à la société Opale Net Inc, les sociétés Opale Net LLC et Opale Net USA ne pouvaient avoir la qualité de preneur des prestations facturées ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité de l'EURL Opale Net ne se bornait pas à la gestion administrative et technique des services informatiques proposés à la clientèle française, mais s'étendait à la prospection commerciale auprès de sociétés françaises susceptibles de conclure des contrats de partenariat ou d'affiliation avec les sociétés du groupe Opale, et incluait le conseil en marketing et le suivi de l'attribution des noms de domaine ; qu'à cette fin le gérant de l'EURL Opale Net était habilité à signer les contrats avec ses partenaires commerciaux au nom des sociétés du groupe ; que les conditions dans lesquelles la société Opale Net Inc oriente et contrôle l'activité de l'EURL Opale Net ne saurait retirer à cette dernière le caractère d'entité autonome et permanente, dotée de moyens lui permettant de réaliser elle-même les prestations de services facturées aux sociétés du groupe Opale, dont elle constituait ainsi l'établissement stable en France ; que ces prestations étant réalisées au profit des différentes sociétés du groupe, l'EURL Opale Net ne peut non plus soutenir utilement qu'elle serait un élément constitutif de la société Opale Net LLC, et à ce titre ne pourrait être à la fois l'auteur de ces prestations et leur preneur, ou que ces prestations constitueraient des livraisons internes à la société ;

7. Considérant, dans ces conditions, que les différentes sociétés établies hors de l'Union européenne constituant le groupe Opale doivent être regardées comme ayant exercé leur activité par l'intermédiaire de l'établissement stable dont elles disposaient en France ; qu'ainsi, en application de l'article 259 précité du code général des impôts, les prestations facturées à leur profit doivent être regardées comme réalisées en France, et sont donc redevables de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les prestations réalisées auraient constitué une livraison extracommunautaire, exonérée de TVA, doit être écarté ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, " les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

9. Considérant que le dirigeant commun des sociétés Opale Net LLC, Opale Net USA LLC et Opale Net Inc, cette dernière détenant en outre la totalité du capital de l'EURL Opale Net, ne pouvait ignorer cette situation qu'il avait lui-même créée afin d'éluder le versement de la TVA grevant les prestations réalisées en France par l'EURL Opale Net ; qu'ainsi, eu égard aux liens de dépendance juridique ou financière entre les sociétés concernées, et compte tenu de leur importance et de leur répétition sur l'ensemble de la période contrôlée, les infractions aux règles en matière d'établissement de la TVA n'ont pu être commises que de façon délibérée ; que le moyen tiré de l'absence de caractère délibéré de ces infractions doit par suite être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Opale Net n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de l'EURL Opale Net tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la société Opale Net est rejetée.

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N° 13BX03335


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03335
Date de la décision : 17/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. Antoine BEC
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS REINHART LARVILLE TORRE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-07-17;13bx03335 ?
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