Vu la requête enregistrée le 20 juin 2014, présentée pour Mme A...B...demeurant..., par la SCP Bonnet et Brugier ;
Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400597 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 février 2014 par lequel la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la date de la notification de l'arrêt à intervenir, dans l'attente du réexamen de sa situation administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2014 :
- le rapport de M. Aymard de Malafosse, président de chambre ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
1. Considérant que MmeB..., ressortissante tchadienne née le 1er janvier 1954, est entrée en France le 1er novembre 2009 selon ses déclarations ; qu'elle s'est vue délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, valable jusqu'au 27 septembre 2013 ; que, le 29 août 2013, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour temporaire ; qu'à la suite de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé Poitou-Charentes en date du 17 septembre 2013, la préfète de la Vienne a, par un arrêté du 3 février 2014, refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ; que Mme B...relève appel du jugement du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général.(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 16 juin 2011 dont elles sont issues, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...souffre d'une hypertension artérielle compliquée d'une cardiopathie hypertrophique, de goutte, d'insuffisance rénale chronique et d'une lombalgie chronique invalidante ; que, par un avis du 17 septembre 2013, le médecin de l'agence régionale de santé Poitou-Charentes a estimé que l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié au Tchad ; que la préfète de la Vienne a toutefois refusé de délivrer à l'intéressée un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en lui opposant la possibilité de recevoir, au Tchad, les soins adaptés à son état de santé ; que, pour prendre cette décision, la préfète s'est fondée, d'une part, sur la liste nationale des médicaments essentiels établie par les autorités sanitaires du pays comportant, selon elle et sans qu'elle soit contredite sur ce point, la médication nécessaire à la requérante, d'autre part, sur des documents versés au dossier portant sur l'ouverture à N'Djamena, fin 2013, d'un hôpital moderne doté de plateaux techniques spécialisés de nature à assurer les soins et le suivi médical qui lui sont actuellement dispensés en France ; que ni l'article de presse daté du 6 février 2013 qui constate le manque de personnel médical et le caractère inégal de leur répartition au Tchad, ni le certificat médical du 17 janvier 2014 du docteur Valancogne qui se borne à répertorier les pathologies de MmeB..., ne sont de nature à remettre en cause la pertinence des éléments sur lesquels s'est fondé la préfète pour conclure à la disponibilité au Tchad, à la date de l'arrêté contesté, d'un équipement hospitalier et de médicaments adaptés à l'état de santé de l'intéressée ; que les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, ne conditionnent plus le rejet de la demande de titre de séjour d'un étranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, à l'effectivité de l'accès à un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que la situation personnelle de Mme B...ne relevait pas d'une circonstance humanitaire exceptionnelle, le préfet ait commis une erreur manifeste d'appréciation ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
6. Considérant que si Mme B...soutient qu'elle séjourne depuis plus de quatre ans en France où se trouve désormais le centre de ses intérêts, elle ne justifie pas d'une insertion particulière dans la société française ; qu'elle reconnaît avoir de la famille au Tchad où résident sa soeur et son demi-frère et ne démontre pas qu'elle n'aurait plus aucun contact avec eux ou ses propres enfants ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches personnelles dans ce pays où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de cinquante-cinq ans ; que, dans ces conditions, la préfète de la Vienne n'a pas porté au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté contesté a été pris ; que, par suite, la préfète de la Vienne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant que pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus au point 8, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la requérante, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
10. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
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N°14BX01867