La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2014 | FRANCE | N°14BX00567

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 20 novembre 2014, 14BX00567


Vu la requête enregistrée par télécopie le 21 février 2014 et régularisée par courrier le 26 février 2014, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me B...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1200535 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 mars 2012 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " liens personnels et familiaux " ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjo

indre au préfet de Mayotte de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois à...

Vu la requête enregistrée par télécopie le 21 février 2014 et régularisée par courrier le 26 février 2014, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me B...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1200535 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 mars 2012 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " liens personnels et familiaux " ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à défaut de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le règlement de cette somme valant renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

-----------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'ordonnance n°2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;

Vu le décret n°2001-635 du 17 juillet 2001 pris pour l'application de l'ordonnance n°2000-373 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2014 :

-le rapport de Mme Michèle Richer, président ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité comorienne, fait appel du jugement du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 mars 2012 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence " ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ; que, conformément au principe du caractère contradictoire de l'instruction, le juge administratif est tenu de ne statuer qu'au vu des seules pièces du dossier qui ont été communiquées aux parties ;

3. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement querellé que pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige, le tribunal s'est appuyé sur la copie intégrale de l'arrêté contesté produite par le préfet de Mayotte ; que cette pièce n'a pas été communiquée au requérant qui n'a pu en avoir connaissance dans son intégralité ; qu'en procédant ainsi, les premiers juges ont méconnu le caractère contradictoire de la procédure ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Mayotte ;

Sur la légalité de l'arrêté du 2 mars 2012 :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé par M. Patrick Duprat, secrétaire général de la préfecture de Mayotte, qui a reçu à cet effet une délégation de signature par arrêté préfectoral du 23 septembre 2011 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 avril 2000 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte : " (...) II. - La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit l'existence de liens personnels et familiaux à Mayotte tels que le refus d'autoriser son séjour porterait au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus porte la mention " liens personnels et familiaux " ; que l'article 25 du décret n° 2001-635 du 17 juillet 2001 dispose : (...) " l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs à Mayotte au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que M. C...soutient qu'il est arrivé à Mayotte en 1998 et justifie de seize années de résidence continue, qu'il est père d'un enfant né en 2002 issu d'une première union et que depuis 2005, il vit en concubinage avec une ressortissante comorienne en situation régulière et de leur union est né en 2011 un enfant dont il s'occupe au quotidien, qu'il a travaillé comme salarié et qu'en 2011 il a créé sa propre exploitation de bovins ; qu'il n'a plus aucune attache familiale aux Comores dans la mesure où son père est décédé et qu'il n'a plus de nouvelles de sa mère depuis des années ; que toutefois les documents produits par M. C..., qui ne justifie pas de la date à laquelle il serait entré en France, ne permettent pas de conclure à sa présence continue à Mayotte depuis 1998 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de l'attestation, insuffisamment circonstanciée, de la mère de son premier enfant, qu'il entretient effectivement avec ce dernier des relations affectives régulières et suivies ; que de même l'attestation de la mère de son deuxième enfant accompagnée de la déclaration de vie commune, ne suffit pas à établir la continuité de la relation ni qu'il s'occupait de son enfant à la date de l'arrêté contesté ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toute attache aux Comores ; que dans ces circonstances, compte tenu notamment des conditions du séjour à Mayotte de M.C..., en lui refusant le titre de séjour sollicité, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article 15 II de l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;

8. Considérant que contrairement à ce que fait valoir le requérant, le préfet peut prendre en compte la continuité de son séjour à Mayotte pour apprécier la réalité de ses attaches familiales ; qu'ainsi, le préfet n'a pas commis d'erreur de fait en motivant sa décision par la circonstance que la continuité de son séjour n'était pas établie depuis 1998 compte tenu des pièces produites à l'appui de sa demande de titre de séjour ;

9. Considérant qu'en indiquant que M. C...déclare vivre en concubinage avec une autre femme en situation irrégulière, sans apporter les preuves de la régularité du séjour de cette dernière ni de leur vie commune, le préfet de Mayotte n'a entaché son arrêté d'aucune contradiction de motifs ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que l'absence alléguée d'attache familiale dans le pays d'origine ne suffit pas à établir le risque d'un traitement prohibé par ces stipulations ; qu'en l'absence d'élément précis sur les risques encourus, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Mayotte ne peut qu'être rejetée ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Mayotte en date du 31 octobre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête d'appel est rejeté.

-----------------------------------------------------------------------------------------------

''

''

''

''

2

No14BX00567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00567
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : GIRONDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-11-20;14bx00567 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award