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06/11/2014 | FRANCE | N°13BX02040

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 06 novembre 2014, 13BX02040


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 22 juillet 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par la SCP Nataf et Planchat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101632 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a spontanément acquittés au cours des années 1989 à 2005 au titre de son activité d'ostéopathe ;

2°) de prononcer la restitution sollicitée ;r>
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 76...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 22 juillet 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par la SCP Nataf et Planchat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101632 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a spontanément acquittés au cours des années 1989 à 2005 au titre de son activité d'ostéopathe ;

2°) de prononcer la restitution sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 ;

Vu le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre :

- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., masseur kinésithérapeute exerçe également l'activité d'ostéopathe ; qu'estimant pouvoir bénéficier des dispositions de l'article 261 du code général des impôts, il a demandé la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a spontanément acquittée au titre de la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 2005 ; qu'il fait appel du jugement du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions et des amendes " ;

3. Considérant qu'à défaut de créance certaine, l'espérance légitime d'obtenir la restitution d'une somme d'argent doit être regardée comme un bien, au sens des stipulations précitées du premier alinéa de cet article ; que, toutefois, le délai de réclamation d'au moins deux ans, instauré par l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales précité, à compter de la date de la mise en recouvrement ou, à défaut, du versement de l'imposition est suffisant pour permettre aux contribuables de faire valoir utilement leurs droits ; que par suite les dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ne méconnaissent pas les exigences qui s'attachent à la protection d'un droit patrimonial telles qu'elles découlent des stipulations précitées du premier protocole additionnel ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, précité, qui vise à garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ;

6. Considérant toutefois que l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ; qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) / Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) / Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;

7. Considérant que le décret du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et le décret du même jour relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation, pris pour l'application de cet article, n'ont été publiés que le 27 mars 2007 ; qu'en vertu de la réglementation de sa profession, notamment des articles R. 4321-5 et R. 4321-7 du code de la santé publique habilitant les masseurs-kinésithérapeutes à pratiquer, sur prescription médicale, des actes de " mobilisation manuelle de toutes les articulations, à l'exclusion des manoeuvres de force ", M. A... n'était donc habilité à accomplir, durant la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 2005, que certains actes d'ostéopathie, les autres actes ne pouvant être pratiqués que par les docteurs en médecine ;

8. Considérant que pour obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés sur ses prestations d'ostéopathie, il appartient ainsi à M. A... d'établir que sa pratique s'est limitée aux seuls actes d'ostéopathie autorisés aux kinésithérapeutes, ou qu'il dispose de qualifications professionnelles propres à assurer à ses prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par un médecin; qu'une telle appréciation ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; qu'est en revanche, sans incidence la circonstance que l'intéressé a pu ultérieurement faire valoir certains éléments relatifs à sa pratique professionnelle, lors de la mise en oeuvre des mesures transitoires prévues à l'article 16 du décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 en vue d'autoriser l'usage du titre professionnel d'ostéopathe par les praticiens en exercice à la date de publication de ce décret ; que l'invocation des critères d'appréciation que cet article fixerait est également inopérant ; que pour mettre le juge administratif à même de s'assurer que la condition tenant à la qualité de ses actes était remplie, il appartenait dès lors à M. A... de produire, d'une part, et sous réserve de l'occultation des noms des patients, les éléments relatifs à sa pratique permettant d'appréhender, sur la période en cause, la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à ses qualifications professionnelles ; que si M. A... se prévaut de la formation suivie dans une école d'ostéopathie et de l'autorisation d'user du titre professionnel d'ostéopathe obtenue dans le cadre de la procédure instituée par le décret du 25 mars 2007 mentionné ci-dessus, il ne produit aucun élément relatif à sa pratique de 1989 à 2005 ; qu'ainsi, il n'établit pas n'avoir accompli au cours des années 1989 à 2005 que les actes d'ostéopathie dont la pratique par les kinésithérapeutes est autorisée, ou que les actes pratiqués pouvaient être regardés comme d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués par un médecin pratiquant l'ostéopathie, auraient bénéficié de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ;

9. Considérant que la formation suivie dans une école d'ostéopathie n'est pas suffisante pour apprécier les qualifications professionnelles de M.A... ; qu'en s'abstenant d'analyser la formation d'ostéopathe par rapport à la formation de médecin et de kinésithérapeute, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'insuffisance de motivation ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de poser de question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie qui succombe, les conclusions tendant à ce qu'il soit condamné à verser à M. A... une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

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N° 13BX02040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02040
Date de la décision : 06/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Exemptions et exonérations.

Santé publique - Professions médicales et auxiliaires médicaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. Antoine BEC
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-11-06;13bx02040 ?
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