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13/05/2014 | FRANCE | N°13BX01805

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 13 mai 2014, 13BX01805


Vu, I, la requête enregistrée le 3 juillet 2013 sous le n° 13BX01805, présentée pour la Sas Davigel, ayant son siège BP 41 à Dieppe (76201), par Me A...;

La Sas Davigel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102388 du 14 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge du supplément de cotisation foncière des entreprises auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2010 dans les rôles de la commune d'Yvrac ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition ;

3°) de condamner l'Et

at à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice admin...

Vu, I, la requête enregistrée le 3 juillet 2013 sous le n° 13BX01805, présentée pour la Sas Davigel, ayant son siège BP 41 à Dieppe (76201), par Me A...;

La Sas Davigel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102388 du 14 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge du supplément de cotisation foncière des entreprises auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2010 dans les rôles de la commune d'Yvrac ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'un entrepôt de stockage, quand bien même il serait équipé de chambres froides, n'a pas le caractère d'un établissement industriel ; qu'il y a lieu de rechercher si le rôle fonctionnel des installations techniques est prépondérant dans le processus opérationnel de l'activité, au regard notamment des moyens humains nécessaires ; qu'en l'espèce, les matériels utilisés ne jouent pas un rôle prépondérant dans l'activité de préparation des commandes ; que les premiers juges se sont seulement fondés sur la présence de chambres froides et, sans d'autres précisions, sur le nombre de matériels ; que les matériels et logiciels informatiques, notamment le logiciel de gestion des stocks utilisé par toutes les entreprises commerciales, ne suffisent pas à caractériser un établissement industriel ; que la réception et le rangement des marchandises et les opérations de routage des commandes sont assurés par la main-d'oeuvre ; qu'en ne prenant pas en compte l'intervention humaine particulièrement significative en l'espèce, s'agissant d'un établissement qui emploie 51 personnes chargées de préparer les commandes et présentes sur une large amplitude horaire, le tribunal a statué ultra-petita ; que le rôle prépondérant est assuré par la main-d'oeuvre ;

- que la valeur des équipements et matériels est plus de six fois inférieure à celle des constructions et des terrains ; que la part des matériels de motricité ne représente que 0,9 % du coût de la construction ; que les rayonnages et les engins de manutention sont les mêmes que ceux utilisés dans les hypermarchés ;

- que l'article 1499 du code général des impôts, qui ne donne pas de définition de l'établissement industriel et permet à l'administration d'en retenir une défavorable au contribuable et de l'apprécier de façon subjective, ne satisfait pas à l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité à la loi qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la déclaration de 1789 ; que le critère de prépondérance des installations techniques porte atteinte à la sécurité juridique et au principe d'égalité devant l'impôt ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances (direction de contrôle fiscal sud-ouest), qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que les centres interrégionaux de distribution, correspondant aux sites les plus importants, disposent de moyens techniques importants ; que le stockage des produits se fait sur des paletiers de deux ou trois niveaux avec une hauteur de stockage de 4,50 mètres à 6 mètres ; que le site, équipé de neuf quais, traite un flux quotidien de 132 palettes ; que l'ensemble est géré par un important système informatique centralisé doté d'un logiciel de gestion qui prend en charge la gestion des stocks, la confection et le routage des commandes ; que les employés se bornent à suivre les instructions de l'interface de guidage vocal ; que l'établissement dispose de 30 à 50 engins de manutention loués ; qu'ainsi, les moyens techniques sont importants ;

- que le respect de la chaîne du froid, y compris lors de l'entreposage des produits, constitue un impératif sanitaire, tant juridique que commercial, lié à la qualité des produits livrés ; qu'ainsi, compte tenu également du rendement de 8,3 par m3, les installations frigorifiques jouent un rôle prépondérant ;

- s'agissant de la constitutionnalité de l'article 1499 du code général des impôts, que les critères du caractère industriel ont été posés par la doctrine administrative et la jurisprudence, ce qui répond à l'impératif de sécurité juridique ;

Vu le mémoire enregistré le 9 janvier 2014, présenté pour la Sas Davigel ;

Vu, II, la requête enregistrée le 4 juillet 2013 sous le n° 13BX01823, présentée pour la Sas Davigel, ayant son siège BP 41 à Dieppe (76201), par Me A...;

La Sas Davigel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102154 du 14 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2007 dans les rôles de la commune d'Yvrac ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761- 1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'un entrepôt de stockage, quand bien même il serait équipé de chambres froides, n'a pas le caractère d'un établissement industriel ; qu'il y a lieu de rechercher si le rôle fonctionnel des installations techniques est prépondérant dans le processus opérationnel de l'activité, au regard notamment des moyens humains nécessaires ; qu'en l'espèce, les matériels utilisés ne jouent pas un rôle prépondérant dans l'activité de préparation des commandes ; que les premiers juges se sont seulement fondés sur la présence de chambre froides et, sans d'autres précisions, sur le nombre de matériels ; que les matériels et logiciels informatiques, notamment le logiciel de gestion des stocks utilisé par toutes les entreprises commerciales, ne suffisent pas à caractériser un établissement industriel ; que la réception et le rangement des marchandises et les opérations de routage des commandes sont assurés par la main-d'oeuvre ; qu'en ne prenant pas en compte l'intervention humaine particulièrement significative en l'espèce, s'agissant d'un établissement qui emploie 51 personnes chargées de préparer les commandes et présentes sur une large amplitude horaire, le tribunal a statué ultra-petita ; que le rôle prépondérant est assuré par la main-d'oeuvre ;

- que la valeur des équipements et matériels est plus de six fois inférieure à celle des constructions et des terrains ; que la part des matériels de motricité ne représente que 0,9 % du coût de la construction ; que les rayonnages et les engins de manutention sont les mêmes que ceux utilisés dans les hypermarchés ;

- que l'article 1499 du code général des impôts, qui ne donne pas de définition de l'établissement industriel et permet à l'administration d'en retenir une défavorable au contribuable et de l'apprécier de façon subjective, ne satisfait pas à l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité à la loi qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la déclaration de 1789 ; que le critère de prépondérance des installations techniques porte atteinte à la sécurité juridique et au principe d'égalité devant l'impôt ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances (direction des vérifications nationales et internationales), qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que les centres interrégionaux de distribution, correspondant aux sites les plus importants, disposent de moyens techniques importants ; que le stockage des produits se fait sur des paletiers de deux ou trois niveaux avec une hauteur de stockage de 4,50 mètres à 6 mètres ; que le site équipé de neuf quais traite un flux quotidien de 132 palettes ; que l'ensemble est géré par un important système informatique centralisé doté d'un logiciel de gestion qui prend en charge la gestion des stocks, la confection et le routage des commandes ; que les employés se bornent à suivre les instructions de l'interface de guidage vocal ; que l'établissement dispose de 30 à 50 engins de manutention loués ; qu'ainsi, les moyens techniques sont importants ;

- que le respect de la chaîne du froid, y compris lors de l'entreposage des produits, constitue un impératif sanitaire, tant juridique que commercial, lié à la qualité des produits livrés ; qu'ainsi, compte tenu également du rendement de 8,3 par m3, les installations frigorifiques jouent un rôle prépondérant ;

- s'agissant de la constitutionnalité de l'article 1499 du code général des impôts, que les critères du caractère industriel ont été posés par la doctrine administrative et la jurisprudence, ce qui répond à l'impératif de sécurité juridique ;

Vu le mémoire enregistré le 7 janvier 2014, présenté pour la Sas Davigel ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 15 janvier 2014 à 12 heures ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2014 :

- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que, pour les besoins de son activité de négoce de produits alimentaires surgelés et réfrigérés auprès de professionnels de la restauration, la Sas Davigel dispose à Yvrac d'un établissement servant au stockage et à la distribution des produits ; que l'administration fiscale a réévalué la valeur locative servant de base à la taxe foncière sur les propriétés bâties, à reprendre dans les bases de la taxe professionnelle, en la déterminant non plus suivant les règles définies pour les locaux commerciaux par l'article 1498 du code général des impôts, mais selon la méthode comptable prévue à l'article 1499 du même code pour les établissements industriels ; que, par la requête enregistrée sous le n° 13BX01823, la Sas Davigel fait appel du jugement du 14 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge des suppléments de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie de ce chef au titre des années 2005 à 2007 ; que, par la requête enregistrée sous le n° 13BX01805, elle fait appel du jugement du même jour par lequel le tribunal a rejeté sa demande en décharge du supplément de cotisation foncière des entreprises mis à sa charge au titre de l'année 2010 ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes, qui ont fait l'objet d'une instruction commune, pour y statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant qu'en vertu de l'article 1467 du code général des impôts, la taxe professionnelle prévue à l'article 1447 du même code a pour base, dans le cas des contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents d'affaires et les intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés, la valeur locative des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle ; que selon le 1° de l'article 1469 dudit code, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2009, pour les biens passibles d'une taxe foncière la valeur locative est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ; qu'aux termes de l'article 1467 de ce code, applicable aux impositions établies à compter du 1er janvier 2010 : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. " ; que les règles de détermination de la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession, à l'article 1498 pour tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et les établissements industriels visés à l'article 1499 pour les "immobilisations industrielles" ; que revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la plate-forme logistique dénommée "centre interrégional de distribution", d'une superficie totale de 6.340 m², dont la Sas Davigel dispose à Yvrac pour la réception des produits, leur stockage, la préparation des commandes et leur expédition, est équipée de neuf quais de déchargement, de chambres froides à température dirigée d'une superficie de 3 540 m², d'un système informatique centralisé doté d'une interface de guidage vocal, de paletiers de deux ou trois niveaux offrant une hauteur de stockage pouvant atteindre six mètres, de divers engins de manutention et d'un système de froid ; qu'alors même que la valeur brute des installations, matériels et outillages inscrits au compte 215 du bilan représenterait moins du quart de la valeur des terrains et constructions, ces moyens techniques, d'une valeur comptable supérieure à 1 000 000 euros, doivent être regardés comme importants ; qu'ils permettent à la société, qui n'affecte aux activités de stockage des marchandises et de préparation des commandes exercées dans les locaux qu'une cinquantaine d'employés, de traiter quotidiennement un flux de 132 palettes ; que la société requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que l'intervention manuelle du personnel est primordiale pour l'exercice de ces activités ; que les installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre sur le site d'Yvrac jouent un rôle prépondérant dans les activités qu'elle y déploie ; que, par suite, alors même que ces activités n'impliquent aucune opération de fabrication ou de transformation, l'établissement présente un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts ; que c'est donc à bon droit que l'administration a évalué les immobilisations selon la méthode comptable définie par ces dispositions ; que la documentation administrative de base 6 C-251 du 15 décembre 1988, dont la société requérante se prévaut sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne comporte aucune interprétation de l'article 1499 différente de celle dont il a été fait application ;

4. Considérant que si la Sas Davigel soutient que les dispositions de l'article 1499 du code général des impôts portent atteinte aux objectifs de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme et aux principes de sécurité juridique et d'égalité devant l'impôt, il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des cas où il est saisi dans les conditions prévues aux articles 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel et R.771-3 du code de justice administrative, de se prononcer sur un moyen tiré de la non-conformité de dispositions législatives aux droits et libertés garantis par la Constitution ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Sas Davigel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, qui sont suffisamment motivés, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de la Sas Davigel sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sas Davigel et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Bertrand Riou, président-assesseur,

Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 mai 2014.

Le rapporteur,

Marie-Thérèse LACAU Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Virginie MARTY

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N°13BX01805, 13BX01823


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01805
Date de la décision : 13/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-05-13;13bx01805 ?
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