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12/02/2013 | FRANCE | N°12BX01793

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 12 février 2013, 12BX01793


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2012, présentée pour Mme A...C...demeurant au..., par Me B... ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1200745 du 2 mai 2012 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ainsi que d'une interdiction de retour et désignant le pays d'éloignement ;r>
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de r...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2012, présentée pour Mme A...C...demeurant au..., par Me B... ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1200745 du 2 mai 2012 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ainsi que d'une interdiction de retour et désignant le pays d'éloignement ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2013 :

- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeC..., ressortissante monténégrine née le 20 octobre 1947, est entrée en France le 16 octobre 2009 et a sollicité l'asile politique ; que l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande par une décision du 19 mai 2011 que la cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmée le 16 décembre 2011 ; que Mme C... relève appel de l'ordonnance du 2 mai 2012 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ainsi que d'une interdiction de retour et désignant le pays d'éloignement ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7°) Rejeter, après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés (...) ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;

En ce qui concerne le moyen de légalité externe :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré " ; qu'aux termes de l'article R. 311-10 du même code : " Le titre de séjour est délivré par le préfet du département dans lequel l'étranger a sa résidence (...) " ; que selon l'article 43 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 : " Le préfet de département peut donner délégation de signature : (...) 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'État dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission " ;

4. Considérant que, par l'arrêté du 13 janvier 2012, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial du département de la Gironde n° 3 du 1er juillet 2011 au 13 janvier 2012, Mme Dilhac, secrétaire générale de la préfecture de la Gironde, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, requêtes, mémoires, correspondances et documents, concernant l'administration de l'État dans le département de la Gironde ", au rang desquels figurent les arrêtés portant refus d'admission au séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français ; que cet arrêté étant un acte réglementaire faisant l'objet d'une publication officielle, il était accessible à tous et le préfet de la Gironde n'était pas tenu de le notifier personnellement à la requérante avant de prendre l'arrêté attaqué du 1er février 2012 ; qu'ainsi, comme l'a estimé le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux, le moyen tiré du défaut de délégation régulière du signataire de l'acte était manifestement infondé ;

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays d'éloignement ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'au soutien des moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme C...s'est bornée à soutenir qu'elle n'avait plus aucune attache dans son pays d'origine ; que ces moyens n'étaient, ainsi, manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors surtout qu'il ressortait des pièces du dossier qu'elle était entrée en France à l'âge de soixante-deux ans, qu'elle était célibataire sans charge de famille sur le territoire français et qu'elle conservait des attaches familiales dans son pays d'origine, à savoir six de ses enfants ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'à l'encontre de la décision désignant le pays d'éloignement, Mme C...se prévalait de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes duquel : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'en se bornant à soutenir que les autorités du Monténégro ne voulaient pas lui reconnaître la nationalité de cet Etat et que les membres de la communauté Rom faisaient l'objet de discriminations dans ce pays, le moyen tiré de la violation des stipulations rappelées ci-dessus n'est manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

S'agissant de la décision d'interdiction de retour ;

7. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) / Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de la notification. / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

8. Considérant que, devant le tribunal administratif, Mme C...a fait valoir qu'elle n'avait jamais fait l'objet de mesure d'éloignement et qu'elle ne présentait pas une menace pour l'ordre public ; qu'en énonçant ces éléments de fait, qui correspondent à deux des critères que le préfet doit prendre en compte pour décider s'il peut ou non infliger une interdiction de retour, Mme C...a assorti le moyen tiré de l'erreur dans l'appréciation de sa situation au regard du III de l'article L. 511-1 précité de précisions suffisantes pour permettre d'en examiner le bien-fondé ; qu'il suit de là que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif ne pouvait se fonder sur le 7ème de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour statuer par ordonnance sur les conclusions de l'intéressée tendant à l'annulation de la décision d'interdiction de retour ; que, dès lors, la formation de jugement qui a rejeté ces dernières conclusions s'est trouvée irrégulièrement composée ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée seulement dans cette mesure ; qu'il y a lieu, pour la cour, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de l'intéressée tendant à l'annulation de la décision d'interdiction de retour ;

10. Considérant que les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne subordonnent pas l'interdiction de retour, contrairement à ce que soutient MmeC..., aux conditions d'une précédente mesure d'éloignement ou à la circonstance que l'étranger présente une menace pour l'ordre public, mais impose seulement à l'autorité préfectorale de prendre en considération l'existence ou non d'une ou de plusieurs mesures d'éloignement et la menace que l'étranger est susceptible de représenter au regard de l'ordre public, pour décider d'assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une telle interdiction ; qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de la motivation de l'arrêté attaqué, qui révèle que le préfet s'est fondé sur l'ensemble des critères énoncés par le III de l'article L. 511-1, que, comme qu'il a été dit, Mme C... est entrée en France en octobre 2009 et qu'elle n'a résidé sur le territoire français que le temps de l'instruction de sa demande d'asile, laquelle a été rejetée par l'OFPRA puis la CNDA ; que, célibataire et sans enfant en France, elle n'invoque aucun lien particulier avec la société française ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident pas moins de six de ses enfants ; que, dans ces conditions, l'interdiction de retour dont elle a fait l'objet n'est entachée ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur dans l'appréciation de sa situation personnelle ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de cette interdiction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions de Mme C...tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer sa situation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est partie perdante dans la présente instance, la somme dont Mme C...demande le versement au profit de son conseil, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 2 mai 2012 n° 1200745 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux est annulée en tant qu'elle rejette les conclusions de Mme C... dirigée contre l'interdiction de retour que comporte l'arrêté du préfet de la Gironde du 1er février 2012.

Article 2 : Le surplus de la requête, y compris les conclusions tendant à l'application de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, et les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour présentées devant le tribunal administratif de Bordeaux, ensemble sont rejetés.

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No 12BX01793


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01793
Date de la décision : 12/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Michel BAYLE
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : HACHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-02-12;12bx01793 ?
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