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18/12/2012 | FRANCE | N°12BX01223

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 18 décembre 2012, 12BX01223


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 18 juin 2012, présentés pour M. Hamid X demeurant ... par Me Beauvais ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200471 du 11 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Lot-et-Garonne du 9 janvier 2012 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Lo

t-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour à compter de l'arrêt à intervenir sous astrei...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 18 juin 2012, présentés pour M. Hamid X demeurant ... par Me Beauvais ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200471 du 11 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Lot-et-Garonne du 9 janvier 2012 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

5°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012 :

- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

1. Considérant que M. X, de nationalité marocaine, fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2012 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a pris à son encontre une décision de refus de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixé le pays dont il a la nationalité comme pays à destination duquel il sera renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation ;

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 susvisée : " Dans le cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignation d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente, soit par son président " ; qu'il y a lieu, eu égard à l'urgence qui s'attache à ce qu'il soit statué sur la requête de M. X, de prononcer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'en indiquant que l'accident de travail dont M. X a été victime n'avait pas eu pour effet de suspendre le contrat de travail dont il bénéficiait, au-delà de la date d'expiration, soit le 2 juin 2010, et que, par suite, l'intéressé ne satisfaisait plus à la condition posée par le 4° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour résider en France au titre d'un emploi saisonnier, le tribunal administratif a répondu au moyen invoqué par le demandeur, tiré de ce que, du fait de la suspension du contrat précité, il avait conservé la qualité de travailleur saisonnier postérieurement au 2 juin 2010 ; qu'il suit de là que le moyen tiré d'une omission à statuer doit être écarté ;

Sur la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de titre de séjour énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, si M. X a entendu invoquer l'insuffisance de motivation de cette décision, le moyen manque en fait ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : (...) 4° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail saisonnier entrant dans les prévisions du 3° de l'article L. 122-1-1 du code du travail et qui s'engage à maintenir sa résidence habituelle hors de France. Cette carte lui permet d'exercer des travaux saisonniers n'excédant pas six mois sur douze mois consécutifs. Par dérogation aux articles L. 311-2 et L. 313-1 du présent code, elle est accordée pour une durée maximale de trois ans renouvelable. Elle donne à son titulaire le droit de séjourner en France pendant la ou les périodes qu'elle fixe et qui ne peuvent dépasser une durée cumulée de six mois par an. Les modalités permettant à l'autorité administrative de s'assurer du respect, par le titulaire de cette carte, des durées maximales autorisées de séjour en France et d'exercice d'une activité professionnelle sont fixées par décret. Elle porte la mention "travailleur saisonnier" " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, qui était titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur saisonnier " valable du 7 février 2009 au 6 février 2012, a été victime d'un accident du travail le 15 avril 2010 ; que cette circonstance n'a pas eu pour effet de suspendre le contrat de travail dont il bénéficiait jusqu'au 2 juin 2010 ou de lui maintenir la qualité de salarié et ce, alors même qu'il bénéficiait des garanties accordées par la législation française sur les accidents du travail ; que, dès lors, le préfet de Lot-et-Garonne a pu légalement considérer que M. X, qui ne justifiait pas d'un contrat de travail en cours de validité satisfaisant aux conditions prévues par les dispositions précitées de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne disposait plus, à la date de sa dernière entrée en France, le 10 septembre 2010, de titre l'autorisant à séjourner sur le territoire national ; que le moyen tiré de la méconnaissance du 4° de l'article L. 313-10 doit donc être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ;

8. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, M. X ne peut être regardé comme étant entré régulièrement en France le 10 septembre 2010 ; qu'il ne justifie pas, par les attestations produites, qui sont insuffisamment circonstanciées, de ce que, à la date du refus de titre de séjour en litige, il séjournait en France depuis plus de six mois avec son épouse de nationalité française ; que, par suite, le préfet de Lot-et-Garonne a pu légalement, d'une part, considérer que M. X ne pouvait bénéficier des dispositions précitées de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, lui refuser, en l'absence de visa de long séjour, la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du même code ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique et au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

10. Considérant que M. X fait valoir qu'il bénéficie de contrats de travailleur saisonnier lui permettant de séjourner régulièrement en France depuis 2009, qu'il est marié depuis le mois de novembre 2011 avec une ressortissante de nationalité française dont l'état de santé nécessite sa présence à ses côtés et qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que les contrats de travailleur saisonnier dont a bénéficié M. X jusqu'au 2 juin 2010 ne lui permettaient de séjourner en France que pendant des périodes n'excédant pas six mois consécutifs ; que, comme il vient d'être dit, il ne démontre pas que la communauté de vie avec son épouse serait antérieure au mois de novembre 2011 ; qu'il n'établit pas davantage, par les pièces qu'il produit, notamment un certificat médical non circonstancié, que sa présence aux côtés de son épouse serait indispensable ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches au Maroc, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 43 ans, où il est retourné pour la dernière fois en septembre 2010 et où vit un de ses frères ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français et la désignation d'un pays de destination :

13. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, en cours d'instance devant la cour, le préfet de Lot-et-Garonne a délivré à M. X un récépissé de demande de carte de séjour valable du 12 juillet 2012 au 11 novembre 2012 l'autorisant à travailler ; que la délivrance de ce document a implicitement mais nécessairement eu pour effet de retirer les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 9 janvier 2012 ; qu'il s'ensuit que la requête de M. X est devenue sans objet en tant qu'elle est dirigée contre ces décisions ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. X demande le versement au profit de son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X se rapportant à l'obligation de quitter le territoire français et à la désignation du pays de destination édictées par l'arrêté du préfet de Lot-et-Garonne du 9 janvier 2012.

Article 2 : M. X est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 3 : Le surplus de la requête de M. X, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, est rejeté.

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No 12BX01223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01223
Date de la décision : 18/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Michel BAYLE
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : SELARL MARTIAL-BEAUVAIS-LABADIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-18;12bx01223 ?
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